Israël et le mouvement palestinien Hamas ont accepté une trêve de 72 heures depuis hier dans la bande de Gaza, au 25e jour d'une guerre dévastatrice qui a fait plus de 1 500 morts. Même si la trêve doit débuter à 08h00, les combats n'en ont pas moins continué pendant la nuit. Aux premières heures de vendredi les frappes israéliennes se poursuivaient, notamment dans le secteur de Khan Younès, au sud de l'enclave palestinienne, où 14 Palestiniens ont été tués, selon les secours. Le pilonnage de l'armée israélienne s'intensifiait également au nord du territoire, dans le secteur de Jabaliya. Les tirs de roquettes s'étaient eux ralentis dans la nuit, sept projectiles ayant été tirés de Gaza sur les localités israéliennes frontalières, selon l'armée.
Plus de 1500 morts Depuis le début de l'opération "Bordure protectrice", le 8 juillet, plus de 1450 Palestiniens, pour la plupart des civils, ont été tués dans les pilonnages et les combats, selon des médecins gazaouis. Dans le même temps, 64 Israéliens ont péri, dont 61 soldats. Les cinq derniers ont été fauchés jeudi soir par un obus de mortier palestinien le long de la frontière sur le territoire israélien. L'accord de trêve a été annoncé par le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et le secrétaire d'Etat américain John Kerry dans un communiqué commun. Il a été accepté par toutes les parties. Le texte dit que les "forces sur le terrain resteront en place" pendant le cessez-le-feu, ce qui implique que l'armée israélienne ne se retirera pas et pourra notamment continuer les opérations contre les tunnels.
Négociations au Caire En parallèle, des délégations israélienne et palestinienne se rendront au Caire pour des négociations séparées en vue d'un arrêt plus durable des hostilités, indique le communiqué. "Ce cessez-le-feu est très important pour donner aux civils innocents un répit dont ils ont bien besoin face à la violence", a déclaré John Kerry. Les 1,8 million de civils de Gaza recevront "l'aide humanitaire" et pourront "enterrer leurs morts, s'occuper des blessés et se réapprovisionner en denrées alimentaires", a ajouté le secrétaire d'Etat. Les précédents cessez-le-feu humanitaires, unilatéraux, ont volé en éclats. Mais c'est la première fois qu'une trêve recueillerait l'assentiment des deux camps et serait prévue pour une période si longue.
Navi Pillay accuse Israël de défier délibérément le droit international La Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Navi Pillay, a accusé Israël de défier délibérément le droit international dans sa guerre contre le Hamas palestinien à Gaza. Lors de sa dernière conférence de presse à Genève avant la fin de son mandat de six ans, Mme Pillay a condamné les attaques menées par l'armée israélienne à Gaza contre des maisons, des écoles, des hôpitaux et des centres de l'ONU. Aucune d'entre elles ne semble être accidentelle. Elles semblent être un acte de défi délibéré vis-à-vis des obligations résultant du droit international que doit respecter Israël, a-t-elle dit. Il est absolument incontestable que les principes de proportionnalité et de précaution ont été ignorés par Israël, a déclaré Navi Pillay. Nous ne pouvons pas tolérer cette impunité, a-t-elle ajouté. L'ex-juge sud-africaine a par ailleurs relevé que les deux parties commettent de graves violations des droits de l'Homme, qui pourraient constituer des crimes au regard du droit international humanitaire et des droits de l'Homme. Le 23 juillet, le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a lancé, suite à une demande de la Palestine, une commission internationale d'enquête sur les violations qui auraient été commises dans le cadre de l'offensive israélienne à Gaza. Les membres de cette commission doivent désormais être nommés par le président du Conseil, le Gabonais Baudelaire Ndong Ella. Lors des débats au Conseil, la semaine dernière, Mme Pillay avait déjà dénoncé les possibles crimes de guerre commis par Israël à Gaza, ainsi que les attaques aveugles menées par le Hamas contre des zones civiles. Jeudi, les bombardements ont repris à Gaza, coûtant la vie à une dizaine de personnes et portant à environ 1.370 le nombre de Palestiniens tués, en grande majorité des civils dont plus de 245 enfants selon l'Unicef, en 24 jours de conflit, ont indiqué les secours locaux. Avec 56 morts, l'armée israélienne