Les forces syriennes ont abattu vingt personnes, avant-hier, et se sont déployées dans la campagne autour de Damas pour tenter de mettre fin à six mois de manifestations contre le régime de Bachar al Assad, ont rapporté des militants. Malgré cette démonstration de force, les militants ont signalé des rassemblements sur le pourtour de Damas, dans la province septentrionale d'Idlib, à la frontière avec la Turquie et dans d'autres régions du pays. Des banderoles appelaient au renversement du régime de Damas. Après avoir mené de sévères opérations de reprise en main de plusieurs foyers urbains le mois dernier, l'armée syrienne s'est mise ces derniers jours à passer les zones rurales au peigne fin, traquant déserteurs et militants, procédant à de multiples arrestations et tuant des dizaines de personnes. La télévision d'Etat a diffusé jeudi soir une interview d'un des déserteurs les plus célèbres du pays, qui est revenu sur les propos qu'il avait tenus au moment de faire défection en juin. Le lieutenant-colonel Hussein Harmouch affirme désormais qu'il n'a jamais reçu ordre de tirer sur des manifestants. On ignore comment l'officier s'est retrouvé à Damas. Le ministère turc des Affaires étrangères dément l'avoir remis aux autorités syriennes, comme l'ont dit certaines rumeurs. La Turquie a fait savoir que des réfugiés syriens continuaient de gagner son territoire en raison d'opérations menées dans le Nord par les forces syriennes. L'armée libanaise a annoncé pour sa part que des troupes syriennes avaient pénétré jeudi soir de 200 mètres en territoire libanais à la recherche de fugitifs. Un Libanais a été blessé dans la fusillade, dit-on de sources libanaises. Conseil national d'opposants D'après des opposants, la plupart des décès, d'avant-hier, ont été recensés dans des zones rurales autour de la ville de Hama et à Djabal al Zaouïa, dans une région proche de la Turquie. Des manifestants ont aussi été tués près de Damas, dont un garçon âgé de 12 ans, et à Homs, 165 km au nord de la capitale. Les Nations unies estiment à 2.600 le nombre d'opposants tués par les forces syriennes depuis le début du soulèvement contre Bachar al Assad en mars dernier, dans la foulée des révolutions tunisienne et égyptienne. L'ONG internationale Avaaz, basée aux Etats-Unis, a annoncé, avant-hier, avoir vérifié l'identité de 3.004 Syriens tués depuis le début des troubles à la mi-mars. "L'armée syrienne a, selon les cas, abattu des hommes, des femmes et des enfants lors de manifestations pacifiques, ou les a torturés, mutilés et assassinés en détention", affirme Avaaz, dont la liste comprend 278 conscrits morts dans des circonstances qui ne sont pas précisées. Les autorités syriennes évoquent un bilan de 1.400 morts, dont 700 soldats et policiers, du fait de bandes armées soutenues par des puissances étrangères. Les médias ont rapporté, qu'un policier avait été tué et que quatre autres avaient été blessés par des "groupes armés" dans la province méridionale de Deraa. La violence de la répression a incité les Occidentaux à imposer des sanctions à la Syrie et à appeler au départ de Bachar al Assad, mais Washington et ses alliés se heurtent au refus de la Russie et de la Chine d'infliger à Damas une réponse concertée au niveau des Nations unies. Aucun pays ne propose d'intervention similaire à celle de l'Otan qui a contribué à la chute du colonel libyen Mouammar Kadhafi. La Ligue arabe et la Turquie ont également appelé à la fin immédiate du bain de sang mais n'ont pas défini précisément ce que le régime syrien pourrait subir comme action punitive. En visite à Tripoli, le Premier ministre turc Recep, Tayyip Erdogan, a estimé que les responsables de la répression subie par le peuple syrien ne pourraient pas rester en place. L'opposition syrienne en exil a présenté jeudi à Istanbul la composition du Conseil national syrien, qui souhaite offrir une solution alternative au gouvernement de Bachar al Assad. La France "développe ses contacts" avec les opposants, a déclaré à Paris le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero.