Le chômage continue son reflux aux Etats-Unis, mais les chiffres officiels publiés avant-hier à Washington montrent que l'emploi a baissé également en mars. Le taux de chômage américain a reculé de 0,1 point par rapport à février, pour s'établir à 7,6% en mars, son niveau le plus faible depuis décembre 2008, indique le rapport mensuel du gouvernement sur la situation de l'emploi aux Etats-Unis. Ce résultat est meilleur que le pensaient les analystes, dont la prévision médiane donnait une stabilité du taux de chômage en mars, mais en apparence seulement. Selon les chiffres officiels en effet, le solde net des créations d'emplois du pays a été divisé par trois en mars par rapport à février, à 88 000 nouveaux postes, en données corrigées des variations saisonnières. C'est son niveau le plus faible depuis juin 2012, et il s'avère nettement inférieur à la prévision médiane des analystes qui donnait 192 000 embauches nettes en mars. Selon les chiffres officiels, le chômage a reculé pour une mauvaise raison en mars: la baisse de la population active. Au bout du compte, le nombre de personnes sans emploi a baissé, mais reste encore très élevé, à 11,7 millions de chômeurs, et le nombre de personnes ayant un emploi a reculé également. Evoluant à des niveaux très faibles depuis la crise, le taux d'emploi, est retombé en mars à son plus bas depuis le mois d'août. 200 000 personnes ont cessé de chercher un emploi Le taux d'activité, mesure du nombre de personnes employées ou cherchant activement du travail par rapport à l'ensemble de la population en âge de travailler, a cédé 0,2 point par rapport à février pour s'établir à 63,3%, son niveau le plus faible depuis 1979, indique le gouvernement. Le fait que ce ratio continue de baisser est un signe des difficultés auxquelles la reprise de l'emploi se heurte. L'amélioration de la conjoncture est encore bien trop lente pour pousser nombre de chômeurs exclus des statistiques officielles à se remettre en quête de travail et à réintégrer ainsi la population active. En données brutes, c'est même l'inverse qui s'est produit en mars: près de 200 000 personnes ont cessé de chercher du travail. Le président de la banque centrale américaine, Ben Bernanke, avait averti le 20 mars que la rigueur budgétaire à laquelle l'Amérique s'astreint depuis janvier (hausse des impôts), et plus encore depuis le début du mois (baisse drastique et progressive des dépenses publiques) devrait tôt ou tard se faire sentir durement sur "la croissance économique et les créations d'emplois". Au vu des chiffres publiés avant-hier, il semble que le ralentissement attendu soit déjà à l'œuvre, et plusieurs économistes craignent la répétition du scénario de 2012 où une hausse du PIB relativement robuste dans les premiers mois de l'année avait cédé le pas à une croissance molle au printemps. Pour Steven Ricchiuto, de Mizuho Securities, les données du ministère "laissent penser que le marché du travail ne va pas contribuer à placer l'économie sur la voie de l'autosuffisance", ce qui devrait inciter la Fed à confirmer le 1er mai, à l'issue de sa prochaine réunion de politique monétaire, le soutien exceptionnel qu'elle apporte à la reprise. Son confrère Jim O'Sullivan, du cabinet HFE, appelle néanmoins à ne pas tirer de conclusions hâtives à la seule lecture des chiffres de mars. Pour lui, il n'est pas certain que l'on soit face à une "rétrogradation fondamentale" de l'économie: la faiblesse de l'emploi en mars pourrait être le "contrecoup" statistique de chiffre exagérément bons pour les deux mois précédents.
