Les cours du pétrole ont baissé à New York et ont stagné à Londres jeudi, dans un marché qui ne parvenait manifestement pas à se décider sur l'interprétation à donner des derniers éléments en date sur l'offre mondiale. Le prix du baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en avril a perdu 77 cents à 50,76 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), à l'issue d'une séance erratique qui l'a vu un temps repasser dans le vert. A Londres, le Brent valait 60,48 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE), en baisse de sept cents par rapport à sa clôture de mercredi. "Encore une fois, on voit le marché se mettre à douter de l'arrivée prochaine d'un fort déclin de la production, que certains attendaient", a jugé Bart Melek, de Commodity Strategy TD Securities. En ce sens, "les chiffres d'hier sur les réserves américaines ont eu un effet à retardement" sur les cours du WTI, après une hausse d'environ un dollar mercredi, a-t-il estimé. Les stocks de pétrole brut ont progressé beaucoup plus que prévu la semaine dernière aux Etats-Unis, gagnant plus de dix millions de barils et continuant à évoluer à un niveau sans précédent depuis 84 ans, selon des chiffres publiés par le département américain de l'Energie (DoE). Dans ce contexte, les investisseurs attendent pour vendredi le décompte hebdomadaire des puits de forage en activité aux Etats-Unis, établi par le groupe Baker Hughes. Le chiffre baisse systématiquement depuis plusieurs semaines, mais a récemment ralenti son déclin. "Certains s'attachent à l'idée que la baisse du nombre de puits veut dire que la production va vite reculer, mais je n'y crois pas, du moins pour les six prochains mois", a jugé Bart Melek.
Soutien de la Libye "Je ne connais absolument personne qui ait jamais laissé entendre que le déclin du nombre de puits et des investissements allait ralentir la production à court terme", a rapporté Phil Flynn, de Price Futures Group. "Non, ce qui devrait se passer, c'est que la production va ralentir sa hausse dans quelques mois, puis entamer un inévitable déclin à la fin de l'année, ou d'ici l'an prochain", a-t-il prévu. "A ce moment, la demande devrait avoir augmenté, notamment grâce à l'action des banques centrales mondiales." Sur ce plan, certains observateurs attendent des effets positifs du soutien à l'économie prévu par la Banque centrale européenne (BCE), qui a précisé que son programme de rachats d'actifs commencerait lundi. A ce sujet, "le marché pourrait aussi être soutenu par le fait que la BCE a révisé en hausse ses prévisions de croissance pour la zone euro", a jugé Tim Evans de Citi. Au niveau international, les cours, en premier lieu ceux du Brent, trouvent aussi du soutien dans les affrontements en Libye, qui ont poussé la Compagnie nationale libyenne de pétrole (NOC) à déclarer "l'état de force majeure" dans 11 champs pétroliers. En invoquant cette clause, la Libye ne se trouve plus dans l'obligation de remplir sa part des contrats de livraison pour les champs pétroliers de Al-Mabrouk, Al-Bahi, Al-Dahra, Al-Joufra, Tibesti, Al-Ghani, Al-Samah, Al-Baïda, Al-Waha, Al-Dafa, Al-Naqa. "Reste à savoir si cela annonce une nouvelle chute de la production et non seulement une reconnaissance officielle de la situation", a nuancé Tim Evans. Enfin, le marché s'interroge sur les conséquences des négociations diplomatiques entre les grandes puissances et l'Iran, à qui une levée des sanctions permettrait de fournir encore plus de pétrole au marché mondial. "On semble encore loin de trouver un accord à l'issue de négociations avec les Occidentaux pour limiter le programme nucléaire iranien, même si de nouvelles discussions sont prévues le 15 mars", a noté Matt Smith, de Schneider Electric. En Asie, les cours du pétrole restaient en hausse dans les échanges matinaux malgré un nouveau gonflement substantiel des stocks de brut aux Etats-Unis et la remise en route progressive des raffineries américaines qui pèse sur le marché newyorkais. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en avril s'appréciait de 29 cents, à 51,82 dollars, tandis que le baril de Brent de la mer du Nord prenait six cents, à 60,61 dollars. Au plan géopolitique, Sanjeev Gupta, responsable des hydrocarbures chez EY, a indiqué que le marché suivait les négociations entre les Etats-Unis et l'Iran, également producteur de pétrole, sur le programme nucléaire de Téhéran. "Toute information positive sur l'hypothèse d'une levée des sanctions (américaines contre l'Iran) entraîne les prix du Brent vers le bas", selon lui.