déplore de son côté son bilan le plus lourd depuis la guerre contre le Hezbollah au Liban en 2006. Mercredi, dans la minuscule enclave palestinienne où les civils ne sont nulle part à l'abri, près de 120 Palestiniens ont perdu la vie, lors de l'une des journées les plus meurtrières d'un conflit entamé le 8 juillet, marquée par deux bains de sang. Seize Palestiniens ont été tués quand deux obus israéliens ont frappé de plein fouet une école de l'ONU du camp de réfugiés de Jabaliya (nord) où s'étaient abrités environ 3 000 Gazaouis qui avaient fui les combats. L'agence onusienne pour l'aide aux réfugiés palestiniens (UNRWA) a clairement accusé l'armée israélienne d'être responsable du drame de son école de Jabaliya, déplorant la mort d'enfants tués alors qu'ils dormaient à côté de leurs parents sur le sol d'une salle de classe. L'armée israélienne a émis l'hypothèse de tirs du Hamas et répété son accusation selon laquelle le mouvement palestinien se servirait des civils comme boucliers humains.
La population civile au bord du gouffre Les Palestiniens dans la bande de Gaza sont au bord du gouffre, a déclaré Pierre Krähenbühl, le chef de l'agence de l'ONU pour l'aide aux réfugiés palestiniens (UNRWA) devant le Conseil de sécurité des Nations Unies. S'exprimant par audioconférence depuis Gaza, il a appelé solennellement le Conseil et la communauté internationale à prendre les mesures nécessaires pour faire face à cette situation extrême. Je pense que la population (à Gaza) est au bord du gouffre, a-t-il affirmé. M. Krähenbühl a indiqué qu'avec quelque 220 000 Palestiniens désormais réfugiés dans les installations de l'ONU à Gaza, les conditions de vie dans ces refuges sont de plus en plus précaires, soulignant le manque de moyens sanitaires et le risque de maladies. Des milliers de femmes réfugiées dans nos écoles sont enceintes, a-t-il notamment indiqué. Il a dit craindre un nouvel afflux de civils dans des refuges de l'ONU déjà surpeuplés après de récents appels lancés par Israël aux civils à quitter leurs domiciles. Nous avons atteint les limites de nos capacités d'accueil, a-t-il averti. Appelant toutes les parties à respecter l'inviolabilité des installations de l'ONU, le patron de l'UNRWA a réclamé un cessez-le-feu immédiat et sans condition. Mais il a aussi estimé que le blocus illégal de Gaza doit être levé si on ne veut pas que la bande de Gaza devienne un endroit invivable dans quelques années. M. Krähenbühl a réitéré sa condamnation ferme de l'attaque mercredi contre une école de l'ONU à Gaza, demandant une enquête transparente de la part du gouvernement israélien. S'exprimant devant le Conseil par vidéo-conférence, la patronne des opérations humanitaires de l'ONU Valérie Amos a réclamé de nouvelles pauses humanitaires, quotidiennes, prévisibles et assez longues pour permettre de secourir la population de Gaza en attendant un hypothétique cessez-le-feu. Elle a aussi demandé aux donateurs une augmentation urgente du financement de l'assistance internationale à Gaza. Mme Amos a rappelé aux belligérants qu'ils avaient l'obligation absolue de protéger les civils d'attaques directes ou aveugles et d'épargner les travailleurs et les installations humanitaires. La guerre elle-même est soumise à des règles, a-t-elle affirmé. Mais la réalité à Gaza aujourd'hui est qu'aucun endroit n'est sûr, a-t-elle ajouté, soulignant que 103 installations de l'ONU à Gaza avaient été la cible d'attaques depuis le début du conflit. S'adressant à la presse, le représentant palestinien à l'ONU Ryad Mansour a déploré que la communauté internationale ait failli à ses obligations envers les Palestiniens de Gaza et il a réclamé une nouvelle fois une résolution du Conseil condamnant l'offensive israélienne. Ce génocide doit être stoppé immédiatement, a-t-il affirmé en dénonçant le régime et le gouvernement criminels d'Israël. L'ambassadeur israélien Ron Prosor a quant à lui montré aux journalistes une photographie aérienne censée prouver que les combattants du Hamas utilisent leur propre population comme des boucliers humains en plaçant des rampes de lancement de roquettes à quelques dizaines de mètres d'écoles primaires. Aucun soldat israélien ne vise délibérément des civils, a-t-il affirmé, déplorant que la communauté internationale soit prompte à condamner Israël et lente à condamner le Hamas.
