Faisant partie de l'ordre du sacré, le soufisme est en train de gagner non seulement du terrain, mais, aussi, d'être exploré par les chercheurs et spécialistes depuis déjà le début du xxe siècle. Les chercheurs l'approchent comme étant “ un fait social ” qui a gagné, actuellement, toute la planète, même les “ Incas avec leur yeux bridés ” a soutenu Slimane Hachi, directeur du Centre de recherche (CNRPAH). Les conservateurs soufis rechignent à ce que ce “ comportement sacré ”, plutôt divin, soit approché comme un cas d'étude. Les chercheurs eux, jugent, qu'ils approchent l'homme dans sa façon d'aimer Dieu, L'Un, l'Unique, et non pas le Dieu lui-même. Le débat, fort intéressant, a été ouvert, samedi dernier, dans la ville de Béjaïa, à l'occasion d'un colloque international sur la question. Des chercheurs, des adeptes, des tariqates, ont pris part à ce grand débat, troisième du genre, qui se tient dans une cité qui a un rapport avec le soufisme, du fait qu'il y a eu le passage du saint Si Abdelkader El Djilali, et la sainte protectrice qui veille sur la ville, Yama Gouraya. Qu'est ce que le soufisme ? Très complexes ont été les définitions des soufis. Mais le tassawuf, est, selon les spécialistes tout ce qui est essentiel en Islam, donc peut-être ramené au Coran ou au hadith. La référence culturelle c'est tout simplement le hadith sur l'ihsan : an ta'abuda Allaha Kaanaka tarahu. Cette phrase du Prophète, est donc fondamentale dans le sens où elle exprime la nécessité “ d'adorer Dieu comme si on le voyait ”. Cette réponse que fait le Prophète à Seyiduna Jibril (archange Gabriel) signifie bien qu'il y a des êtres qui se comportent “ comme s'ils voyaient Dieu ”. Plus qu'une branche perfectionniste de l'islam, le soufisme, est, en fait,l'aspect ésotérique de l'islam, la doctrine traditionnelle en étant l'aspect exotérique. Le mot soufisme, vient de l'arabe tassawuf. Certains l'expliquent littéralement par la pratique des mystiques qui portent des vêtements de laine (souf). D'autres disent que le soufisme a été forgé à partir du mot el-soufiya qui désigne en arabe l'homme qui a réalisé pleinement sa spiritualité et qu'on pourrait appeler aussi saint. Tous les gens faisant partie du tassawuf ne sont pas des soufis mais des “ aspirants ” à la voie spirituelle, guidés par des soufis, ou encore des maîtres spirituels. Le tassawuf, cœur de l'Islam, est l'islam vécu dans sa plénitude. Il correspond au degré de l'excellence de la foi et du comportement (al-ihsân) qui, par la purification du cœur, conduit à la sincérité spirituelle (ikhlâs) permettant d'accueillir la Lumière divine, par laquelle on connaît, par laquelle on voit.
Histoire du soufisme Selon certains chercheurs, l'histoire du Soufisme aurait débuté avec Mohamed. Pour s'en convaincre, ils rappellent qu'au 8e siècle, quelques mystiques islamistes ont conseillé le célibat, le végétarisme, la mendicité, l'absence d'activité régulière, s'en remettant à Dieu pour la subsistance. Les premiers soufis ont été influencés par les pratiques de moines chrétiens, de zoroastriens et d'hindous. Hassan al-Basri (642-728) a été le premier chef soufi. Ses disciples ont permis au soufisme de prendre de l'ampleur au 9e siècle en Irak, dans les cercles mystiques de Bassora et Baghdad avec al-Muhasidi (781-857). La recherche de l'union avec Dieu a pris un tournant dramatique avec le soufi al-Halladj : quand il a déclaré, “ Je suis devenu celui que j'aime (Dieu) ”. Les théologiens musulmans ont pu le faire emprisonner et finalement exécuter pour hérésie. Progressivement, le courant soufi s'est rapproché de l'islam traditionnel, et de marginal, il est passé au 12e siècle au stade de confréries. Le grand théologien musulman Muhammad al-ghazali (1058-1111) s'est converti au soufisme et a travaillé au rapprochement avec les musulmans orthodoxes. Au 13e siècle, le soufisme a permis à l'islam de se répandre. Le poète Djalal al-Din Rumi (1207-1273), aussi appelé Mevina Jeladuddin Rumi, ou encore Mevlana) a écrit un immense poème, le Miaenavi, véritable traité mystique sur les relations entre le “ moi ” et le Dieu unique. Il a fondé, aussi, la confrérie des derviches tourneurs trouvant l'extase dans une certaine pratique de la danse. Et sa pratique, c'est donc la contemplation, est la Connaissance, qui permet d'atteindre Dieu: “ Qui se connaît soi-même connaît son Seigneur ”.