L'ex-dirigeant de Ioukos et chef du mouvement Russie ouverte Mikhaïl Khodorkovski, gracié par le président russe Vladimir Poutine après avoir passé 10 ans en prison, n'écarte pas la possibilité d'accéder au sommet de l'Etat en cas de changement de pouvoir en Russie, a écrit hier le quotidien russe Novye Izvestia. Résidant aujourd'hui à Zurich, en Suisse, Khodorkovski est très actif dans l'espace médiatique et sur les réseaux sociaux. Dans ses interviews accordées aux médias russes et étrangers, il ne partage pas seulement ses souvenirs sur les années passées en détention, mais il livre également des pronostics sur l'évolution de la Russie. En particulier, l'ex-oligarque prédit prochainement un changement de pouvoir en Russie. Selon lui, une "révolution de palais" serait préférable à une révolution impliquant des affrontements de rue. En développant cette idée, il appelle l'opposition et le gouvernement à dialoguer pour solidifier la paix civile et empêcher l'effusion de sang. En évoquant ses perspectives personnelles dans une interview avec le rédacteur en chef de la radio Echo de Moscou Alexeï Venediktov, Khodorkovski s'est dit prêt à prendre la tête d'un gouvernement de transition en Russie. D'après lui, un tel cabinet pourrait fonctionner pendant deux ou trois ans jusqu'à l'organisation d'élections libres. L'ex-détenu a suggéré au président actuel de quitter son poste de son propre gré, même s'il a reconnu partager la vision de Vladimir Poutine sur l'avenir de la Russie en tant qu'Etat-nation avec une économie forte. Cependant, il rejette la variante de reconstruction d'un empire. Khodorkovski admet également la possibilité de former une coalition avec certains représentants du gouvernement actuel s'il arrivait au pouvoir. L'ancien membre du Conseil de coordination d'opposition Guennadi Goudkov, privé de son mandat de député, est persuadé que Khodorkovski convient mieux que personne au rôle de président de transition. Le politologue Dmitri Orechkine, par contre, appelle à ne pas surestimer le niveau d'autorité morale de Khodorkovski. "Elle n'est pas très grande et ne s'étend que sur un cercle réduit d'individus. La majorité se méfie de cet oligarque qui a fait de la prison. Mais il souhaite étendre son influence, il cherche à rester constamment sous le feu des projecteurs. Qu'il soit à l'étranger est un inconvénient. Mais Khodorkovski dit des choses relativement claires, les gens rationnels l'écoutent", déclare l'expert. Selon lui, l'oligarque déchu se positionne correctement: pas comme une alternative au pouvoir, mais comme un gestionnaire de crise. Et dans un certain concours de circonstances, sa figure pourrait être perçue par l'opinion publique comme une garantie de transformations démocratiques.