Un homme soupçonné d'avoir tué l'opposant tunisien Chokri Belaïd et son complice présumé ont été arrêtés, avant-hier, selon des sources policières qui ont décrit les deux hommes comme appartenant à la mouvance salafiste. Le tueur présumé était un artisan de 31 ans spécialisé dans les meubles en aluminium et a été arrêté à Carthage, dans la banlieue de Tunis, selon ces sources. Le deuxième homme est soupçonné d'être le motard qui a permis la fuite du tireur le matin du 6 février après que Chokri Belaïd a été abattu à bout portant en bas de son domicile à Tunis. Les deux sources interrogées ont indiqué que les deux suspects appartenaient à la mouvance radicale salafiste et que leur arrestation avait été facilitée par le témoignage d'une femme, témoin des faits, qui a été placée sous protection policière. L'un de ces sources a précisé que le tueur était actif dans la Ligue de protection de la révolution (LPR, une milice brutale pro-islamiste) du Kram, une banlieue populaire de Tunis voisine de Carthage. Plusieurs médias en ligne tunisiens ont indiqué que deux militants salafistes présumés avaient été arrêtés pour le meurtre de l'opposant. La LPR a été accusée à de nombreuses reprises par l'opposition d'orchestrer des attaques contre des opposants ou des associations pour les intimider. Ses militants sont ainsi soupçonnés du lynchage à mort d'un représentant d'un parti d'opposition à Tatoutine (sud) à l'automne 2012 ainsi que de l'attaque qui a visé le siège du syndicat UGTT en décembre. L'assassinat de l'opposant anti-islamiste Chokri Belaïd a plongé la Tunisie dans une crise politique sans précédent depuis la révolution de 2011, précipitant la démission du Premier ministre Hamadi Jebali. La famille du défunt a accusé Ennahda, le parti islamiste au pouvoir d'être responsable du meurtre, ce que ce mouvement dément. Le ministre tunisien de l'Intérieur, qui a été chargé la semaine dernière de former un nouveau gouvernement, Ali Larayedh, avait annoncé jeudi l'arrestation de suspects, tout en précisant alors que l'enquête n'avait pas permis l'identification du tueur, des commanditaires et des mobiles. L'ancien Premier ministre Ghannouchi témoigne contre Ben Ali Sur un autre sujet, l'ex-Premier ministre tunisien Mohamed Ghannouchi a assuré lundi devant la justice militaire que les décisions liées à la sécurité durant la révolution dépendaient du président déchu Zine El Abidine Ben Ali. M. Ghannouchi comparaissait en tant que témoin devant le tribunal militaire de Sfax (sud), qui juge M. Ben Ali et d'autres hauts responsables du régime poursuivis pour meurtre, une accusation passible de la peine de mort. "Ben Ali prenait toutes les décisions et je n'avais aucune autorité sur les décisions sécuritaires", a dit le dernier chef de gouvernement du président déchu au juge Mohamed Faouzi Masmoudi. Il a aussi assuré n'avoir eu que trois entretiens avec M. Ben Ali, qui avaient porté essentiellement sur le développement économique, entre les 12 et 14 janvier, les trois derniers jours avant la fuite du président pour l'Arabie Saoudite après 23 ans de règne sans partage. Les ex-dirigeants tunisiens sont poursuivis pour la mort d'Omar Haddad, tué lors d'une manifestation à Sfax le 12 janvier 2011. Outre M. Ben Ali qui est jugé par contumace, les accusés sont l'ancien ministre de l'Intérieur Rafik Belhaj Kacem, l'ex-directeur de la sécurité présidentielle Ali Seriati ainsi que deux lieutenants de la police, tous présents à l'audience lundi. Mohamed Ghannouchi, qui a dirigé le premier gouvernement post-révolutionnaire, a toujours assuré n'avoir jamais eu la charge des questions de sécurité, des domaines réservés selon lui au ministère de l'Intérieur et à la présidence.