La Banque centrale américaine (Fed) a décidé mercredi de limiter son aide à l'économie américaine en réduisant "modestement" le montant de ses injections de liquidités tout en maintenant les taux d'intérêt inchangés, sur fond d'amélioration de la conjoncture dans le pays. A l'issue de deux jours de réunion de son comité monétaire (FOMC) à Washington, la Réserve fédérale a indiqué qu'elle réduisait de 85 à 75 milliards le montant de ses rachats d'actifs mensuels auxquels elle procède depuis plus d'un an pour desserrer l'étau du crédit et soutenir l'activité. A partir de janvier, la Banque achètera 40 milliards de bons du Trésor (contre 45 auparavant) et 35 milliards de titres adossés à des créances hypothécaires (contre 40 jusqu'à présent), a précisé le FOMC dans son communiqué, jugeant la réduction de son soutien "modeste". Cette décision constitue une relative surprise pour une majorité d'économistes et d'analystes qui s'attendaient à un statu quo. La Fed, qui comme prévu a laissé ses taux proches de zéro comme elle le fait depuis fin 2008, a assuré qu'elle maintiendrait "sans doute" leur niveau actuel "bien après le moment où le taux de chômage déclinera sous les 6,5%, notamment si les prévisions d'inflation continuent de se situer sous l'objectif à long terme du Comité de 2%".
Optimisme mesuré Au cours d'une conférence de presse suivant cette annonce, le président de la Fed, Ben Bernanke, s'est dit confiant dans le fait que l'inflation, qui était de 0,7% sur un an en novembre selon l'indice lié aux dépenses de consommation (PCE), reviendrait à ce niveau. M. Bernanke a précisé que les futures réductions d'achats d'actifs seraient "du même ordre" tout au long de 2014 même si, du fait qu'elles seront liées aux données économiques, elles n'interviendront pas forcément à chaque réunion. Il a aussi mentionné qu'une large majorité des membres du FOMC ne s'attendaient pas à une hausse des taux avant 2015. La Fed a estimé que "les conditions sur le marché du travail ont montré de nouveaux signes d'amélioration", écrit notamment le Comité. Le taux chômage américain est tombé en novembre à son plus bas niveau depuis cinq ans (7%). La Fed précise toutefois qu'elle continuera à soutenir l'économie américaine par sa politique monétaire tant que le marché du travail ne se sera pas amélioré de manière "importante", selon le communiqué du FOMC. M. Bernanke, qui quitte la Fed fin janvier après huit ans à sa tête, a indiqué que celle qui doit lui succéder, la vice-présidente Janet Yellen avait "pleinement soutenu" la décision de mercredi de réduire la politique de soutien non conventionnelle de la Fed. Un seul membre du comité de politique monétaire a voté contre, en la personne d'Eric Rosengren, président de l'antenne de la Fed de Boston, qui a estimé que le chômage restait "élevé" et que l'inflation se situait "bien en dessous" de son objectif de 2%. La Fed a également publié mercredi ses nouvelles projections économiques qui témoignent d'un optimisme mesuré. Elle a légèrement relevé la fourchette haute de sa prévision de croissance pour 2014, à 3,2% contre 3,1% attendus jusque-là. Sa fourchette basse a en revanche été abaissée (2,8 contre 2,9%). La Banque centrale se montre plus optimiste s'agissant de l'emploi, revoyant légèrement en baisse sa prévision du taux de chômage en 2014, de 6,3 à 6,6% contre 6,4% à 6,8%. Dans ses nouvelles projections, elle ne prévoit pas une inflation à ce niveau avant 2015 (entre 1,5 à 2,0%).
Réduction de l'argent facile La Fed a surpris les marchés en réduisant plus tôt qu'ils ne l'escomptaient ses injections de liquidités mais elle est parvenue à les rassurer en insistant sur la promesse de ne pas relever les taux rapidement. L'annonce de la Fed mercredi de réduire de 10 milliards de dollars ses achats d'actifs à 75 milliards mensuels à partir de janvier a pris les marchés financiers par surprise. Ils pensaient que la banque centrale attendrait jusqu'au début de l'année prochaine un raffermissement de la reprise. "Cela a été quelque peu une surprise mais pas un choc", résumait Jim O'Sullivan, chef économiste pour les Etats-Unis de High Frequency Economics à l'issue d'une réunion du Comité de politique monétaire (FOMC) qui amorce une transition maintes fois annoncée. "Comme beaucoup, nous pensions qu'une réduction était possible mais que (la Fed) patienterait jusqu'à la prochaine réunion", ajoutait-il. "La décision de la Fed est un vote de confiance sur le fait que la reprise économique est maintenant durable", soulignait une analyste de Standard and Poor's, Beth Ann Bovino. Le président de la banque centrale, Ben Bernanke, a insisté lors d'une conférence de presse sur les progrès du marché de l'emploi, soulignant que depuis le début de la troisième phase des mesures exceptionnelles d'assouplissement monétaire en septembre 2012, près de 3 millions d'emplois ont été créés. Ben Bernanke a aussi prévenu que cette réduction "modeste" d'achats de bons du Trésor et de titres adossés à des créances hypothécaires restait "dépendante des données économiques" et qu'elle pouvait "s'arrêter, si l'économie est décevante" et "reprendre, si elle se renforce". Le Dow Jones à Wall Street a d'abord chuté, à l'annonce d'une diminution des injections d'argent facile, avant de s'envoler vers un nouveau record historique au-dessus des 16 000 points. La Bourse a en effet été rassurée par les promesses de la Fed de ne pas relever les taux pendant une longue période même si le taux de chômage descend au-dessous de 6,5%. Il se situe actuellement à 7%. "Il sera sans doute approprié de maintenir le niveau actuel du taux d'intérêt au jour le jour bien après le moment où le taux de chômage déclinera sous les 6,5%", pouvait-on lire pour la première fois dans le communiqué du FOMC. M. Bernanke a aussi mentionné qu'une quinzaine de membres du FOMC, sur les 17 présents, n'envisageaient pas de hausse des taux avant 2015. "La Fed a tenté d'adoucir l'impact de la réduction de ses achats d'actifs en renforçant ses déclarations d'orientation de politique monétaire", estimait Paul Ashworth, du centre de recherche Capital Economics. La Fed semble ainsi abandonner graduellement un de ses outils non-conventionnels pour en adopter pleinement un autre, celui de la "forward guidance" ou "orientation de politique monétaire" faite de promesses au monde financier que les taux resteront bas tant que l'inflation sera sous contrôle et à condition que le chômage soit en net retrait. Pour Peter Schiff, président de la société d'investissement Euro Pacific Capital, cette déclaration de la Fed sur les taux "va bien plus loin que les communications habituelles, en assurant que sa politique monétaire, son principal outil, restera accommodante pour longtemps encore". Michael Gapen, de Barclays Research, estime, lui, que la Fed ne relèvera pas les taux directeurs avant le milieu de 2015.