Recul du déficit commercial sur fond de baisse des importations de brut Le déficit commercial des Etats-Unis a enregistré une baisse-surprise en février sous l'effet notamment d'une baisse des importations pétrolières, selon des chiffres publiés avant-hier à Washington par le département du Commerce. Le solde, chroniquement déficitaire, des échanges de biens et de services du pays avec le reste du monde s'est établi ce mois-là à 43,0 milliards de dollars, en données corrigées des variations saisonnières, soit 3,4% de moins que le mois précédent, indique le ministère. Ce recul, après la forte poussée de janvier (+16,7%), a surpris les analystes dont la prévision médiane tablait sur une légère aggravation du déficit, à 44,7 milliards de dollars. Il tient avant tout à une bonne tenue des exportations américaines qui ont progressé de 0,8% en février, à 186,0 milliards, portées notamment par les biens d'équipements industriels (+4,5%) et, dans une moindre mesure, par les ventes de voitures américaines à l'étranger (+1,6%). Dans le même temps, les importations se sont maintenues à un niveau élevé en février (228,9 milliards de dollars) mais stable par rapport au mois précédent. Les achats de pétrole brut à l'étranger, qui représentent plus de 10% du total des biens importés par les Etats-Unis, ont reculé de 5,6%, à 23,6 milliards de dollars. Le nombre de barils de brut importés par les Etats-Unis a atteint en février (205 millions) son plus bas niveau depuis mars 1996, précise le ministère. "La forte production d'hydrocarbures aux Etats-Unis a permis de compenser (le faible niveau des importations, ndlr) et de conduire à une réduction du déficit", note Mei Li, analyste chez FTN Financial. Cette baisse a été toutefois compensée par celle des importations de voitures qui ont bondi de 4,6% entre janvier et février pour atteindre 24,8 milliards. Sur un an, le déficit commercial de la première puissance économique mondiale a reculé de 3,5%. En termes géographiques, le déficit commercial sur les biens s'est, (fait rarissime)nettement réduit avec la Chine en février. Selon des données non-corrigées des variations saisonnières, il a fondu de 15,8% pour atteindre 23,4 milliards de dollars son plus faible niveau depuis mars 2012. Les importations en provenance de Chine ont baissé de 11,8% pour atteindre, elles aussi, un plus bas depuis mars, souligne le ministère. Depuis plusieurs années, l'administration Obama cherche à réduire les déséquilibres commerciaux avec Pékin, accusé par Washington de pratiques déloyales et de sous-évaluer sa monnaie pour doper ses exportations. Le déficit américain s'est en revanche légèrement creusé en février avec l'Union européenne, augmentant de 1,2%, à 8,7 milliards de dollars. L'Europe fait peser un "risque" sur l'économie mondiale L'Union européenne (UE) continue de faire peser un "risque" sur les perspectives économiques mondiales comme l'a rappelé le cas de Chypre, a affirmé avant-hier un haut responsable du Trésor américain. "Le risque d'instabilité financière en Europe reste un risque pour notre reprise et pour les perspectives économiques mondiales", a déclaré sous couvert de l'anonymat ce responsable alors que le secrétaire américain au Trésor, Jacob Lew, entame lundi une tournée dans l'UE. "Les événements récents à Chypre (sauvée de la faillite par un plan d'aide international) nous rappellent que l'Europe se fraye un difficile chemin vers la réforme budgétaire et financière", a ajouté ce haut responsable, estimant que Chypre, plombée par son secteur financier, était une situation "unique". Le responsable américain a toutefois souligné l'important poids économique de "nombreuses banques" européennes et appelé les autorités à "avancer" vers un mécanisme institutionnel de "recapitalisation" et de "restructuration" afin de se doter d'un "filet de sécurité commun". Ce responsable a également jugé qu'un rééquilibrage au sein de l'Union européenne était "vital" pour doper la demande et éviter "un épuisement lié à l'austérité". Selon cet officiel, les économies européennes qui disposent d'un surplus budgétaire doivent ainsi "davantage contribuer" à renforcer la demande afin de faciliter l'assainissement des finances publiques dans les pays de "la périphérie" de la zone euro. Lors de son voyage en Europe demain et après-demain, M. Lew rencontrera notamment le président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi, et le ministre français de l'Economie Pierre Moscovici. La Fed pourrait diminuer ses rachats de titres cet été La banque centrale américaine (Fed) pourrait diminuer ses rachats de titres sur les marchés d'ici à cet été, a estimé mercredi un de ses dirigeants, John Williams. "Je prévois que les conditions d'une amélioration nette de la perspective du marché du travail seront remplies d'ici à cet été. Si cela se produit, nous pourrons alors commencer à diminuer nos rachats", a déclaré M. Williams dans un discours, selon le texte de cette allocution transmis à la presse. Si tout se passe comme je l'espère, nous pourrions mettre fin au programme de rachats avant la fin de l'année", a-t-il ajouté. Depuis décembre, la Fed indique qu'elle maintiendra son taux directeur dans la fourchette de 0 à 0,25% qui lui est assignée depuis décembre 2008 "au moins tant que le taux de chômage restera au-dessus de 6,5%", si cela ne remet pas en cause son objectif d'inflation à moyen terme (2,0% sur un an). En plus de maintenir son taux directeur au plancher, la Fed injecte depuis le début de l'année des liquidités dans le circuit financier, au rythme de 85 milliards de dollars nets par mois, par le biais d'opérations de rachats de titres sur les marchés financiers, afin de maintenir une pression maximale sur l'ensemble des taux d'intérêt, du plus court au plus long terme. La banque centrale a rappelé le 20 mars qu'elle avait l'intention de poursuivre ces rachats "jusqu'à ce que la perspective du marché du travail se soit nettement améliorée dans un environnement de prix stables". La Réserve fédérale a pour mission d'assurer la stabilité des prix et le plein emploi, lequel correspond selon elle à un taux de chômage compris entre 5,2 et 6,0%, contre 7,7% à l'heure actuelle. Pour M. Williams, le plein emploi correspondrait à un taux de chômage de 5,5%, ce qui ne devrait pas être atteint avant 2016.