Les grèves devraient avoir un effet négatif mais seulement à court terme sur les investisseurs intéressés par l'Afrique du Sud, qui devrait surtout s'attacher à atteindre 5% de croissance, estime le chef économiste de la Banque africaine de développement (BAD). Le gouvernement "a besoin de stratégies pour que l'Afrique du Sud atteigne 5% de croissance et, pour moi, c'est plus ça le problème", a expliqué Mthuli Ncube, dans un entretien. L'activité économique en Afrique du Sud, quoique plus soutenue que dans beaucoup de pays développés, plafonne autour de 3%. Elle pourrait tomber à 2,6% cette année selon le Fonds monétaire international (FMI). "Ce qui me soucie, c'est la capacité de cette croissance à créer des emplois, il est très important de profiter du facteur démographique", ajoute M. Ncube, en soulignant qu'une grande partie des Sud-Africains est en âge de travailler. Moody's a jeté un pavé dans la marre en baissant récemment d'un cran la note de l'Afrique du Sud de A3 à Baa1. L'agence de notation a notamment pointé un affaiblissement institutionnel face aux tensions socio-économiques croissantes. Une analyse que M. Ncube ne partage pas: "Je ne suis pas inquiet par la situation politique, l'Afrique du Sud a de très solides institutions démocratiques, je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de souci à se faire de ce côté là". De son point de vue, le vrai point faible tient à la situation économique et à la capacité de l'Afrique du Sud à absorber les chocs mondiaux. "Le ralentissement de la Chine, en tête des importations de matières premières en Afrique, est un risque", selon lui, tout comme la crise en Europe, qui affecte le tourisme sud-africain. Il faut remonter à avant la crise mondiale pour trouver un trimestre de croissance à 5% en Afrique du Sud. La reprise observée depuis 2010, essentiellement grâce à la consommation intérieure, ne parvient pas à réduire le chômage, officiellement autour de 25% de la population active et qui atteint 40% selon des estimations officieuses. "Tout ce qui se passe, les grèves, cela va certainement affecter l'investissement, particulièrement à court terme" et "les investisseurs vont chercher à savoir comment les conflits du travail seront résolus", dit-il, "mais en même temps, on investit là où il y a des ressources naturelles", a-t-il tempéré. La clé, selon lui, "est le dialogue avec le secteur privé, car c'est le plus à même de créer des emplois et des entreprises capables d'en générer d'autres".