Les cours du pétrole poursuivaient leur baisse hier matin en Asie, les espoirs des investisseurs étant douchés par les réticences saoudiennes et iraniennes quant à une réduction de la production pour rééquilibrer le marché. Les investisseurs sont également prudents dans l'attente de la publication mercredi des données sur l'état des stocks de brut américains, qui augmentent depuis des semaines, témoignant de la faiblesse de la demande chez le premier consommateur mondial de brut. Dans les échanges électroniques en Asie, le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en avril reculait de 56 cents à 31,21 dollars vers 03H00 GMT. Le baril de Brent de la mer du Nord, la référence européenne du brut, pour livraison en avril, cédait quant à lui 33 cents à 32,94 dollars. Nous pensons iné- vitable que les cours redescendent bientôt sous le seuil des 30 dollars car l'offre continue de dépasser la demande et le niveau des stocks est élevé, a déclaré Jason Wong, analyste à la Bank of New Zealand, cité par l'agence financière Bloomberg. Bernard Aw, analyste chez IG Markets à Singapour, évoque une litanie de commentaires néfastes pour le brut. La veille, les cours du pétrole ont lourdement rechuté à New York dans un marché désespérant d'un prochain rééquilibrage de l'offre vu le manque d'esprit de coopération manifesté par des responsables saoudien et iranien. Le cours du baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en avril, dont c'était le premier jour d'utilisation comme contrat de référence, a perdu 1,52 dollar à 31,87 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), alors que la veille le contrat pour livraison en mars s'était envolé de plus de 6%. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en avril a perdu 1,42 dollar à 33,27 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE). Hier nous étions montés indûment après un rapport de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) qui était juste moins négatif qu'attendu, et aujourd'hui on chute bien plus qu'on le devrait alors que (le ministre saoudien du Pétrole Ali) al- Naïmi a employé le même ton qu'on lui entend depuis un an, a résumé Matt Smith, chez ClipperData. Le ministre saoudien du Pétrole Ali al-Naïmi a déclaré mardi qu'il avait bon espoir qu'un accord soit trouvé le mois prochain avec non seulement la Russie,le Qatar et le Venezuela, mais aussi d'autres pays pour obtenir un gel de production permettant à terme de rééquilibrer le marché du pétrole - mais il a une nouvelle fois exclu l'hypothèse d'une réduction de la production. Mais son homologue iranien Bijan Namadar Zanganeh a de son côté rejeté l'idée même d'un gel de sa production, la qualifiant de plaisanterie. La tension monte au sein du cartel, commentait Jasper Lawler, analyste chez CMC Markets, et cela pèse sur les cours. Les projets de l'Iran d'accro ître sa production après la levée des sanctions internationales sont une épine dans le pied des autres pays producteurs qui semblent parvenir à un consensus sur le fait que la production doit (dans son ensemble) rester à son niveau actuel si on veut progressivement réduire les excé- dents, expliquait M. Lawler. Par ailleurs plusieurs analystes ont noté que le marché tablait sur l'annonce mercredi d'une nouvelle nette augmentation des stocks de brut aux Etats-Unis qui viendrait confirmer la surabondance de l'offre. Selon la prévision médiane des analystes sond és par l'agence Bloomberg, les stocks de brut devraient avoir grimpé de 3 millions de barils lors de la semaine achevée le 19 février, tandis que les réserves d'essence devraient avoir baissé de 1,25 million de barils et celles de produits distillés (dont le fioul de chauffage et le gazole) reculé de 1,15 million de barils. Mais, selon M. Smith, on a assisté à un rebond des importations la semaine dernière donc je crois que nous allons avoir une progression des stocks bien plus importante que le marché ne s'y attend. Une première estimation devait être fournie mardi soir par l'association professionnelle API, avant les chiffres du minist ère américain de l'énergie (DoE) mercredi à 15h30 GMT. Le DoE avait annoncé la semaine derni ère que les réserves américaines de brut avaient atteint leur plus haut niveau en plus de 85 ans. ENTRETIENS DU ROI D'ARABIE SAOUDITE AVEC LE PRESIDENT NIGERIAN Le roi Salmane d'Arabie saoudite et le président nigérian Muhammadu Buhari se sont engagés mardi à Ryad à travailler à la stabilisation du marché pétrolier mais le producteur africain n'a pas évoqué de gel de sa production. Les deux leaders "se sont engagés à faire tout ce qui est possible pour stabiliser le marché pétrolier et à favoriser une remontée des prix", indique un communiqué de la présidence nigériane. Le communiqué ne fait aucune mention d'un gel de la production du Nigeria, pourtant évoqué comme possible par des analystes pétroliers. Les deux chefs d'Etat se sont rencontrés à Ryad où M. Buhari est arrivé tard lundi au début d'une visite d'une semaine dans le Golfe qui doit le conduire aussi au Qatar. La présidence nigériane avait auparavant indiqué que la stabilisation des prix du pétrole devait "figurer en bonne place à l'ordre du