Le spécialiste français du nucléaire Areva doit expliquer mercredi comment il compte redresser la barre après avoir accusé près de 5 milliards de pertes en 2014 et les syndicats craignent un impact social sans précédent pour le groupe public. Areva a devancé la semaine dernière la publication de ses résultats annuels en annonçant une perte nette record de 4,9 milliards d'euros, un montant supérieur à sa valeur en Bourse (3,7 milliards), conséquence de nouvelles provisions et de la dépréciation de certains actifs. Le chiffre est encore provisoire - il sera confirmé mercredi -, mais il laisse augurer de l'ampleur des mesures à venir pour restaurer la compétitivité et les moyens financiers du groupe. Le chiffre d'affaires 2014, publié début février, a lui reculé de 8% à 8,34 milliards d'euros. Marché du nucléaire à la peine depuis Fukushima, retards à répétition sur les chantiers des réacteurs de troisième génération EPR, manque de compétitivité... Les facteurs à l'origine de ce gouffre financier sont identifiés, reste à trouver la parade pour l'avenir. Selon des informations de presse, Areva pourrait céder certains de ses actifs, totalement ou en partie, pour plus d'un milliard d'euros. Seraient étudiées, des cessions dans les mines d'uranium, la logistique ou encore l'activité de démantèlement de sites nucléaires. Un plan d'économies de grande ampleur est aussi à attendre. Pour réduire ses coûts, le groupe aurait deux leviers majeurs: sa politique d'achats et ses frais de personnel. Areva comptait 45 340 collaborateurs, fin 2013, dont les deux tiers en France. Des suppressions d'emplois dans l'Hexagone seraient une première dans le groupe, détenu à plus de 87% par des capitaux publics. S'il faudra attendre quelques semaines voire quelques mois pour en avoir le chiffrage, les syndicats d'Areva disent déjà redouter un impact social sans précédent et déplorent que les salariés fassent les frais d'un naufrage dans lequel ils estiment n'avoir aucune responsabilité.
Travailler en meilleure intelligence Le groupe, dirigé depuis début janvier par le tandem Philippe Varin-Philippe Knoche, devra aussi trouver les moyens de renflouer ses caisses, par une augmentation de capital par exemple. Areva est en effet dans le rouge depuis quatre années consécutives, et la perte annoncée pour 2014 représente près des trois quarts de ses capitaux propres (6,6 milliards d'euros à fin 2013). Mais le gouvernement ne mettra pas la main à la poche dans l'immédiat, a averti le ministre de l'Economie Emmanuel Macron. Ce n'est pas la priorité. Areva a aujourd'hui beaucoup à faire par elle-même, a déclaré le ministre mardi dernier. Quant à une prise de participation d'EDF ou de GDF Suez dans certains actifs du groupe, l'hypothèse n'est pas sur la table, a affirmé le ministre. Sur le plan industriel, la ministre de l'Energie Ségolène Royal a dit vouloir mettre en place une stratégie de convergence entre les entreprises du nucléaire, Areva, EDF et le CEA, pour qu'il y ait un projet industriel qui justifiera des décisions financières. Les équipes d'EDF et d'Areva ont, depuis quelques mois, engagé des chantiers d'amélioration de (leur) efficacité opérationnelle (...) de façon à travailler en meilleure intelligence et à coopérer sans aucune arrière-pensée, déclarait aussi récemment Jean-Bernard Lévy, P-DG de l'électricien public. Ils concernent les chantiers en cours, (EPR de Flamanville, maintenance du parc nucléaire, etc.), la conception de réacteurs neufs et le cycle du combustible, notamment la conversion d'uranium, a-t-il détaillé. Le groupe devra aussi dire s'il confirme son choix du modèle intégré - allant de l'extraction d'uranium au traitement des déchets issus des centrales nucléaires - promu par Anne Lauvergeon (présidente de 2001 à 2011) et repris par son successeur Luc Oursel, mais critiqué notamment en mai par la Cour des comptes dans un rapport préliminaire.