Les députés allemands ont levé vendredi le dernier blocage aux aides internationales qui doivent accorder un répit à la Grèce. Malgré leur scepticisme à l'égard du nouveau gouvernement grec, ils ont approuvé une extension de quatre mois de cette aide, décidée mardi par les Européens. Le prolongement jusqu'au 30 juin du programme d'aides a été approuvé par 541 voix contre 32. Aucun plan d'aide à un autre pays de l'Union européenne n'avait obtenu une telle majorité. Treize députés ont voté blanc. Les voix critiques sont essentiellement issues des rangs conservateurs. Certains députés avaient dit ressentir "des maux de ventre" à l'idée de devoir soutenir le gouvernement d'Alexis Tsipras, élu fin janvier sur la promesse de porter un coup d'arrêt à la politique d'austérité défendue par l'Allemagne.
Décision difficile Lors d'un vibrant plaidoyer pro-européen avant le vote, le ministre des Finances Wolfgang Schäuble avait exhorté les députés à donner leur aval, tout en reconnaissant qu'il s'agissait d'une décision difficile. Un refus "causerait trop de dégâts à notre peuple et à notre avenir", a-t-il dit. "Nous Allemands, devons agir sans relâche pour assurer la cohésion de l'Europe", a-t-il ajouté. "Il n'est pas question d'accorder de nouveaux milliards à la Grèce, ni de changer quoi que ce soit à ce programme. Il s'agit de donner ou d'accorder plus de temps pour achever ce programme avec succès", a-t-il plaidé, répondant indirectement au quotidien populaire "Bild" qui titrait jeudi: "Nein! Plus de milliards pour les Grecs cupides!". Dans une interview à une radio allemande, le commissaire européen aux Affaires économiques Pierre Moscovici a de son côté enjoint Athènes à "respecter ses obligations envers ses partenaires européens et le Fonds monétaire international" (FMI). Bras de fer Le Bundestag était le seul Parlement en Europe appelé à se prononcer sur cet accord. Les élus devaient dire s'ils approuvaient ou non l'extension de quatre mois d'un programme européen pour la Grèce, adopté en 2012 et qui prévoit 140 milliards d'euros d'aides sous forme de prêts. Ce programme devait expirer ce vendredi à minuit. Cette extension avait été arrachée mardi à l'issue d'un intense bras de fer entre Berlin et Athènes, au cours duquel le ton est monté très haut, notamment entre M. Schäuble et son homologue grec Yanis Varoufakis. Le gouvernement d'Alexis Tsipras s'était finalement engagé à poursuivre ses réformes et les mesures d'économie.
Tsipras promet de travailler dur Le Premier ministre grec Alexis Tsipras s'est félicité du vote des députés allemands sur l'extension du plan d'aide à la Grèce et a promis de travailler dur pour changer la Grèce, dans une interview à la chaîne de télévision Euronews. Nous commençons à travailler dur pour changer la Grèce, dans une Europe qui change, a déclaré M. Tsipras, chef du parti de gauche radicale Syriza, en soulignant que le vote du Parlement allemand (était) un vote de confiance de Berlin dans l'Europe. L'heure est arrivée pour des réformes dont le pays a besoin et qu'aucun gouvernement n'a cherché à faire. Malgré la ligne intransigeante adoptée par Berlin, soutenu par le nord de l'Europe mais aussi par certains pays du Sud confrontés à l'austérité, 541 députés (sur 587) ont dit oui à un prolongement du programme d'aides jusqu'au 30 juin, selon un comptage définitif du Bundestag (chambre basse du Parlement). Le vote allemand a prouvé que l'Europe peut aller d'avant, quand il y a une volonté politique, qu'elle peut surmonter les impasses et chercher des voies de substitution vers les politiques de croissance et accorder la priorité à l'avenir des peuples européens, a souligné M. Tsipras à Euronews. L'Europe a reconnu que la Grèce avait tourné la page, a dit le Premier ministre grec, qui a remporté les élections législatives le 25 janvier en prônant la fin de l'austérité.
Pas de troisième plan d'aide Le Premier ministre a, en outre, démenti que son pays aurait à demander un troisième plan d'aide internationale à la fin de la prolongation de quatre mois du programme en cours. Il a également annoncé un premier train de lois pour la semaine prochaine. Dans un discours télévisé au conseil des ministres, il a également déclaré que le gouvernement grec avait demandé une réduction de la dette du pays, bien que ses créanciers de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI) insistent sur la nécessité pour la Grèce de respecter la totalité de ses engagements. "Certains ont parié sur un troisième plan d'aide, sur la possibilité d'un troisième plan d'aide en juin. Je suis tout à fait désolé mais encore une fois, nous allons les décevoir. Qu'ils oublient toute idée d'un troisième plan d'aide. Le peuple grec a mis fin aux plans d'aide avec son vote", a-t-il dit. La Grèce a déjà obtenu deux programmes d'aide internationale d'un montant total de 240 milliards d'euros, en contrepartie de réformes et de l'austérité budgétaire.
Projets de loi Le premier projet de loi du gouvernement sera en outre déposé la semaine prochaine. Il comprendra des mesures sociales pour faire face "à la crise humanitaire", qu'a subie le pays en raison de cette politique drastique d'austérité, a annoncé M. Tsipras. Ces mesures, qui constituent la base du programme de Syriza, concernent "la fourniture gratuite de courant électrique à 300 000 familles" ainsi qu'un programme de logement pour 30 000 personnes", a expliqué Alexis Tsipras, ainsi qu'un plan d'étalement des dettes des particuliers et des entreprises envers l'Etat. Le Premier ministre a également annoncé l'introduction la semaine prochaine d'un deuxième projet de loi visant "à protéger le logement des centaines de milliers des citoyens qui risquent de perdre leur maison" en raison de la crise. Jeudi doit également être voté un projet de loi visant à réintroduire l'ancienne télévision publique ERT, remplacée depuis par la chaîne Nerit, avec cinq fois moins d'employés.