L'Etat algérien tend de plus en plus à faire valoir son droit de préemption pour entrer dans le capital des entreprises à capitaux étrangers comme en témoigne l'opération visant la société de fabrication de pneumatiques Michelin-Algérie. Le ministre des Finances, Karim Djoudi, a affirmé dimanche dernier à l'Assemblée populaire nationale (APN) que l'Etat algérien fera valoir son droit de préemption sur cette société acquise récemment par le groupe Cevital. L'exercice par l'Etat du droit de préemption est prévu par la loi de finances complémentaire de 2009 (LFC) qui prévoit que "l'Etat ainsi que les entreprises publiques économiques disposent d'un droit de préemption sur toutes les cessions de participations des actionnaires étrangers ou au profit d'actionnaires étrangers". A cet effet, M. Djoudi, a indiqué que l'enjeu de cette décision concerne la récupération des terrains en vue d'y effectuer des investissements. Tout en déclarant qu'avant de pratiquer ce droit, le gouvernement devra présenter une offre au propriétaire français avec lequel des concertations sont toujours en cours. Ce dernier n'a pas exclu de revendre ensuite la société à d'autres investisseurs. Il a souligné qu' " il est fort possible que des fabricants de pneumatiques s'intéressent au marché algérien. Nous leur accorderons toutes les facilités nécessaires à l'investissement ". Cette transaction concernant Michelin vient s'ajouter au dossier de l'opérateur de téléphonie mobile Djezzy sur lequel l'Etat a aussi fait valoir son droit de préemption. Les deux opérations ne sont toujours pas bouclées et aucun échéancier n'est fixé pour leur parachèvement, ce qui témoigne de la complexité des négociations. Le directeur général d'Orascom télécom Algérie, Vincenzo Nesci, avait annoncé en décembre 2012 qu'un accord a été trouvé avec le gouvernement algérien et qu'une nouvelle société dénommée Optimum télécom a été créée et enregistrée au registre de commerce dans le respect de la règle 49/51. Le même responsable avait fait état de "quelques problèmes juridiques à régler" sans en dire davantage pour des raisons de confidentialité. La règle 49/51 a été instituée par la loi de finances complémentaire de 2009 en réaction à la cession d'Orascom construction de sa cimenterie à un entrepreneur français sans avis préalable du gouvernement alors que le projet avait bénéficié de facilitations liées à l'encouragement de l'investissement. La décision de l'Etat d'acquérir la majorité des actions d'entreprises étrangères l'a conduit à porter la participation de Sider dans le capital du complexe sidérurgique ArcelorMitttal à hauteur de 51% contre 30% auparavant. Selon les syndicats, la reprise d'autres entreprises par l'Etat serait à l'ordre du jour. Dans le secteur des matériaux de construction, ce serait le cas pour l'entreprise céramique de Guelma rachetée par ETER Italia après le retrait des partenaires algériens qui faisaient partie de son capital. Les entreprises publiques privatisées au profit de partenaires étrangers sont nombreuses et des responsables ont quelquefois émis la volonté de les remettre sous le giron de l'Etat sans entreprendre ce processus. Parmi les sociétés privatisées et qui étaient susceptibles de repasser sous le contrôle de l'Etat figurent l'allemande Linde activant dans le secteur des gaz industriels, mais le processus n'a jamais été engagé. Afin d'éviter des complications causées par la propriété exclusive des usines par des étrangers en Algérie, l'Etat a décidé d'appliquer la règle 49/51 pour tous les nouveaux projets y compris pour celui de Renault.