La zone euro a avalisé, avant-hier, les modalités du plan de sauvetage pour Chypre, qui va devoir faire des efforts beaucoup plus importants que prévu, alors que l'Europe ne veut pas aller au-delà d'une aide de 10 milliards d'euros. Au terme d'une réunion à Dublin, les ministres des Finances des 17 ont donné leur accord au plan d'aide chypriote, "qui est conforme aux paramètres et aux objectifs clés définis" fin mars, a affirmé leur chef de file, Jeroen Dijsselbloem, lors d'une conférence de presse. Après ce feu vert politique, plusieurs Parlements nationaux doivent encore se prononcer, dont le Bundestag allemand, ce qui devrait être fait d'ici la fin du mois. Nicosie pourra ensuite recevoir un premier versement courant mai. Alors que la situation économique du pays s'est dégradée en quelques semaines, l'île devra payer un tribut plus important que prévu en échange du prêt de 10 milliards d'euros promis par ses bailleurs de fonds (UE et FMI). Chypre, qui est représentée à Dublin par son nouveau ministre des Finances Haris Georgiades, devra au final trouver 13 milliards d'euros, soit 6 milliards de plus que prévu initialement. Taxe sur les dépôts L'essentiel de cette somme proviendra de la restructuration du secteur bancaire, qui comprend une ponction sur les créanciers, y compris les déposants au-dessus de 100 000 euros. Cette mesure inédite rapportera 10,6 milliards d'euros au lieu des 5,8 milliards annoncés au départ. Elle a suscité la controverse car c'est la première fois que certains déposants sont mis à contribution dans le cadre d'un plan de sauvetage de la zone euro. Les autorités chypriotes doivent mettre en œuvre des privatisations pour au moins un milliard d'euros. Il est également prévu des augmentations d'impôts pour 600 millions d'euros et la vente e réserves d'or excédentaires pour 400 millions. "Chypre va sans aucun doute connaître des temps difficiles", a reconnu M. Dijsselbloem. Le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn a même évoqué un possible recul de 15% du PIB chypriote en 2013 et 2014. "Dans les circonstances, il y a des incertitudes sur les chiffres précis", a-t-il indiqué. Dans un document de travail, la troïka tablait sur une contraction d'environ 12,5%. Face à ce sombre tableau, la Commission européenne a promis de soutenir Chypre, dont le président Nicos Anastasiades a demandé, avant-hier matin, une "aide supplémentaire" de la part des Européens. Des propos qui ont créé "un énorme malentendu", selon une source européenne, certains observateurs pensant que le pays sollicitait un prêt plus élevé à ses créanciers. Au final, il ne s'agit pas d'argent frais supplémentaire mais d'un soutien accru de la "task force" de la Commission à Chypre, pour mieux utiliser les fonds structurels, a précisé un diplomate chypriote. Le montant du plan de sauvetage international (UE et FMI) à Chypre, décidé à 10 milliards d'euros, ne bougera pas d'un iota, ont assuré en cœur le gouvernement allemand et la Commission européenne. Neuf milliards d'euros devraient provenir du fonds de secours de la zone euro et un milliard du FMI. Prêts allongés pour Lisbonne et Dublin Outre le dossier chypriote, les ministres des Finances de la zone euro ont décidé d'allonger de sept ans les prêts accordés au Portugal et l'Irlande, dans le cadre de leur programme d'aide respectif. Une décision qui devait être confirmée dans l'après-midi au niveau des 27. "Les ministres de l'Eurogroupe souhaitent prendre une décision définitive et positive" sur cette extension après la réunion dans l'après-midi à Dublin avec leurs homologues des 10 pays européens ne faisant pas partie de la zone euro, a-t-il déclaré au cours d'une conférence de presse. Le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, a salué l'accord de l'Eurogroupe, jugeant qu'il s'agissait "d'une nouvelle étape vers un retour complet au financement par les marchés" pour ces deux pays sous-programme d'aide. L'Irlande a reçu 85 milliards d'euros de l'Union européenne et du Fonds monétaire international après avoir conclu un plan d'aide international en novembre 2010. Cette année-là, le déficit public de ce pays a atteint 32% du PIB, un naufrage consécutif à la bulle immobilière de 2008 qui a dévasté son secteur bancaire. Le Portugal a reçu 78 milliards après avoir conclu avec l'UE et le FMI un plan de rigueur et de réformes en mai 2011 afin d'assainir ses finances publiques et de relancer l'économie. L'extension de sept ans de la maturité moyenne de leurs prêts signifie que l'Irlande aura à peu près terminé de rembourser vers 2030 et le Portugal vers 2033. En échange de l'aide reçue, les deux pays s'étaient engagés à mettre en œuvre d'importantes réformes structurelles. M. Dijsselbloem s'est dit "rassuré par les autorités portugaises" sur le fait que les ajustements budgétaires demandés seraient effectués, malgré le rejet par la cour constitutionnelle du pays de certaines mesures d'économie. "Je m'attends à ce que les autorités, en consultation avec la troïka" des créanciers, "finalisent ces progrès dans les prochaines semaines", a-t-il dit.