La ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, estime dans un entretien paru hier dans le journal La Tribune que la "mécanique actuelle" de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) "c'est l'échec assuré". "La mécanique actuelle de l'Organisation mondiale du commerce, qui lie tous les sujets avec un +tout ou rien+, c'est l'échec assuré", déclare Mme Lagarde dans cet entretien. Les principales difficultés de la négociation résident "dans la partie d?équilibristes qui se joue entre les Etats-Unis et l?Inde tout particulièrement", indique-t-elle aussi. Les grandes nations commerciales ont promis samedi à Davos de relancer le cycle de Doha de libéralisation des échanges, au point mort depuis 2008, s'engageant à tout mettre en oeuvre pour aboutir à un accord en juillet. Interrogée sur les résultats concrets que la France pourrait afficher à l'issue de la présidence du G20, Mme Lagarde souligne que ce groupe de 20 nations "n'est pas un organisme décisionnel, mais une instance de concertation, de proposition, et d?élaboration de principes". La présidence française du G20 a pour ambition de parvenir à "moins de volatilité", et d'"éviter aux grands pays émergents d'être déstabilisés par les arrivées massives de capitaux, qui restent utiles à leur développement", a souligné la ministre française de l'Economie, Mme Christine Lagarde. "Au final, nous visons à assurer une croissance solide, équilibrée, durable, et créatrice d'emplois", a-t-elle indiqué. Pour atteindre cet objectif, Mme Lagarde soutient qu'"il est indispensable que le commerce mondial puisse se développer dans des conditions non faussées par une concurrence monétaire déloyale". La réforme du système monétaire international est l'un des chantiers prioritaires que s'est fixés la présidence française du G8-G20, dont les grandes lignes ont été détaillées la semaine dernière lors du Forum économique mondial de Davos. Pour préparer cette réforme, Mme Lagarde plaide pour la création en premier lieu d'une instance appropriée pour débattre des taux de change, "à laquelle évidemment participeraient les Chinois". "On peut imaginer un sous-groupe au sein du G20", a-t-elle dit. La ministre envisage aussi la possibilité de regrouper les pays dont les devises composent le Droit de tirage spécial (DTS), l'instrument monétaire de réserve international. "Encore faudrait-il qu'on élargisse le panier de monnaies sur lequel est basé le DTS, pour y intégrer le yuan chinois", a souligné Mme Lagarde. Elle estime que cela pourrait "inciter les Chinois à s'orienter vers la convertibilité du yuan". "Parallèlement, nous devons opter pour un code de conduite permettant de réguler, tempérer et contrôler les mouvements de capitaux", a ajouté la ministre française. S'agissant de la proposition française en faveur de la mise en place d'une taxe sur les transactions financières en vue de soutenir le développement, Mme Lagarde a reconnu que nombre de pays sont aujourd'hui "très rétifs", mais le travail d'explications et de convictions, a-t-elle dit, n'est qu'à ses débuts. A ce niveau, la France, a-t-elle indiqué, plaide pour "une transaction sur les changes, car c'est ce qu'il y a de plus identifiable et de plus traçable". "Son taux n'est pas défini. Mais nous savons qu'il faudra à partir de 2020 dégager près de 100 milliards de dollars par an de nouvelles recettes pour respecter les engagements pris à Copenhague sur l'aide au développement", a-t-elle relevé, notant à cet égard que la présidence française est disposée à accepter d'autres idées pour soutenir le développement. Sur le plan de la lutte contre la volatilité du prix des matières premières, autre grand chantier prioritaire de la présidence française du G8-G20, Mme Lagarde a indiqué que la France propose de travailler d'abord sur les marchés physiques des matières premières, en améliorant les infrastructures de stockage régional et de transport. "En Inde, 30 pc des récoltes pourrissent sur place parce qu'il n'y a pas de moyens pour les acheminer. A cela peuvent s'ajouter des mécanismes assurantiels, des prévisions météo plus fiables, etc", a-t-elle expliqué. La ministre française estime également nécessaire de travailler sur les marchés financiers, "pour éviter les abus de marché". "A ce sujet, il faut faire le départ entre les mouvements de marché normaux, déterminés par le rapport entre l'offre et la demande, et la spéculation", a-t-elle précisé.