Le groupe nucléaire français Areva a abaissé cette semaine ses perspectives pour 2014 après un premier semestre dans le rouge en raison de lourdes pertes dans les énergies renouvelables et de difficultés persistantes sur le marché nucléaire, ce qui lui vaut une sanction sévère en Bourse. Le titre décrochait de 18,29% à 12,71 euros, signant la deuxième plus forte baisse d'un SBF 120 en repli de 1,18%. Le groupe nucléaire français a essuyé une perte de 694 millions d'euros au premier semestre, alors que le résultat net était à l'équilibre un an plus tôt, pour une perte opérationnelle de 305 millions d'euros (+290 millions au premier semestre 2013). L'excédent brut d'exploitation (Ebitda) a chuté de 53% à 226 millions d'euros, ce qui donne une marge de 5,8%. Ce taux de rentabilité devrait se situer à environ 7% sur l'année, contre 11% attendus précédemment. C'est la conséquence des pertes enregistrées dans les activités renouvelables, de provisions complémentaires liées à des projets, de dépréciations d'actifs et d'une conjoncture du marché nucléaire encore dégradée, a expliqué le président du directoire du groupe, Luc Oursel, dans un communiqué. Le chiffre d'affaires a reculé de 12,3%, à 3,9 milliards d'euros à périmètre et changes constants, et son repli devrait atteindre 10% cette année, contre une baisse de 2 à 5% anticipée auparavant. Comme prévu 2014 sera une année difficile, a remarqué un analyste parisien. Le groupe, détenu à 87% par des capitaux publics, pâtit notamment de la détérioration de la situation des électriciens occidentaux ainsi que des prix bas de l'uranium et du repli des ventes de nouveaux réacteurs depuis la catastrophe de Fukushima, au Japon en 2011. Il note ainsi un décalage dans le lancement des opérations de grand carénage dans le parc nucléaire français et de projets de construction de nouvelles centrales à l'étranger, ainsi qu'une conjoncture de marché plus difficile qu'anticipée dans les activités services à la base installée.
Pas à quelques années près Luc Oursel a nuancé aussi l'objectif de vendre 10 réacteurs EPR d'ici à 2016, qu'il avait fixé lui-même à son arrivée à la tête du groupe en 2011. Nous ne sommes pas à quelques années près pour l'atteinte de cet objectif de prises de commandes, a-t-il dit lors d'une conférence téléphonique. Les perspectives d'appels d'offres qui existent aujourd'hui au niveau international, en dehors de l'Europe, nous laissent à penser que cet objectif, à quelques années près, est toujours pertinent. Les énergies renouvelables sont aussi à la peine, avec une perte de 373 millions d'euros dans les activités cédées ou arrêtées. Areva a placé ses activités dans l'éolien en mer dans une nouvelle coentreprise mise sur pied début juillet avec l'espagnol Gamesa, et il entend désormais arrêter ses activités dans le solaire à concentration, déficitaires, à l'issue des projets en cours en Inde et en Australie. Cet arrêt, évidemment, sera effectué sauf si nous recevons d'ici là un proposition de reprise complète à court terme, a déclaré M. Oursel, rappelant la stratégie de partenariat que souhaite développer Areva dans ce secteur, pour partager les coûts de développement. Indicateur de performance privilégié par le groupe, le cash-flow opérationnel libre avant impôts est désormais attendu proche de l'équilibre, contre positif auparavant. Il devrait également rester proche de l'équilibre en 2015, alors qu'il aurait dû croître de manière significative, avant de devenir nettement positif en 2016. Les efforts sont renforcés pour préserver la rentabilité et la génération de cash à horizon 2015-2016, via une accélération des réductions de coûts et des investissements, a noté l'analyste. Areva a dit avoir sécurisé un objectif d'un milliard d'économies l'an prochain, qui sera relevé à 1,2 milliard en 2016. Le géant de l'atome entend notamment amplifier les suppressions d'emplois en Allemagne à 1.500 d'ici en 2015, contre 1 200 à 1 500 auparavant, et supprimer 200 postes aux Etats-Unis cette année, a détaillé Luc Oursel. En France, les recrutements externes seront freinés de façon significative au deuxième semestre de 2014. Les investissements bruts ont eux été ramenés à 1,1 milliard d'euros cette année, et passeront sous cette barre annuelle en 2015 et 2016. Le carnet de commandes d'Areva a cependant été renforcé à 44,9 milliards d'euros au premier semestre, contre 42,7 milliards un an plus tôt, grâce à un contrat de 6,5 milliards d'euros conclu avec EDF pour le traitement et le recyclage des combustibles nucléaires usagés pour la période 2013-2020.