Les ministres des Finances de la zone euro se réuniront ce soir à Bruxelles afin de trouver une solution à la crise à Chypre menacée de banqueroute, a-t-on appris avant-hier soir, de sources européennes. Parallèlement, et signe de la gravité de la crise, les dirigeants de l'Union européenne ont annoncé que le sommet UE-Japon prévu en début de semaine prochaine était reporté à une date non précisée. L'Eurogroupe d'aujourd'hui, qui débutera à 16H00 GMT, sera une réunion avec la présence physique des ministres, a dit une des sources. La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, participera à cette réunion des ministres des Finances de la zone euro consacrée à la crise chypriote, a-t-on appris avant-hier auprès de l'institution. Nous pouvons confirmer que la directrice générale participera à la réunion d'aujourd'hui, a indiqué dans un courriel une porte-parole du FMI. Cette nouvelle réunion des ministres des Finances de la zone euro a été annoncée alors que le Parlement chypriote, réuni en session extraordinaire, débattait des premières des huit lois liées au plan de sauvetage que Nicosie doit conclure avant demain avec ses partenaires européens et le FMI pour éviter la faillite et une sortie de l'euro. Nous sommes à un moment très critique. Nous devons éviter cela, a souligné une source européenne, ajoutant que ce sera un week-end dont on se souviendra. Dès l'ouverture de la session, les députés chypriotes ont approuvé un texte créant un fonds de solidarité et un autre limitant les mouvements de capitaux pour éviter une trop forte pression sur les banques à leur réouverture, prévue mardi. Ils ont ensuite adopté le plan de restructuration des banques. Chypre doit trouver 7 milliards d'euros, condition au déblocage par la troïka d'une aide de 10 milliards, sans quoi la BCE a d'ores et déjà prévenu qu'elle couperait l'apport de liquidités d'urgence aux banques non solvables, les condamnant de facto à la faillite. Le Plan B que les responsables chypriotes tentent d'élaborer envisage une taxe de 15% sur les dépôts bancaires supérieurs à 100 000 euros, selon la télévision publique chypriote. C'est dans ce contexte que les présidents du Conseil européen, Herman Van Rompuy, et de la Commission européenne, José Manuel Barroso, ont décidé le report du sommet UE-Japon, qui devait lancer d'importantes négociations pour un accord de libre-échange. Nous avons décidé avec regret de reporter le sommet UE-Japon prévu la semaine prochaine, ont-ils annoncé dans un communiqué commun. Les efforts actuels pour trouver une solution à la situation financière de Chypre requièrent notre présence à Bruxelles, ont-ils ajouté en réitérant l'importance des relations stratégiques UE-Japon. Le commissaire européen au Commerce, Karel De Gucht, maintiendra sa venue à Tokyo prévue demain. M. Barroso a aussi reporté une visite prévue hier en Mongolie.De source européenne, on a souligné que MM. Van Rompuy et Barroso suivaient la crise de très près, multipliant les conversations téléphoniques avec les gouvernements et les institutions et prêts à s'impliquer encore davantage si les négociations bloquent. Le Parlement chypriote adopte le plan de restructuration des banques Le Parlement chypriote, réuni en session extraordinaire, a adopté avant-hier soir une loi sur la restructuration du système bancaire, dans le cadre du plan de sauvetage que Nicosie doit conclure avant demain avec ses partenaires européens pour éviter la banqueroute. Les députés ont ensuite levé la séance peu avant minuit (22H00 GMT), sans fixer de date ou d'heure pour l'examen de cinq autres textes liés à ce plan, dont le plus controversé doit établir une taxe exceptionnelle, qui pourrait s'élever à 15% selon la télévision publique, sur les dépôts bancaires à partir de 100 000 euros. La loi sur la restructuration des banques, la plus disputée des trois votées avant-hier soir, a été adoptée par 26 voix pour, deux contre et 25 abstentions. Auparavant, les députés ont approuvé un texte créant un fonds de solidarité et un autre limitant les mouvements de capitaux pour éviter une trop forte pression sur les banques à leur réouverture, prévue mardi. Ces mesures font partie d'un Plan B que le gouvernement peine à mettre en place après le rejet mardi par le Parlement d'un accord avec les bailleurs de fonds internationaux prévoyant une taxe exceptionnelle allant jusqu'à 9,9% sur tous les dépôts bancaires en contrepartie d'une aide de 10 milliards d'euros. Chypre doit trouver d'ici demain 7 milliards d'euros (plus du tiers de son PIB annuel), pour débloquer l'aide internationale et obtenir que la Banque centrale européenne (BCE) continue de fournir des liquidités d'urgence aux banques chypriotes. Le texte sur la restructuration des banques avait été présenté par la Banque centrale chypriote dans le but de séparer des bonnes dettes des mauvaises au sein des banques menacées, en particulier de la Popular Bank (Laiki en grec), deuxième banque commerciale du pays. Averof Neophytou, chef en exercice de Disy, le parti du président Nicos