L'armée israélienne mobilise 16 000 réservistes supplémentaires L'armée israélienne a mobilisé 16 000 réservistes supplémentaires portant leur nombre à 86 000 à la suite de la poursuite de l'opération menée dans le bande de Gaza depuis le 8 juillet, a annoncé une porte-parole militaire. L'armée a émis 16 000 ordres de mobilisation supplémentaires afin de permettre aux troupes sur le terrain de se rafraîchir, ce qui a porté le total des effectifs de réservistes à 86 000, a précisé la porte-parole. Le cabinet de sécurité réuni mercredi pendant cinq heures a décidé à l'unanimité de poursuivre les attaques contre les cibles terroristes du Hamas et les opérations menées en vue de neutraliser les tunnels creusés par le mouvement islamiste entre la bande Gaza et le territoires israélien, a indiqué la radio publique. Une nouvelle réunion du cabinet de sécurité, qui comprend 8 ministres, est prévue jeudi après-midi, a ajouté la radio. Cité par la radio, un général en charge du secteur de Gaza a expliqué que la destruction des tunnels était une question de jours.
Les Etats-Unis fournissent l'armée israélienne en munitions Les Etats-Unis ont confirmé avoir autorisé Israël à puiser dans des stocks de munitions américains au cours de la semaine écoulée pour poursuivre les raids à Gaza. Ils ont notamment fourni à l'armée israélienne des grenades et des obus de mortier. Ces munitions sont entreposées en territoire israélien dans le cadre d'un programme de l'armée américaine appelé "War Reserves Stock Allies-Israel" (WRSA-I), dont le principe est de stocker des munitions en Israël, à l'usage des Américains, munitions auxquelles les Israéliens peuvent cependant avoir accès dans des situations d'exception. Israël n'a toutefois pas invoqué de situation d'urgence particulière lorsqu'elle a présenté sa dernière demande en date, voici une dizaine de jours, a dit un responsable de la Défense, sous le sceau de l'anonymat.
Intérêts américains Washington a malgré tout permis aux Israéliens de puiser dans ces stocks stratégiques pour se fournir en grenades de 40 mm et en obus de mortier de 120 mm, a précisé le responsable. "Les Etats-Unis se sont engagés à garantir la sécurité d'Israël, et il est crucial pour les intérêts nationaux américains d'aider Israël à développer et à maintenir une capacité d'autodéfense forte et réactive", a déclaré John Kirby, un porte-parole du Pentagone, dans un communiqué. "Cette vente d'armement est cohérente avec ces objectifs", a-t-il estimé. De leur côté, les membres du Congrès américain s'employaient mercredi à débloquer plusieurs millions de dollars de financements supplémentaires pour le bouclier antimissile israélien "Dôme de fer", qui a intercepté nombre de roquettes palestiniennes depuis le début du conflit.