Lors des entretiens tenus jeudi entre les présidents russe et chinois, Vladimir Poutine et Hu Jintao, une attention particulière a été réservée à l'élargissement de la coopération dans le nucléaire civil, dans le secteur énergétique dans son ensemble et à la construction d'un système d'oléoducs allant vers le Pacifique, aux perspectives des fournitures de pétrole russe à la Chine. Il convient de dire que les deux pays considèrent la coopération dans le domaine énergétique comme un des volets les plus importants du partenariat stratégique bilatéral. C'est ainsi que, pour développer le commerce bilatéral, Hu Jintao a conseillé aux 2 pays d'accélérer les négociations concernant la construction d'un pipeline pour transporter le pétrole brut et le gaz naturel et d'accroître les investissements. Cherchant à réduire sa dépendance au pétrole et surtout au charbon (75 % de sa production d'électricité), la Chine lorgne, depuis quelques années, les réserves russes de gaz naturel et pousse deux projets de gazoducs en provenance de Russie. Un premier la relierait aux champs de la Sibérie orientale, un autre aux réserves de la Sibérie occidentale. Les deux pays soutiennent théoriquement ces pipelines. La Russie y voit une occasion de diversifier ses marchés. La Chine a d'énormes besoins. Mais leur accord achoppe sur des questions financières. La Chine est un grand utilisateur de charbon, dont elle a d'amples réserves. Elle est conduite à en limiter l'emploi en raison de la pollution qu'il occasionne. Elle est ainsi devenue un gros consommateur de pétrole. Simultanément, le pays est en voie de doubler le nombre des terminaux d'importation de gaz naturel et de construire de nouvelles centrales nucléaires pour aider à la solution de ses problèmes d'approvisionnement en énergie qui, à terme, pourraient freiner sa croissance. La Russie, de son côté, joue pleinement la carte du développement de ses ressources naturelles et de la commercialisation, hors de ses frontières, de leur production. Cette relative complémentarité n'est, cependant, pas à l'abri de fortes compétitions. Les Etats-Unis, l'Union européenne (UE), le Japon sont eux-mêmes fortement demandeurs du pétrole, si ce n'est du gaz naturel russe. La Russie est elle-même désireuse de développer ses relations commerciales avec le monde occidental et l'empire nippon. Son retour au premier plan de la scène mondiale dépend prioritairement de la qualité de son partenariat avec eux. Les besoins gaziers et pétroliers de la Chine en font un marché d'autant plus intéressant pour la Russie que les réformes de libéralisation, notamment sur le marché gazier européen, augmentent les pressions concurrentielles. L'Union européenne a de tout temps constitué le marché d'exportation privilégié (et unique) de l'Union soviétique et aujourd'hui de la Russie. Aujourd'hui, les stratégies de ces pays sont en train d'évoluer face aux contraintes induites par la libéralisation du marché gazier de l'UE notamment pour la Russie. La volonté désormais clairement affichée de Gazprom de définir une stratégie "d'exportation globale" (vers l'Asie mais aussi les Etats-Unis) est en la manifestation concrète. La Chine, face à la croissance de sa dépendance énergétique, tend de plus en plus à s'affirmer comme un acteur essentiel et actif du marché des hydrocarbures. Ses compagnies pétrolières sont incontestablement un outil au service de cette politique. Leur stratégie d'internationalisation et leur tentative d'accéder directement aux ressources en hydrocarbures russes démontrent l'importance que revêt aux yeux du gouvernement chinois la Russie. Sur le long terme, les immenses réserves gazières et pétrolières sont l'atout majeur de la Russie.