Anastasiades, a assuré que ce texte permettait de garantir tous les dépôts à hauteur de 100 000 euros, même si ceux dépassant ce montant pourraient devoir attendre des années avant de récupérer tout leur argent. Il a également assuré que la restructuration ne supprimerait que quelques centaines de postes et garantirait le maintien de quelque 8 000 emplois à la Popular Bank. Moody's abaisse la note de trois grandes banques L'agence de notation financière Moody's a abaissé la note de trois grandes banques chypriotes et d'une banque du groupe russe VTB, invoquant des risques de nouveaux contrôles des dépôts lors de leur réouverture et de pertes pour les épargnants. Moody's a abaissé de Caa2 à Caa3 les notes des dépôts et de la dette à long terme des banques Bank of Cyprus, Cyprus Popular Bank et Hellenic Bank et envisage de les abaisser à nouveau, a annoncé l'agence de notation dans un communiqué. Ces notes ont également été mises sous surveillance en vue d'un possible abaissement, déclare l'agence de notation. Une mise sous surveillance négative signifie que l'agence peut réduire ces notes dans un délai relativement court. Moody's dit s'attendre à des pertes pour les détenteurs de comptes, et justifie également son geste par un risque de nouveaux contrôles sur les dépôts une fois que les banques rouvriront ainsi qu'une incertitude aggravée concernant les plans de recapitalisation des banques.L'agence de notation estime que le risque de pertes importantes s'est considérablement accru, de même que celui de scénarios de liquidations de banques.Moody's a également abaissé la note des dépôts de Russian Commercial Bank (Cyprus) de Caa1 à Caa2 et l'a placée sous surveillance négative.L'abaissement de la note est dû aux anticipations de pertes pour les détenteurs de comptes tandis que la révision est motivée par l'incertitude qui entoure les mesures que les autorités chypriotes adopteront à terme pour faire face à la crise bancaire, précise Moody's.Les notes Caa sont attribuées à des émetteurs de qualité médiocre, présentant un vrai risque de non-remboursement.Pour déterminer si elle abaissera encore les notes de ces banques, Moody's évaluera les mesures adoptées contre la crise bancaire. L'agence se concentrera sur l'ampleur des pertes imposées aux épargnants et/ou les détenteurs d'obligations, le risque de nouveaux contrôles lorsque les banques rouvriront. Elle tiendra aussi compte des risques associés à toute mesure décidée et du besoin potentiel d'apports supplémentaires en capitaux résultant d'une détérioration accrue de la qualité des actifs, précise l'agence. Mardi, l'agence de notation Fitch Ratings avait menacé d'abaisser les notes de trois banques chypriotes, en raison des risques liés au projet de taxer les dépôts bancaires dans le pays.L'agence a placé sous surveillance négative les notes de Bank of Cyprus, Cyprus Popular Bank et Hellenic Bank, toutes trois actuellement à B, c'est-à-dire en catégorie spéculative.La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé qu'elle n'apporterait plus de liquidités d'urgences aux banques chypriotes non solvables à partir de demain faute d'un accord acceptable sur le sauvetage de l'île, les condamnant de facto à la faillite. Les chypriotes en colère Des manifestants chypriotes, notamment des employés de banque inquiets du sort de leur employeur, se sont rassemblés devant le Parlement à Nicosie, au moment où le pays négocie toujours les termes d'un plan de sauvetage crucial pour son économie. Une trentaine de jeunes au visage cagoulé ont brûlé un drapeau européen près du Parlement, devant les barricades de la police. La taxe c'est du vol, la crise devrait être résolue par une ploutocratie, ont-ils scandé. Ils réagissaient à des informations faisant état d'une possible taxe sur les dépôts bancaires allant jusqu'à 15%, prévue dans le cadre d'un plan de sauvetage européen qui doit permettre aux banques du pays d'éviter la faillite. Le chef du parti au pouvoir Disy, Averof Neophytou, a affirmé qu'il était encore possible d'espérer un accord. Nous pensons que dans les prochaines heures nous serons capables, avec beaucoup de difficulté, d'atteindre une formule répondant aux critères de l'UE, de la BCE et du FMI, a-t-il indiqué à des journalistes. Nous prenons part aux négociations les plus cruciales de notre histoire. Il y aura un coût à payer par tout le monde, mais nous aurons un nouveau départ, a indiqué de son côté le porte-parole du gouvernement Christos Stylianides, à la chaîne de télévision privée Sigma. On ignorait si la nouvelle formule qui doit être présentée à la Troïka allait passer devant le Parlement. Et alors que cette session, initialement prévue dans la matinée, n'avait toujours pas eu lieu dans la soirée, le président chypriote Nicos Anastasiades, a utilisé son compte Twitter pour prévenir ses compatriotes de décisions difficiles à venir. Le Parlement va bientôt être invité à adopter des décisions difficiles. Certains aspects seront douloureux, mais il faut sauver le pays, a-t-il indiqué dans un tweet.