Les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne doivent s'engager sur la voie d'une politique énergétique commune jusqu'ici insuffisante, ont estimé, hier, dans la presse le P-dg de GDF Suez Gérard Mestrallet et le commissaire européen à l'Energie Günther Oettinger. A la veille d'un sommet européen largement consacré à l'énergie, Gérard Mestrallet a lancé un «appel solennel» aux côtés de sept autres producteurs européens de gaz et d'électricité, parmi lesquels les allemands EON et RWE, l'italien Enel et l'espagnol Iberdrola, en évoquant «une balkanisation de l'Europe de l'énergie». «La politique européenne [...] avait un triple but : lutter contre le réchauffement climatique, améliorer la compétitivité et assurer la sécurité d'approvisionnement du continent. Or, sur ces trois volets, c'est l'échec», a-t-il estimé dans un entretien publié par le Monde. «Nous ne demandons pas des subventions, mais de la visibilité, des règles stables et homogènes en Europe, des objectifs quantifiés jusqu'en 2030 en matière de lutte contre le réchauffement climatique», a-t-il ajouté, jugeant également que «le risque de black-out n'a (jamais) été aussi fort qu'aujourd'hui». Le P-dg demande notamment un système coordonné de rémunération des centrales à gaz, alors que GDF Suez est contraint d'en fermer certaines, en Europe, qui subissent la concurrence d'unités fonctionnant au charbon. Günther Oettinger a de son côté déclaré lors d'une interview publiée par le quotidien Les Echos qu'il attendait «un signal politique clair des chefs d'Etat et de gouvernement pour européaniser la politique de l'énergie». «Tandis que les Etats-Unis sont en train de devenir autosuffisants et même exportateurs de gaz et bénéficient des prix jusqu'à quatre fois inférieurs à ceux payés en Europe, l'Union est de plus en plus dépendante», a-t-il souligné. «Il faut anticiper le problème de compétitivité que cela va créer. Il est question à terme de la survie des industries les plus consommatrices d'énergie en Europe.» Le commissaire à l'Energie a estimé à ce titre qu'il fallait laisser les pays qui le souhaitent, comme la Grande-Bretagne ou la Pologne, développer des projets pilotes en matière de gaz de schiste. Günther Oettinger a également constaté de «nets progrès» dans la transposition en droit national des textes visant à créer un marché intérieur unique de l'énergie, jugeant toutefois nécessaire d'aller plus loin. «Dans un tiers des pays, la dérégulation fonctionne pour le gaz et l'électricité, huit Etats maintiennent une régulation des prix de détail, ce qui est acceptable faute de concurrence suffisante», a-t-il observé. «Et nous estimons qu'il reste encore des règles superflues, qui étouffent la concurrence dans un tiers des pays.»