La direction du géant allemand d'équipements électroniques et électrotechniques, Siemens, a tordu le cou,officiellement, à la rumeur relayée par le Handelsblatt affirmant le retrait de la firme de toute activité nucléaire. Malgré cette démonstration de force, nombre de commentateurs s'accordent néanmoins à penser que l'industriel allemand n'est plus aussi enthousiaste qu'il y a deux ans, à l'idée de se développer dans la filière nucléaire. Pour mémoire, le groupe dirigé par Peter Löscher affirmait haut et fort à cette époque, ses ambitions en la matière. Rompant brutalement ses accords avec Areva, Siemens avait annoncé dans la foulée l'ouverture de négociations avec l'entreprise russe, Rosatom, en vue de créer une entreprise commune dans le secteur nucléaire. Le marché du nucléaire était alors florissant et son avenir aussi radieux que possible. Deux ans plus tard, force est de constater que les rapprochements envisagés avec les russes en sont encore au stade des prémisses, pour ne pas dire au point mort. Comme l'indiquait un porte-parole de la firme allemande, l'heure est à la réflexion et doit tenir compte "des évènements au Japon, des conditions sur le marché mondial, mais aussi d'aspects sociaux et politiques". De quoi jeter le doute sur l'avenir nucléaire de Siemens. Il faut dire que depuis quelques mois, le paysage nucléaire mondial a pour le moins changé de physionomie. L'accident nucléaire de Fukushima a non seulement permis un retour sur le devant de la scène des anti-nucléaires, mais a également eu pour conséquence un gel, total ou partiel, de nombreux projets nucléaires à travers le monde. A commencer par l'Allemagne dont le gouvernement a très vite fait marche arrière sur la question, espérant sortir le plus rapidement possible du nucléaire. Quant à Siemens, le groupe vient de recevoir un violent coup sur les doigts de la part de la Chambre de commerce internationale. Le tribunal arbitral a en effet confirmé vendredi dernier le caractère fautif du comportement de Siemens, qui avait annoncé sa décision de sortir du capital d'Areva NP -dont il était actionnaire à hauteur de 34%- quelques jours avant d'évoquer publiquement les discussions qu'il avait avec Rosatom. Au total, la société allemande devra verser 648 millions d'euros de pénalités à Areva. La sentence du tribunal a également validé la clause de non-concurrence contenue dans les accords liant Siemens et Areva NP, contraignant de fait le groupe de Peter Löscher a ne pas chasser sur les terres du groupe d'Anne Lauvergeon avant septembre 2013. Impossible donc de nouer un quelconque partenariat avec les russes avant cette date. En attendant, le PDG de Siemens a réaffirmé l'engagement de son groupe dans les technologies vertes, sans pour autant faire oublier les incertitudes planant au-dessus de ses activités en Russie. Ces dernières pouvant pâtir d'un trop brusque changement de cap. Par ailleurs, les membres d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) tiennent leurs "états généraux du nucléaire" ce samedi 21 mai à Paris. L'occasion pour les ténors du parti écologiste de débattre sur le mode de sortie du nucléaire qu'ils envisagent, après avoir envoyé des signaux contradictoires sur cette question. Le conseil fédéral d'EELV s'est déjà prononcé samedi 14 mai pour une "sortie du nucléaire" en cas de victoire de la gauche en 2012. Les écologistes mettent également la sortie de l'atome et la proportionnelle aux élections nationales comme conditions à leurs négociations avec le PS, qui devraient s'achever à la fin de l'année. Les deux candidats à la primaire d'EELV Eva Joly et Nicolas Hulot ont ainsi co-signés une tribune pour un référendum sur le nucléaire avec Daniel Cohn-Bendit dans Le Monde. La secrétaire nationale du parti Cécile Duflot a cependant refusé de joindre sa signature aux leurs : elle penche plutôt pour une loi sur la sortie du nucléaire. Et le conseil fédéral n'a pas tranché entre ces deux alternatives. Nicolas Hulot a quant à lui été critiqué pour avoir mis du temps avant de se prononcer pour une sortie du nucléaire. "C'est dommage qu'il se réveille un peu trop tard après Fukushima", estimait ainsi Stéphane Lhomme, président de l'Observatoire sur le nucléaire et lui aussi candidat, après les hésitations de son rival. Lundi, toutes ces têtes d'affiches sont réunies sous la même bannière pour débattre de la "transition énergétique" après l'accident nucléaire de Fukushima, en compagnie de chercheurs invités à apporter leur éclairage. La défense du referendum l'emportera-t-elle ? C'est en tout cas la seule option évoquée sur le communiqué de l'événement :"Les écologistes réclament depuis des décennies un grand débat public sur les choix énergétiques, de la transparence et un référendum pour que les citoyens, une fois éclairés, s'approprient le sujet et disent clairement si oui ou non ils souhaitent sortir du nucléaire".