Le ministère russe des Affaires étrangères a appelé, hier, les Etats-Unis et la communauté internationale à la prudence en Syrie, soulignant qu'une intervention militaire aurait des conséquences catastrophiques pour les pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Les tentatives visant à contourner le Conseil de sécurité (de l'ONU, ndlr), de créer une fois de plus des prétextes artificiels et infondés pour une intervention militaire dans la région vont créer de nouvelles souffrances en Syrie et auront des conséquences catastrophiques pour les autres pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, a indiqué le ministère dans un communiqué. Nous appelons nos collègues américains et tous les membres de la communauté internationale à la prudence, à un strict respect du droit international, avant tout fondé sur les principes fondamentaux de la charte de l'ONU, poursuit le communiqué. Le ministère russe réitère également sa sérieuse déception concernant la décision des Etats-Unis de reporter une réunion prévue avec la Russie sur la crise syrienne à La Haye. Cette réunion devait notamment être consacrée à l'organisation d'une conférence internationale sur la Syrie dans le but de mettre un terme rapidement à la violence et initier le processus d'un règlement politique du conflit, explique le ministère russe. La décision américaine de reporter la réunion à La Haye envoie un signal opposé à l'opposition (syrienne), en l'encourageant à l'intransigeance en prévision d'une puissante intervention extérieure, ajoute cette même source.
Russie et Turquie poursuivent leurs consultations Les chefs de la diplomatie russe et turque, Sergueï Lavrov et Ahmet Davutoglu, ont décidé, lors d'un entretien téléphonique, de poursuivre les consultations bilatérales sur la situation en Syrie. "Les interlocuteurs ont exprimé leur profonde inquiétude face aux informations sur l'emploi d'armes chimiques dans une banlieue de Damas le 21 août dernier. Ils ont souligné la nécessité de créer des conditions favorables pour les experts de l'ONU chargés de mener une enquête minutieuse et objective sur les circonstances de cette attaque. Les deux ministres se sont mis d'accord de poursuivre leurs consultations à ce sujet au niveau des ministères des Affaires étrangères", a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué.
Entretien téléphonique Poutine-Cameron Le président russe Vladimir Poutine et le Premier ministre britannique David Cameron ont évoqué la veille par téléphone la situation en Syrie et la préparation au G20 de Saint-Pétersbourg, rapporte le service de presse du Kremlin. "L'entretien a essentiellement porté sur la situation en Syrie sur fond de publications concernant un éventuel usage d'armes chimiques dans une banlieue de Damas. MM. Poutine et Cameron ont également abordé des questions concernant le sommet du G20 à Saint-Pétersbourg les 5-6 septembre prochain", lit-on dans le communiqué. Selon le Kremlin, l'initiative de l'entretien revient à la partie britannique.
Pas de preuve d'attaque chimique par Damas Le président russe Vladimir Poutine a dit au Premier ministre britannique David Cameron qu'il n'y a toujours pas de preuve que le régime syrien a fait usage d'armes chimiques contre les rebelles en Syrie, ont annoncé les services du Premier ministre. M. Cameron a répété qu'il y avait peu de doute que le régime de Damas a mené une attaque chimique, mercredi dernier, près de Damas, selon un compte-rendu de la conversation entre les deux hommes. Le chef du gouvernement britannique a émis des doutes sur la capacité des rebelles à mener une telle attaque et a relevé que le régime avait lancé une grande offensive sur la zone dans les jours précédents. Le régime a également empêché l'accès de l'ONU à la zone immédiatement (après l'attaque chimique présumée) ce qui laisse à penser qu'ils avaient quelque chose à cacher, a-t-il encore argumenté auprès du président Poutine. Les deux hommes ont réaffirmé l'engagement pris par les dirigeants du G-8 en juin de ne laisser personne utiliser des armes chimiques sans réponse de la communauté internationale.
