Le blé a touché cette semaine son plus haut depuis plus d'une décennie sur le marché à terme de Chicago, reflétant ainsi les tensions qui règnent actuellement sur le marché mondial. Le contrat à échéance juillet sur le blé à Chicago, qui tient lieu de référence sur le marché mondial, a de nouveau progressé pour atteindre les 6.30 dollars le boisseau en séance. Du jamais vu depuis plus de dix ans. En deux semaines, les cours ont progressé de 20%. Pourquoi donc une telle envolée des prix D'une part, en raison de la demande croissante en céréales pour nourrir les habitants de la planète, mais aussi en raison du développement des biocarburants qui absorbe, une part croissante de la production. Aujourd'hui, le problème se pose avec acuité dans la mesure où les stocks mondiaux s'épuisent. La Chine est déjà en passe d'interdire le recours aux graines issues des cultures alimentaires pour la fabrication de l'éthanol. Des experts estiment que l'éthanol est " une monumentale connerie". Des pics similaires de prix ont déjà été observés, notamment en 2003, après la sécheresse, mais ils ont rapidement disparu des courbes, tandis que la tension actuelle sur les marchés de céréales est faite pour durer, prédisent la plupart des opérateurs. Autrement dit, la situation risque de se compliquer davantage si la sécheresse persiste dans les pays producteurs. Aujourd'hui, les stocks restants, au niveau mondial correspondent à 45 jours de consommation, un niveau extrêmement faible que le moindre contretemps climatique peut encore affaiblir. Après la défaillance patente de l'Ukraine, une nouvelle sécheresse en Australie où l'on moissonne en novembre, serait une véritable catastrophe. Dans ce schéma de tension persistante sur l'offre, les prix sont devenus anecdotiques. La vraie question qui se pose pour un importateur est de savoir où trouver des disponibilités. Cette question se pose et se posera sûrement pour les gros acheteurs déclarés comme l'Inde, les pays du Maghreb dont l'Algérie ou encore l'Irak. En Afrique du Nord, l'Egypte est l'un des plus gros importateurs au monde de blé avec des volumes de l'ordre de 7 millions de tonnes par an. Cette année, le Maroc est, également, un client très demandeur. Là aussi, la sécheresse a eu des conséquences désastreuses, la récolte n'est que de 2 millions de tonnes contre 9 millions pour la précédente. Notre pays est, également, un gros importateur de blé. L'Algérie, qui importe quasiment tous ses besoins en blé de meunerie, cherche à acheter 50 000 tonnes de blé pour une livraison de juillet à décembre. Autant dire que la facture des importations sera salée d'autant plus que les prix ne font qu'augmenter. Pis encore, le spectre de la pénurie plane sur les pays en développement. Les conséquences seront, en effet, désastreuses sur les pays pauvres. Si certains restaient encore sceptiques sur le fait qu'il faille à très court terme choisir entre manger ou conduire, des rapports édifiants viennent désormais conforter l'hypothèse selon laquelle l'éthanol provoquera la famine dans le monde pauvre. Un risque que la Banque mondiale avait bien perçu dans son dernier rapport sur le financement du développement dans le monde, publié en mai dernier. L'institution pointait du doigt le rôle des biocarburants dans la récente flambée du prix des matières premières: La transformation de la production à destination des biocarburants a réduit significativement les stocks globaux de blé, de riz et de maïs. Ceci pourrait avoir de sérieuses conséquences à court terme pour les populations pauvres dans les pays en développement, où ces produits représentent une large part de la consommation globale. Y a-t-il des solutions ? Pour certains spécialistes " il faut que les Africains protestent et demandent aux Occidentaux d'arrêter de mettre des céréales dans leurs moteurs"