jour des discussions entre le président Buhari et le souverain saoudien". La rencontre a porté sur les relations bilatérales et la situation régionale, s'est bornée à indiquer l'agence officielle saoudienne SPA. Le Nigeria souffre de la chute des prix du pétrole, qui a consid érablement réduit les revenus publics et affaibli la monnaie nationale, le naira, même si le président Buhari s'est pour l'instant refusé à dévaluer. Pour sa part, le ministre saoudien du Pétrole Ali al-Naïmi a déclaré qu'il avait bon espoir qu'un accord soit trouvé le mois prochain avec d'autres pays pour obtenir un gel de production permettant à terme de rééquilibrer le marché du pétrole. Quatre pays se sont mis d'accord, nous avons envoyé des émissaires dans d'autres pays, beaucoup de discussions sont en cours, et on espère qu'à un moment en mars il y aura une autre réunion et que d'autres seront d'accord pour geler leur production a déclaré M. al- Naïmi, intervenant lors de la conférence IHS CERAWeek retransmise sur internet. L'Arabie saoudite et la Russie --les deux premiers producteurs mondiaux de brut-- avaient propos é il y a une semaine, au terme d'une réunion à Doha avec le Qatar et le Venezuela, que tous les pays producteurs gèlent leur niveau de production à son niveau de janvier pour soutenir les prix. Si nous pouvons obtenir que tous les principaux producteurs se mettent d'accord pour ne pas mettre (sur le marché) de barils supplémentaires alors ces réserves importantes que nous avons actuellement finiront par décliner, a assuré M. al-Naïmi lors de la conférence organisée à Houston (Texas, sud). En revanche une réduction de la production ne va pas arriver parce qu'il n'y a pas beaucoup de pays qui vont la réaliser même s'ils disent qu'ils vont le faire (...) donc ce n'est pas la peine de gâcher notre temps à rechercher des baisses de production, a dit M. al-Naïmi, faisant écho au ministre saoudien du Pétrole Adel al-Jubeir, qui avait exclu cette option. Selon Ryad un gel est toutefois crédible: Il y a du bon sens et un besoin d'argent et ces deux choses vont mener, peut-être pas tous les pays mais la plupart des pays qui comptent, à geler leur production, y compris l'Iran, a semblé sous-entendre M. al- Naïmi en riant. Certains pays voisins, qui ont porté ces dernières années leur niveau de production à 10 millions de barils et en exportent autant, sont devenus arrogants et disent que tout le monde doit geler son niveau de production. C'est-à-dire qu'ils gèlent leur niveau à 10 millions de barils et nous (nos exportations) à un niveau d'un million de barils. C'est une plaisanterie, a déclaré M. Zanganeh, cité par des médias iraniens. Le porte-parole du gouvernement iranien Mohammad Bagher Nobakht a également reproché à certains pays membres de l'Opep de ne pas vouloir reconnaître le droit de l'Iran à reprendre ses parts de marché perdues à cause des sanctions internationales, leur demandant de baisser leur niveau de production. L'IRAN REFUSE LE GEL DE LA PRODUCTION Le ministre iranien du Pétrole, Bijan Namadar Zanganeh, a rejeté l'idée d'un gel du niveau de la production pétroli ère de l'Iran en la qualifiant de "plaisanterie", ont rapporté plusieurs médias iraniens. "Certains pays voisins, qui ont porté ces dernières années leur niveau de production à 10 millions de barils et en exportent autant, sont devenus arrogants et disent que tout le monde doit geler son niveau de production. C'est-à-dire qu'ils gèlent leur niveau à 10 millions de barils et nous (nos exportations) à un niveau d'un million de barils. C'est une plaisanterie", a déclaré M. Zanganeh. Mercredi dernier, après une réunion avec ses homologues irakien, vénézuélien et qatari à Téhéran, M. Zanganeh avait déclarait que l'Iran soutenait "toute mesure visant à stabiliser le marché et augmenter les prix". "Nous soutenons la décision qui a été prise (mardi dernier au Qatar, ndlr) pour que les membres de l'Opep et les pays non- Opep maintiennent leur plafond de production pour stabiliser le marché et augmenter les prix", avait déclaré M. Zanganeh. Il n'avait cependant pas pré- cisé si l'Iran allait continuer à augmenter sa production ni quel serait son plafond de production. Mardi, le porte-parole du gouvernement iranien Mohammad Bagher Nobakht a également reproché à certains pays membres de l'Opep de ne pas vouloir reconnaître le "droit de l'Iran" à reprendre ses parts de marché perdues à cause des sanctions internationales. "Ces pays doivent baisser leur niveau de production et permettre à l'Iran de revenir à un quota d'avant les sanctions", a-t-il déclaré. L'Iran reproche à l'Arabie saoudite d'avoir augmenté sa production après le durcissement des sanctions américaines et européennes contre Téhéran et pris des parts du marché. L'Iran veut aujourd'hui reprendre ses parts et refuse de geler sa production. Après la fin des sanctions internationales à la mi-janvier, l'Iran a annoncé une augmentation immédiate de sa production de 500 000 barils par jour et de 500 000 b/j supplémentaires d'ici fin 2016. Les prix du pétrole ont dégringolé de quelque 70 dollars depuis la mi-2014, passant de plus de 100 dollars à 30 dollars le baril actuellement.