Direct Energie et Poweo vont fusionner cette semaine, un mariage de raison qui donnera naissance au premier fournisseur alternatif de gaz et d'électricité de France, capable de mieux résister à la toute-puissance des opérateurs historiques EDF et GDF Suez. Après avoir obtenu le mois dernier le feu vert du gendarme de la Bourse, l'AMF, le projet de fusion n'attend plus que de recevoir l'onction des actionnaires respectifs des deux sociétés, lors d'assemblées générales convoquées mercredi, pour que le rapprochement devienne effectif. Le nouveau groupe sera coté en lieu et place de Poweo sur Alternext Paris, et renommé Poweo Direct Energie. Cette union avait été annoncée un an plus tôt par Direct Energie, créé en 2003, et son rival Poweo, né il y a tout juste dix ans, dans le but de créer un concurrent plus solide à EDF et GDF Suez. Un projet lancé alors que Poweo, en proie à des difficultés financières, avait dû céder le contrôle de ses activités de production d'électricité à son ex-actionnaire principal, l'opérateur autrichien Verbund. Dans une première étape, Direct Energie a acquis 46% du capital Poweo en septembre, et selon le schéma de fusion, ses actionnaires contrôleront près de 60% du nouvel ensemble. Ce mariage de raison permettra, selon Direct Energie et Poweo, de créer le troisième opérateur d'énergie en France et la première compagnie alternative dans l'énergie, regroupant un million de clients en électricité et en gaz et réalisant un chiffre d'affaires annuel de plus d'un milliard d'euros. Les deux entreprises, toutes deux déficitaires, espèrent ainsi parvenir à une taille critique qui leur permettrait d'absorber leurs coûts fixes (comme les millions de factures à envoyer chaque année aux clients) et de concurrencer plus efficacement les opérateurs historiques. Un million de clients, c'est le début de la taille critique, et l'objectif c'est de changer de dimension pour rentrer dans la phase suivante de l'ouverture du marché, avec plus d'innovation, plus de services et plus de compétitivité, a expliqué dans un entretien le président de Direct Energie, Xavier Caïtucoli. Il y a des économies d'échelles qui vont être mécaniques, en ayant à nous deux un million de clients, on devient un acteur de taille tout à fait différente, plaide-t-il. Poweo Direct Energie espère ainsi doubler sa clientèle d'ici 2016, à 2 millions de foyers. Un objectif ambitieux, tant le marché français de l'énergie, 12 ans après les débuts de la libéralisation et cinq ans après l'ouverture totale à la concurrence, reste dominée par les ex-monopoles EDF et GDF Suez. Ces derniers contrôlent toujours plus de 90% de la fourniture de gaz et d'électricité. Dans cette bataille aux allures de David contre Goliath, la donne s'est un peu rééquilibrée l'an dernier en faveur des concurrents alternatifs, avec l'introduction de l'Arenh, un dispositif qui oblige EDF à revendre un quart de son électricité nucléaire à des concurrents, à un prix régulé. Cependant, le nouveau bras de fer entre le gouvernement et GDF Suez sur les prix du gaz menace de bousculer à nouveau les règles du jeu. Parmi les chantiers du nouveau groupe, il devra mener à bien le projet de construction et d'exploitation d'une centrale à gaz à Landivisiau, dans le Finistère, remporté en début d'année par Direct Energie et qui vise à renforcer l'approvisionnement électrique breton. D'autres opportunités de développement se présenteront peut-être avec la transition énergétique promise par le gouvernement. Direct Energie a déjà fait part de son intérêt pour des concessions de barrages hydrauliques dont la mise en concurrence, promise par l'ancienne majorité, est attendue tôt ou tard. Enfin, Direct Energie aura une décision importante à prendre dans les douze mois qui viennent: exercer ou pas une option expirant mi-2013, et qui lui donne le droit de racheter à Verbund les ex-actifs de production d'électricité de Poweo.