Le scandale profite à l'opposition Moscou estime que le scandale autour de l'emploi d'armes chimiques près de Damas ne profite pas aux autorités syriennes, mais à ceux qui souhaitent provoquer des frappes contre la Syrie, a déclaré à Moscou le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. "Je ne peux rien affirmer, mais il est clair que le gouvernement syrien n'avait aucune raison politique ou militaire d'employer des armes chimiques au moment où des experts (de l'ONU) sont à pied d'œuvre en Syrie, au moment où la situation militaire du gouvernement est plutôt avantageuse et à la veille d'une rencontre américano-russe consacrée à la préparation d'une conférence "Genève 2". Est-ce que cela profite au régime syrien d'employer des armes chimiques alors que les inspecteurs de l'ONU sont en pleine mission?", a indiqué M. Lavrov lors d'une conférence de presse consacrée à la situation en Syrie. "D'autre part, l'autre partie en conflit serait intéressée à organiser une telle provocation pour les mêmes raisons que j'ai citées, en vue de provoquer des frappes contre le régime syrien", a ajouté le ministre. Le chef de la diplomatie russe a dit qu'il n'était pas prêt à nommer les auteurs de l'attaque chimique, "à la différence de ceux qui ont déjà rejeté la responsabilité sur le gouvernement, menant la politique de la canonnière". "Nous devons attendre les résultats objectifs de l'enquête lancée par les experts de l'ONU, si on ne leur empêche pas de la mener au bout", a conclu M. Lavrov.
Genève 2: Washington réaffirme son attachement à la conférence Washington a fermement réaffirmé à Moscou son attachement à la préparation de la conférence internationale sur un règlement politique en Syrie - Genève 2 - et au travail pour cela avec l'opposition syrienne, a indiqué M. Sergueï Lavrov. "Lors d'un entretien téléphonique d'hier, le secrétaire d'Etat américain John Kerry m'a fermement réaffirmé l'attachement de Washington à la tenue d'une conférence internationale et a assuré qu'il travaillait toujours avec l'opposition (syrienne, ndlr) afin de garantir sa participation à ce forum", a déclaré le ministre lors d'une conférence de presse convoquée d'urgence à Moscou. La conférence internationale sur la Syrie, baptisée Genève 2, devrait réunir à une même table des responsables du régime syrien et de l'opposition pour tenter de trouver une solution politique négociée entre Damas et la rébellion.
Kerry parle d'une indécence morale Le secrétaire d'Etat John Kerry a assuré la veille que des armes chimiques avaient bien été utilisées en Syrie la semaine dernière, jugeant qu'il s'agissait d'une indécence morale pour laquelle les responsables devaient répondre de leurs actes. Des armes chimiques ont été utilisées en Syrie, a déclaré M. Kerry à la presse lors d'une intervention à Washington, précisant que c'était indéniable. “Ce que nous avons vu la semaine dernière en Syrie choque la conscience mondiale. Cela défie tout code de moralité. Le massacre aveugle de civils, la tuerie de femmes, d'enfants et de passants innocents par des armes chimiques est moralement indécent”, a lancé le chef de la diplomatie américaine. Le président Barack Obama pense que ceux qui ont recours aux armes les plus atroces contre les populations les plus vulnérables de la planète doivent rendre des comptes, a ajouté M. Kerry, dans une déclaration solennelle, le visage fermé. Rien n'est plus grave aujourd'hui et rien n'est plus scruté que l'utilisation des armes chimiques. Comme son gouvernement l'avait fait au cours du week-end, M. Kerry a aussi accusé le régime syrien d'avoir offert aux enquêteurs de l'ONU en Syrie un accès trop tardif pour être crédible à la zone concernée par l'attaque du 21 août et d'avoir bombardé et détruit systématiquement les preuves sur le terrain. Ce n'est pas le comportement d'un gouvernement qui n'a rien à cacher, a-t-il encore dit. Voulant se placer sur le terrain de la morale, M. Kerry a encore dénoncé un crime lâche, mais aussi la tentative cynique de le couvrir, qui sont des insultes à notre conception fondamentale de l'humanité. Sans désigner de coupable, le ministre des Affaires étrangères a assuré que le président Obama pense que ceux qui ont recours aux armes les plus atroces contre les populations les plus vulnérables de la planète doivent rendre des comptes. “Nous savons que le régime syrien possède des armes chimiques, qu'il a la capacité de les lancer avec des vecteurs. Nous savons que le régime était déterminé à éradiquer l'opposition des zones où les attaques ont eu lieu. Et nous en sommes devenus les témoins avec nos propres yeux, a déclaré M. Kerry. Nous avons des informations supplémentaires sur cette attaque, des informations compilées et passées en revue avec nos partenaires, et nous allons fournir ces informations dans les jours à venir”, a conclu le secrétaire d'Etat. Mais il n'a pas évoqué de quelconque projet de frappe contre le régime de Damas.