A la veille du 10 mai passé, on s'était posé la question de savoir dans quel système politique allons-nous entrer ? Quelle est la nature du système politico-économique en vigueur ? Il s'agit bien d'un processus de transition, car l'Algérie n'est, pour le moment, ni une démocrate, ni une théocratie, ni une franche dictature, ni une économie tout à fait dirigée, ni une économie tout à fait libérale. Que veut-elle devenir alors ? Que peut-elle devenir ? Entre le vouloir et le pouvoir, il y a plusieurs courants qui peuvent se neutraliser. Démocratie impossible (démocratie résonne " laïcité ") , car les islamistes sont disponibles à en contrarier le cours . Théocratie impossible, car les démocrates sont là pour la rejeter. Mathématiquement, on voit qu'il y a plusieurs destinations, plusieurs " possibles ", mais également plusieurs incertitudes. C'est une responsabilité très lourde, trop lourde même, de conduire un processus de transition dans le cadre d'une cohabitation parfois non pacifique entre idéologies présentées comme incompatibles. Certains diraient que la cohabitation avait commencé avec la coalition transformée par la suite en alliance. Mais, dans ce cas précis, il ne s'agit pas d'une cohabitation, car le gouvernement s'est engagé à appliquer le programme du président. Au sein de l'alliance, peut-être pourrions-nous parler d'une coexistence et d'une entente a minima sur une partie du programme dans sa partie technique, ce qui se traduit par l'octroi au parti islamiste HMS uniquement des postes techniques. La construction de l'autoroute n'a pas de couleur idéologique. De ces incertitudes, ne peuvent en découler que des déstabilisations génératrices d'insécurité, alors que l'insécurité génère des instabilités. La boucle est ainsi bouclée. Des hommes politiques appuyant le pouvoir observent avec inquiétude que le champ politique risque de générer de nouvelles menaces, pour ce qui les concerne et pas pour leurs partis. Ces incertitudes amusent les vrais opposants, lesquels estiment qu'ils ont tout à gagner. Personne ne croit qu'il y a des risques à rejoindre le lot des pays arabes voisins. Et pourtant, ceux qui, de chaque côté, de part et d'autre de la ligne de fracture, se chargent d'étudier les vulnérabilités de l'autre, savent qu'en réalité les moyens politiques de l'opposition ne pourront pas venir à bout de ceux qui détiennent en main le pouvoir d'agir. Nous ne sommes pas dans la situation où sont possibles les " révolutions " colorées. Pouvons-nous soutenir, sans erreur aucune, qu'aussi bien en Algérie que dans les autres pays arabes, les orientations politiques et économiques sont celles que dégage le champ politique par confrontation dans un débat approfondi ? Tout se passe comme si les pays arabes n'ont pas besoin de l'opposition qui sort du champ politique.