Alors que le cours du blé recule à Chicago, il continue à progresser en Europe. Vendredi , sur le marché à terme européen, la tonne livrable en novembre valait plus de 156 euros. "Le blé français est actuellement le plus cher au monde, fait remarquer un courtier et pourtant c'est peut-être bien ce prix-là qui s'approche le plus de la réalité". Totalement déconnecté du contexte mondial, le blé américain baisse parce que la récolte américaine approche; en revanche, sur le Vieux Continent, les opérateurs échaudés par la campagne précédente, où le blé a grimpé jusqu'à 160 euros au mois d'octobre, préfèrent jouer la prudence dès le 24 mai passé. 272.140 ont donc été remises en vente à l'intérieur de la Communauté européenne ;218.514 tonnes de maïs issues des stocks d'intervention hongrois ont été adjugées à 121,22 euros par tonne ;19.734 d'orge allemande ont été vendues à 133,56 euros/tonne ;10.957 tonnes de blé tendre aussi issues des stocks allemands ont été revendues à 148,06 euros par tonne. Bruxelles a également,, écoulé 10.466 tonnes d'orge issues des stocks suédois, vendues 120,02 euros par tonne. En France, la fécondation des graines, une étape cruciale qui déterminera la qualité de la récolte, est imminente, ce qui contribue à faire monter la pression. Mais, c'est surtout l'évolution des cultures chez les voisins d'Europe de l'Est qui alimente la hausse. En Bulgarie et en Roumanie, les rendements baisseraient de 20 à 30 %. En Ukraine, un sérieux concurrent des blés européens sur le pourtour méditerranéen, la situation est encore plus alarmante. La pluie a manqué, ce qui va provoquer une baisse massive de la production. Si les blés de la mer Noire font défaut, cela ouvre un boulevard aux blés de la façade atlantique pour les importations des pays d'Afrique du Nord ; c'est un marché conséquent, l'Egypte est l'un des plus gros importateurs au monde de blé avec des volumes de l'ordre de 7 millions de tonnes par an. Vu l'inflation du fret, les céréales en provenance des pays les plus proches bénéficient cette année d'un avantage supplémentaire. Cette année, le Maroc est, également, un client très demandeur. Là aussi, la sécheresse a eu des conséquences désastreuses, la récolte n'est que de 2 millions de tonnes contre 9 millions pour la précédente. On saura, dans les jours qui viennent, si la saison sera favorable aux exportations européennes vers le Maghreb avec la publication du résultat de l'appel d'offres, lancé par l'Algérie, pronostique un courtier français qui considère cet appel d'offres comme "la première bataille commerciale de la saison". L'Algérie, qui importe quasiment tous ses besoins en blé de meunerie, cherche à acheter 50 000 tonnes de blé pour une livraison de juillet à décembre. Enfin, dernière inconnue pour le négoce : quel sera l'impact de la montée en puissance de l'éthanol ? Avec l'ouverture, en Europe, de plusieurs usines comme celle de Lillebonne en France, la consommation intérieure de blé va sérieusement augmenter, ce qui diminue d'autant les disponibilités pour l'export. Le marché à terme du blé semble tout indiqué. " Euronext sert d'outil de couverture pour les vendeurs autant que pour les industriels ", signale Vincent Magdelaine, directeur de Coop de France - Métiers du grain. Lancé en 2002, le contrat à terme sur le blé meunier n'avait pas rencontré un franc succès jusqu'à la campagne passée. En la matière, le contrat colza lui damait largement le pion. Mais la campagne de commercialisation 2006/2007 a changé la donne. Il se traite désormais 15 000 à 20 000 tonnes de blé par jour en moyenne. Même si les fonds d'investissement, qui font de la spéculation et assurent la liquidité du marché, ne sont pas encore présents sur Euronext Paris, le marché fonctionne. "Toutes les opérations d'achat, de vente ou de couverture sont désormais possibles, indique Michel Lopez, de la direction de l'agriculture et de l'agroalimentaire chez Crédit Agricole SA. Ce qui en fait un marché mature. "