La croissance chinoise n'est pas parvenue à accélérer l'an dernier et devrait rester sous pression en 2014, selon des économistes, alors que Pékin poursuit ses réformes structurelles et cherche à endiguer l'essor du crédit et des dettes publiques. Malgré un encourageant regain de vigueur au troisième trimestre, le Produit intérieur brut (PIB) chinois a répété en 2013 la même performance qu'en 2012, avec une progression de 7,7%, selon la prévision médiane d'un panel de quatorze économistes. Il s'agit de la plus faible croissance enregistrée par la deuxième économie mondiale depuis 1999. Le gouvernement, qui doit annoncer lundi le chiffre officiel du PIB, s'était fixé un objectif de croissance annuelle de 7,5%. Sur les trois derniers mois de l'an passé, la Chine a enregistré une croissance de 7,6%, selon ce même panel d'experts, un coup de frein après le sursaut du trimestre précédent (+7,8%). Un signe selon les experts que les mesures d'"ajustement", notamment des exemptions fiscales, décidées par Pékin en juillet suite au net ralentissement du premier semestre, n'ont pas eu d'effets durables. "Les dépenses publiques se sont amenuisées au cours du dernier trimestre" tandis que dans le même temps, les entreprises "ne restockaient que très peu, suggérant une prudence accrue vis-à-vis des perspectives économiques", ont commenté les analystes de la banque ANZ. L'activité manufacturière a enregistré en décembre une nouvelle décélération, selon les indices PMI des directeurs d'achats. Un contrecoup selon les experts des efforts de "rééquilibrage" affichés par le premier ministre Li Keqiang, en poste depuis mars. Celui-ci a assuré vouloir rendre l'économie moins dépendante des exportations et des investissements dans les industries lourdes --en réduisant les sévères surcapacités et surtout en endiguant la folle envolée du volume des crédits... quitte à rogner la croissance à moyen terme dans des limites "raisonnables". Pékin entend par ailleurs freiner le gonflement de l'endettement des collectivités locales (+67% en deux ans selon un audit national), celles-ci ayant multiplié les investissements à crédit et souvent peu rentables pour stimuler l'activité. "De nouvelles mesures visent à restreindre les outils de financement des gouvernements locaux ainsi que la +finance de l'ombre+", des sociétés de crédit peu régulées prospérant en-dehors du système bancaire, et "cela va clairement conduire à accroître les pressions sur l'économie", a indiqué Yao Wei, de la Société Générale. La politique de resserrement monétaire de la banque centrale chinoise (PBOC) pourrait notamment freiner l'activité en renchérissant le coût de financement des entreprises. En conséquence, la croissance chinoise devrait ralentir en 2014, à 7,6%, selon la prévision médiane du panel des économistes.
Interrogations sur les réformes "La finance de l'ombre n'est pas si effrayante et le désendettement des gouvernements locaux se fera en douceur", tempère cependant Lu Ting, de Bank of America Merrill Lynch, affirmant ne pas souscrire aux vues "les plus alarmistes". En revanche, il donne également tort aux "optimistes qui prédisent une croissance de plus de 8%, en pensant que la reprise aux Etats-Unis et en Europe dopera les exportations chinoises". Selon lui, "le renchérissement du yuan, la montée des coûts du travail (en Chine) et la faiblesse des économies émergentes" pénaliseront sensiblement le commerce extérieur. De l'avis général, tout dépendra de la manière dont le gouvernement concrétisera son agenda de réformes structurelles, dont les grandes lignes avaient été dévoilées en novembre après une réunion du Parti communiste chinois (PCC). "Dès la fin du deuxième trimestre devraient réapparaître les tensions" entre l'objectif de réformes et le souci de maintenir la croissance, ont observé dans une note Mark Williams et Wang Qinwei, du cabinet Capital Economics. Les autorités centrales mettent désormais en avant d'autres indicateurs jugés cruciaux, comme l'emploi et l'inflation, mais "si le gouvernement reconduit un objectif de croissance annuelle de 7,5% pour 2014, cela brouillera le message", avertit-on chez Capital Economics. "Un accent excessif mis sur le PIB pourrait inciter à repousser certaines réformes, ce qui serait fatal à la crédibilité du gouvernement et aux perspectives d'une croissance plus durable" à plus long terme, a renchéri Liu Ligang, économiste chez ANZ.