Les forces gouvernementales sud-soudanaises et les rebelles revendiquaient chacun le contrôle d'une ville pétrolière clé hier, alors qu'étaient entrepris à Nairobi de nouveaux efforts diplomatiques pour tenter d'enrayer la crise dans le jeune pays. Malakal est sous le contrôle complet des forces loyales à l'ex-vice-président Riek Machar, a affirmé Moses Ruai, un porte-parole de la rébellion, ajoutant que les forces gouvernementales en étaient parties avant-hier soir. Cette ville du nord du pays est la capitale de l'Etat du Haut-Nil, riche en pétrole. Les forces gouvernementales fidèles au président Salva Kiir y affrontent les rebelles depuis lundi. Le ministre sud-soudanais de la Défense, Kuol Manyang Juuk, a rétorqué en parlant de désinformation, affirmant au contraire que les rebelles s'étaient repliés et que Malakal était entièrement sous le contrôle des forces gouvernementales. Les éléments de Riek, qui consistent en fait à quelques membres de la police et quelques membres de l'armée, ont été vaincus et ne sont plus à Malakal, a-t-il déclaré. Le Soudan du Sud est frappé depuis le 15 décembre par d'intenses combats qui menacent de dégénérer en guerre civile. Au coeur de ce conflit, une rivalité entre le président Kiir et son ex-vice-président, limogé en juillet. Le premier accuse le second de tentative de coup d'Etat. Riek Machar nie et reproche à Salva Kiir de simplement chercher à éliminer ses rivaux. Les forces rebelles ont pris le contrôle d'autres capitales régionales, Bentiu, dans l'Etat pétrolier d'Unité, et Bor, dans celui du Jonglei, reprise par l'armée mardi.
Meurtres, viols, massacre Le récent conflit dans la jeune Nation, indépendante du Soudan depuis seulement juillet 2011, est alimenté par une vieille rivalité politique, mais revêt aussi une dimension ethnique : les Dinka, tribu de Salva Kiir, contre les Nuer de Riek Machar. Depuis plusieurs jours, des informations émergent sur des violences à caractère tribal: meurtres, viols, massacre. L'ONU a annoncé la découverte d'au moins un charnier à Bentiu et un bilan, sur l'ensemble du pays, de plusieurs milliers de morts. Toujours selon elle, au moins 90 000 personnes auraient été déplacées depuis une dizaine de jours. La communauté internationale (ONU, Etats-Unis, pays africains, Chine...) redouble d'efforts pour tenter d'éviter que le pays ne sombre dans la guerre civile. Les Etats-Unis, parrains de l'indépendance en 2011 et principal soutien politique et économique du pays depuis, ont réaffirmé jeudi à l'adresse des deux rivaux que leur aide cesserait en cas de coup de force militaire. Et vendredi se tenait à Nairobi un sommet extraordinaire de l'Autorité intergouvernementale sur le développement (Igad). Organisation sous-régionale, l'Igad avait déjà œuvré à la conclusion de l'accord de paix entre la rébellion sudiste et Khartoum qui avait mis fin en 2005 à la guerre civile Nord-Sud et ouvert la voie à l'indépendance de Juba. Pendant ce temps, l'ONU, dont le secrétaire général Ban Ki-moon a menacé mercredi de sanctions les responsables d'exactions, tente d'envoyer d'ici à la fin de la semaine des renforts de Casques bleus dans le pays. L'ONU, débordée aux premiers jours des combats, a décidé d'envoyer 6 000 Casques bleus supplémentaires et des moyens aériens (six hélicoptères de combat ou de transport et un avion C130) afin de mieux protéger les civils venus se réfugier dans ses bases par dizaines de milliers. Ce renfort portera à 12 500 le nombre de soldats de la Mission de l'ONU au Soudan du Sud (Minuss). Salva Kiir et Riek Machar ont formellement accepté d'entamer des pourparlers, mais sans fixer de date. Et les combats touchent encore la moitié au moins des 10 Etats du pays, dont ceux du Jonglei, d'Unité, d'Equateur central (Juba), mais aussi du Haut-Nil ou encore d'Equateur oriental.