Le conflit a atteint un nouveau degré dans la brutalité, a affirmé, hier, à Genève la commission d'enquête de l'ONU sur la Syrie. Crimes de guerre et crimes contre l'humanité sont perpétrés quotidiennement par les forces gouvernementales et, avec une moindre intensité, par les rebelles. "Nous appelons tous les Etats ayant une influence sur les belligérants à remplir leur obligation de protéger les civils", a déclaré le président de la commission d'enquête Paulo Pinheiro devant la presse, puis le Conseil des droits de l'homme. Il a insisté sur le fait qu'il n'y a pas de solution militaire au conflit. "Personne ne pourra gagner cette guerre. Donner davantage d'armes contribuerait seulement à créer encore plus de souffrances", a averti le président de la commission. "Le dialogue est la seule issue à ce conflit", a-t-il affirmé. Le rapport documente 17 massacres portant sur la période du 15 janvier au 15 mai. Il est basé sur 430 interviews, la commission n'ayant toujours pas accès au territoire syrien.
Armes chimiques Le rapport documente pour la première fois l'utilisation d'armes chimiques. Selon la commission, il y a des raisons suffisantes de croire que ces armes ont été utilisées par les deux parties, mais surtout par les forces gouvernementales. Des analyses supplémentaires sont nécessaires. L'usage d'agents chimiques dans au moins quatre occasions en Syrie en mars et avril est dénoncé, hier, par la Commission d'enquête de l'ONU sur la Syrie, dans son dernier rapport devant le Conseil des droits de l'Homme. Mais pour la célèbre magistrate suisse Carla del Ponte, membre de la Commission d'enquête, il ne faut pas faire de ces épisodes une histoire plus grande que ce qu'elle est en comparaison avec le nombre global de victimes du conflit. Poursuite des combats alors que l'opposition est affaiblie L'armée syrienne a continué d'attaquer les rebelles sur plusieurs fronts, notamment pour s'emparer de Qousseir, où les forces loyalistes mènent une offensive conjointe avec le Hezbollah libanais. Pendant ce temps, la Coalition de l'opposition a été ébranlée par le retrait d'une importante composante. L'armée syrienne, parfois appuyée par le Hezbollah, a mené une offensive dans trois secteurs. L'aviation a bombardé Qousseir où les rebelles sont désormais retranchés dans le nord de la ville, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a fait savoir lundi qu'il attendait toujours une réponse officielle de la Syrie à sa demande d'accès urgent à la localité de Qousseir. Quelque 1500 blessés y sont pris au piège des combats, d'après des organisations humanitaires. L'offensive se poursuit aussi dans le nord de la province de Hama (centre), où l'armée régulière s'est emparée de 13 villages. Elle est également intervenue au nord d'Alep (nord) pour desserrer l'encerclement de deux villages chiites, selon l'OSDH. Dans cette même région, vingt-six personnes ont été tuées dans la chute d'un missile, a affirmé cette même ONG proche des rebelles et dont les informations ne peuvent être vérifiées de source indépendante. La quasi-totalité de la campagne autour d'Alep est aux mains de la rébellion. Répercussions au Liban La conflit syrien continue également d'avoir des répercussions au Liban voisin. Trois hommes et une femme ont été tués en moins de 24 heures à Tripoli, lors de la reprise d'affrontements entre sunnites et alaouites. Sur le front diplomatique, la Coalition de l'opposition est ébranlée par le retrait d'une importante composante de la rébellion. Cette dernière a accusé certains dirigeants de la Coalition d'être animés par des ambitions personnelles et d'avoir utilisé l'argent à leur profit. Washington va déployer des missiles Patriot et des F-16 en Jordanie Les Etats-Unis vont déployer des missiles Patriot et des avions de combat F-16 en Jordanie, pays frontalier de la Syrie, pour des manoeuvres militaires, après lesquelles certains de ces équipements pourraient rester sur place, ont annoncé la veille des responsables américains. Les lanceurs de missiles Patriot et les avions F-16 ont été autorisés à être déployés en Jordanie pour l'exercice dénommé Eager Lion, a indiqué le porte-parole du CentCom (commandement central) américain, le lieutenant-colonel T.G. Taylor dans un communiqué. Pour renforcer la capacité et la position défensive de la Jordanie, certains de ces équipements pourraient rester sur place au-delà de l'exercice, à la demande du gouvernement jordanien, a-t-il précisé. Cette décision de maintenir des équipements en Jordanie pourrait alimenter à nouveau les spéculations sur une éventuelle intervention militaire des Etats-Unis en Syrie, ce que la Maison Blanche considère comme la dernière des options possibles. Les responsables américains n'ont pas précisé combien de F-16 participeraient aux manœuvres ou combien resteraient ensuite dans le royaume.