Un afflux d'argent spéculatif, la faiblesse du billet vert, une demande toujours robuste et les problèmes d'approvisionnement affectant certaines filières ont conspiré depuis quelques semaines à faire grimper les prix des matières premières. A la bourse de Londres où l'on fixe le cours de référence des non ferreux, le plomb se négocie aujourd'hui au-delà des 3 600 dollars la tonne pour une livraison dans trois mois. Ce nouveau record absolu a été établi hier par le mal aimé des non ferreux. « En franchissant la semaine dernière le cap des 3 500 dollars, le plomb est entré dans une zone jusqu'alors inconnue », commentait un analyste littéralement écrasé par le poids en dollar du métal. Il y a de quoi : son cours a triplé en deux ans. Un négociant tempère toutefois cette envolée, comme celle des autres non ferreux. «Dès que le dollar baisse, les métaux, dont les cours sont libellés en billet vert, grimpent afin de préserver leur valeur». D'où les hausses quasi mécaniques provoquées par la glissade de la monnaie américaine. «N'oublions pas», fait-il remarquer, «que le dollar a perdu 30% de sa valeur ces derniers mois», cela explique en partie l'embellie du marché des non ferreux. On constate qu'en monnaie constante, seul le nickel a vu sa valeur réelle progresser. Par ailleurs, on retrouve un autre phénomène désormais routinier derrière cette envolée : l'engagement des fonds qui contribue à faire monter le cours du plomb. Hormis ces effets automatiques liés aux fluctuations monétaires et à la présence des investisseurs, d'autres événements ont favorisé ce nouveau bond. Il y a eu d'une part, des ratés dans la production des mines situées en Australie, et on a vu d'autre part revenir aux achats les industriels, qui avaient déserté la place en août et en septembre quand le plomb s'échangeait autour des 3 000 dollars. Enfin, dernier facteur qui a permis cette nouvelle ascension : l'absence des Chinois pour cause de vacances. Leur présence aurait limité la hausse car ils se seraient empressés de vendre pour tirer partie de cette nouvelle embellie. Au-delà de ces considérations techniques, notre négociant se demande si le plomb tant décrié pour des raisons sanitaires n'est pas en train de redevenir un métal porteur. Jusqu'à maintenant sa production était une fatalité dépourvue d'intérêt commercial pour les sociétés minières. Comme il est associé à l'argent, au cuivre ou au zinc, il faut bien l'extraire, le séparer des métaux les plus nobles pour obtenir le meilleur prix de ces derniers. Mais aujourd'hui, dans un contexte de course à l'énergie, on se rappelle qu'il est justement une source d'énergie. C'est un composant indispensable à la fabrication des batteries qui équipent une multitude de nos objets quotidiens. Pourquoi ne pas envisager la diffusion de cette source d'énergie, au rendement certes modeste mais au coût avantageux? Le prix d'une tonne de plomb a de nouveau battu vendredi matin un record historique sur le London Metal Exchange (LME), se hissant jusqu'à 3720 dollars, toujours soutenu par les perturbations de l'approvisionnement mondial. La tonne de plomb pour livraison dans trois mois enchaîne les records depuis la fin du mois de septembre. Elle a progressé de près de 50% depuis la fin juin, et totalement effacé ses pertes occasionnées par la tourmente financière du mois d'août. Depuis le milieu de l'été 2006, quand elle valait 1000 dollars seulement, elle a bondi de plus de 270%. Les prix sont soutenus par la multiplication des perturbations dans l'approvisionnement. Par exemple, la mine australienne de Magellan, opérée par Ivernia, a interrompu ses livraisons depuis mars. Elle est soumise à plusieurs enquêtes des autorités sur des cas de pollution. Une usine du groupe Xstrata, à Mount Isa, également en Australie, voit par ailleurs sa production interrompue depuis vendredi dernier, en raison d'un incendie. Les stocks disponibles sur le LME sont, par ailleurs, à des plus bas depuis 1990. Vendredi, ils ont baissé de 25 tonnes, à 22'275.