Les dirigeants de dix grands groupes énergétiques européens ont réclamé cet week-end à Bruxelles l'arrêt des subventions publiques accordées à certaines énergies renouvelables (comme l'éolien) et plaidé le financement des centrales à gaz nécessaires, selon eux, pour surmonter les pics de consommation notamment hivernaux. Il faut arrêter de subventionner les énergies renouvelables matures, éolien et photovoltaïque, a lancé le P-DG du groupe italien ENEL Fulvio Conti en faisant remarquer que le marché de l'énergie était déjà en surcapacité en Europe. Nous avons besoin d'un marché plus harmonieux en ce qui concerne les capacités. Nous demandons d'intégrer les énergies renouvelables dans le marché réel et de laisser de côté les subventions, a renchéri le patron du groupe français GDF-Suez, Gérard Mestrallet. Les subventions devraient se concentrer sur des secteurs d'avenir comme le stockage, la capture du carbone, a-t-il dit. Le groupe des dix réunit les groupes français GDF-Suez, italiens ENI et ENEL, allemands E-ON et RWE, suédois Vattenfall, espagnols GasNatural Fenosa et Iberdrola, néerlandais GasTerra et tchèque CEZ. A eux seuls, ils représentent 50% de la production électrique en Europe, 30% de la capacité en énergies renouvelables. Ils avaient déjà développé ces arguments en septembre au Parlement européen et n'ont pas renoncé à influencer les décisions des dirigeants politiques européens alors que se profile un sommet des dirigeants européens sur l'énergie au début de l'année prochaine. Les dix grands patrons réunis à Bruxelles ont mis en garde contre un risque de black-out en Europe. Les centrales à gaz, même les plus récentes, sont trop peu rentables face à la distorsion sur les marchés de gros que créent les tarifs de rachat de l'électricité d'origine renouvelable, ont-ils expliqué en substance. Or, les centrales à gaz sont nécessaires pour surmonter les pics de consommation, notamment hivernaux, même si elles ne fonctionnent que de manière intermittente, ont-ils avancé. En fait, a souligné une source européenne, derrière l'offensive contre les subventions aux renouvelables se cache une demande implicite pour aider les centrales au gaz et au charbon quand elles ne sont pas utilisées. La Commission européenne présentera fin octobre une communication aux Etats membres avec des options pour réformer les soutiens aux renouvelables. Au départ, ces soutiens étaient bien pour pousser de nouvelles technologies, mais aujourd'hui beaucoup d'Etats veulent réformer le système. La Commission va soumettre des options pour mener cette réforme et il reviendra aux Etats de décider, a déclaré Marlene Holzner, porte-parole du commissaire à l'Energie Günther Oettinger. Il en va de même pour le gaz de schiste. Il revient aux Etats de décider quelles sources d'énergie ils veulent utiliser, a-t-elle souligné. Dans leur argumentaire distribué à la presse pour dénoncer l'échec de la politique énergétique, les dix P-DG dénoncent la hausse des factures d'électricité : +17% en 4 ans pour les consommateurs et +21% en 4 ans pour les entreprises et les surcapacités qui les ont obligés à fermer des centrales représentant 51 GW, soit les capacités de production combinées de la Belgique, du Portugal et de la République Tchèque. Ces doléances doivent être adressées aux Etats. En Allemagne 50% du prix de l'électricité est constitué par les taxes, a-t-on commenté à Bruxelles. Dans dix-sept des 28 Etats de l'UE, les prix du gaz et de l'électricité facturés aux consommateurs sont fixés par le gouvernement, a-t-on rappelé.