Pour la quatrième fois de leur histoire, les Maliens sont appelés aux urnes dimanche pour élire leur président de la République au suffrage universel: outre le chef de l'Etat sortant Amadou Toumani Touré, donné largement favori et qui brigue un second mandat, sept autres candidats sont en lice, dont une femme. Amadou Toumani Touré, 59 ans, alias ATT, candidat indépendant, est soutenu par une coalition de 43 partis et associations regroupés au sein de l'Alliance pour la démocratie et le progrès (ADP). Son plus sérieux rival est l'actuel président de l'Assemblée nationale, Ibrahim Boubacar Keïta, 62 ans, du Rassemblement pour le Mali (RPM). Après les échéances électorales de 1992, 1997 et 2002, c'est la quatrième fois que les Maliens sont appelés à élire démocratiquement leur président. Au pouvoir depuis le 8 juin 2002, Amadou Toumani Touré brigue un second mandat de cinq ans. Il fut l'artisan de la démocratie malienne en renversant le régime du dictateur Moussa Traoré le 26 mars 1991, avant de remettre, en juin 1992, le pouvoir aux civils lors d'élections libres et transparentes, auxquelles il n'avait pas participé. Avec une population estimée en 2005 à 12 millions d'habitants, dont 60% vivent sous le seuil de pauvreté, sur un vaste territoire de 1.240.192 km2, entre Sahara et Sahel, le Mali compte 6,8 millions d'électeurs inscrits, répartis entre 20.278 bureaux de vote. Partisans et adversaires du président sortant ont mené leur campagne autour de son bilan. Pour ses partisans, l'objectif est le "takokèlen", un seul tour en langue nationale bambara. "Nous n'avons jamais eu un président de la République comme le président Touré. Il a été l'artisan du développement du Mali. Il a réalisé en un temps record des infrastructures, construit des écoles, des routes et garanti la stabilité politique et sociale", s'enthousiasme Choguel Kokalla Maïga, président du Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR), membre de la coalition soutenant ATT. Si les Maliens affichent leur fierté d'être un exemple de démocratie pour le continent, malgré la pauvreté extrême et les divisions ethniques, les détracteurs du président lui reprochent de ne pas avoir fait assez justement pour lutter contre la pauvreté. Durant toute la campagne, seul le président Touré et son principal challenger auront sillonné tout le pays. Faute de moyens, les autres candidats se sont contentés de sorties stratégiques dans certaines localités à forte densité humaine, ou dans leurs fiefs respectifs. Une femme, Sidibé Aminata Diallo, candidate pour la quatrième fois, pour le compte du petit Rassemblement pour l'éducation à l'environnement et au développement durable (REDD), se bat pour préserver l'environnement: "Je veux faire de la politique 'concrétiste' qui consiste à sortir des débats théoriques pour s'attaquer concrètement aux vrais problèmes des Maliens", dit-elle, déplorant le peu d'écho qu'ont les thèmes environnementaux auprès des autres candidats. On notait un certain désenchantement du côté des citoyens: "Ils sont tous pareils (...) Moi, je n'irai pas voter, je préfère chercher de quoi nourrir ma famille", soupire l'octogénaire Aly Coulibaly. Fadimata Touré, ménagère, compte elle voter pour ATT, grâce à ses réalisations dans le domaine social, notamment la gratuité de la césarienne, des anti-rétroviraux et des logements sociaux. Pour Djafar Thiam, universitaire et chercheur, l'enjeu principal est de ce fait le taux de participation: "Il faut voter pour (...) faire en sorte qu'à la fin, la démocratie sorte renforcée". "Au Mali, nous souhaitons des élections à la mauritanienne, où elles sont déroulées sans grandes difficultés et où le perdant a félicité le vainqueur", a-t-il ajouté, balayant en revanche le récent exemple du Nigeria.