La Réserve fédérale américaine (Fed) va prendre le pouls de l'économie américaine lors d'une réunion de son Comité monétaire mardi et mercredi pour évaluer quand une première hausse des taux d'intérêt est possible en 2015. Lors de sa dernière réunion en mars, le Comité de politique monétaire (FOMC) s'était montré divisé, plusieurs membres plaidant pour une hausse des taux dès juin, les autres pour plus tard. Mais depuis, les baromètres de l'activité au 1er trimestre n'ont pas été au plus beau même si la croissance se poursuit. Il s'agit de déterminer si l'hiver exceptionnellement rigoureux, la hausse du dollar et l'effet des bas prix du pétrole sur le secteur énergétique ne sont que les facteurs temporaires du ralentissement de l'expansion au début de l'année. "On s'attend à ce que la croissance du PIB ait ralenti fortement au 1er trimestre, glissant de 2,2% à la fin de l'année à environ 1%", affirme Chris Williamson, économiste en chef de Markit. Le gouvernement publie mercredi sa première estimation de la croissance, le jour même où le Comité monétaire conclut sa réunion et publie son communiqué. Il n'y a pas de conférence de presse prévue pour la présidente Janet Yellen ni de nouvelles projections économiques. La banque centrale devrait donc maintenir ses taux directeurs proches de zéro comme ils le sont depuis fin 2008. Peu de changements également sont attendus dans le communiqué, affirme Vasileios Gkionakis d'UniCredit Research, qui croit néanmoins qu'il y a "des chances que la Fed affiche un ton plus +colombe+ en dégradant son évaluation de la croissance". En penchant ainsi du côté des "colombes", ce message signifierait qu'une politique monétaire très accommodante pourrait être nécessaire un peu plus longtemps. "Nous doutons maintenant que la Fed prenne le risque de rehausser ses taux dès juin", affirment les économistes de Capital Economics, jusque-là persuadés qu'un relèvement se profilait au milieu de l'année.
Facteurs temporaires L'hiver particulièrement froid, notamment dans l'est industriel du pays, a ralenti le secteur manufacturier au début de l'année. Les créations d'emplois ont fortement déçu en mars. A cela, il faut ajouter l'appréciation du billet vert qui va coûter 0,6 point de croissance au PIB américain cette année, en renchérissant les exportations, selon l'estimation de William Dudley, le président de la Fed de New York. Quant au grand boost de la consommation que devait assurer la chute des prix des carburants, on l'attend encore. Jack Lew, le secrétaire américain au Trésor, s'en est même étonné récemment. "Ce que font les consommateurs de cet argent est un peu une énigme pour l'instant", a-t-il admis sur la chaîne CNBC. Sur le plan de l'économie mondiale, le risque grec plane toujours sans que la Fed ne le nomme jamais si ce n'est en se disant vigilante vis-à-vis "des développements internationaux". "Si un défaut de paiement" de la Grèce "secouait les marchés financiers, il est peu probable que la Fed aggrave la volatilité en relevant les taux", suggère Paul Ashworth de Capital Economics. "Un tableau obscur de l'économie n'est pas une circonstance idéale pour prendre une décision majeure de politique monétaire", résumait un autre membre du FOMC, Dennis Lockhart, de la Fed d'Atlanta. Tous, néanmoins, restent confiants quant au fait que ces facteurs de ralentissement sont temporaires et que la croissance va accélérer avec le printemps. Car la Fed veut "normaliser" à terme sa politique monétaire, retrouver un taux d'intérêt qu'elle puisse manoeuvrer à la hausse ou à la baisse suivant l'évolution de l'inflation et du chômage. "Ce serait bien de revenir à la normale", notait Alice Rivlin, ancienne vice-présidente de la Fed, sur le blog économique MarketWatch vendredi. "Mais relever les taux face à une lente croissance sans inflation, c'est un peu difficile à justifier. Je ne sais pas ce qu'ils vont faire", ajoutait l'économiste de 84 ans.