Le bilan de la Fed a dépassé le montant record de 4 000 milliards de dollars Les actifs portés au bilan de la Réserve fédérale américaine (Fed), gonflés par sa politique monétaire ultra-accommodante, ont dépassé le montant record de 4 000 milliards de dollars, selon les chiffres publiés par la Fed avant-hier. Les actifs de la Fed sont notamment composés d'obligations du Trésor pour 2 200 milliards de dollars, de titres adossés à des créances hypothécaires pour 1 500 milliards de dollars et d'autres actifs immobiliers. Avant la crise financière de 2008, le bilan de la Fed ne dépassait pas 900 milliards de dollars. Le bilan de la banque centrale a enflé après les différentes phases exceptionnelles d'assouplissement monétaire où, pour soutenir la reprise économique et influer sur les taux à la baisse, la Fed a acheté en masse des bons du Trésor notamment. Il a atteint jeudi le montant exact 4 008 milliards de dollars. Le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) a annoncé mercredi une diminution progressive de ces achats d'actifs qui vont passer à partir de janvier de 85 milliards de dollars à 75 milliards de dollars par mois. Ces injections de liquidités continueront de diminuer au cours de 2014 tant que le taux de chômage baissera et à condition que l'inflation reste sous contrôle. Dans ces conditions, même en réduisant ces achats, le bilan de la Fed va encore augmenter dans les mois qui viennent.
La Fed reporte le vote d'investiture de Janet Yellen Le Sénat américain a décidé, avant-hier soir, de reporter le vote d'investiture de Janet Yellen à la tête de la Réserve fédérale américaine (FED) au 6 janvier. Le chef de la majorité démocrate au Sénat, Harry Reid, a précisé qu'un vote aurait bien lieu comme prévu vendredi au sujet de Mme Yellen, mais qu'il serait purement procédural et que le vote d'investiture aurait lieu après les fêtes de fin d'année. Plusieurs autres nominations ont également été reportées dans un souci apparent d'apaisement vis-à-vis des Républicains, soucieux de contrecarrer une vague récente de nominations devant obtenir confirmation devant le Sénat. Actuelle vice-présidente de la Fed, Janet Yellen a été nommée le 9 octobre par le président Barack Obama pour succéder à Ben Bernanke, qui quitte ses fonctions le 31 janvier 2014. Le mandat dure quatre ans. Sa nomination a été approuvée par la commission bancaire du Sénat le 21 novembre. La confirmation par l'ensemble du Sénat est la dernière étape du processus.
Le budget définitivement adopté par le Sénat Le sénat américain a adopté le budget pour les deux années à venir envoyant ainsi le signal d'une plus grande stabilité fiscale après le psychodrame provoqué par la paralysie partielle des administrations en octobre. Le texte, qui doit maintenant être promulgué par le président Barack Obama avant son départ vendredi pour Hawaii, a été adopté par tous les démocrates du sénat et neuf républicains. Il fixe le cadre des dépenses pour 2014 et 2015 tout en annulant les coupes automatiques qui devaient entrer en vigueur le 1er janvier. Grâce à l'annulation partielle de cette austérité, les dépenses fédérales, après deux années de baisse historique, devraient repartir à la hausse en 2014, passant de 967 milliards de dollars pour 2013 à 1012 milliards en 2014 et 1014 milliards en 2015. Les dépenses militaires, qui devaient subir une réduction nette, vont légèrement augmenter, à la grande satisfaction du Pentagone et du secteur de la défense. Les républicains ont concédé une hausse de plusieurs taxes et redevances, notamment sur les passagers aériens, mais les impôts n'ont pas été augmentés, conformément à leur promesse. Mais de nombreux républicains, dont le chef de la minorité au sénat Mitch McConnell, ont voté contre cet accord estimant que les dépenses en légère augmentation, dépassaient le seuil fixé lors du budget 2011. Pour d'autres élus en revanche, ce compromis a été accueilli avec soulagement. Ce vote marque en effet l'une des réussites les plus importantes de cette session qui a été émaillée par de multiples blocages des républicains. "Grâce à ce compromis, nous avons réintégré 63 milliards de dollars de coupes automatiques et empêché une nouvelle fermeture de l'administration, restaurant ainsi des certitudes dont notre économie toute entière avait tant besoin", a affirmé le sénateur démocrate Tim Kaine, peu après le vote. Mais l'accord reste, de l'aveu des deux camps, un compromis. Les grandes réformes de l'Etat-providence (programmes de retraite, santé, aides sociales) ou du code fiscal sont repoussées aux calendes grecques.