Le chômage est reparti à la hausse en France en février pour atteindre 3,59 millions de demandeurs d'emploi sans aucune activité, soit une augmentation de 1,1% en un mois: une douche froide pour le gouvernement après la nette baisse enregistrée le mois précédent. Ironie du calendrier, ces chiffres tombent le jour de la présentation en Conseil des ministres du projet de loi travail, une réforme que l'exécutif présente comme une réponse au chômage de masse. En février, le nombre de demandeurs d'emploi sans activité a fortement augmenté, avec 38 400 nouveaux inscrits en métropole. Cette hausse brutale efface largement une baisse importante d'inscrits enregistrée en janvier par Pôle emploi: 27 900 personnes de moins que fin décembre 2015. Mais les services statistiques avaient alors évoqué des événements "inhabituels et inexpliqués" qui rendaient l'interprétation de la baisse difficile. Le bond enregistré en février, le plus fort depuis septembre 2013, s'explique "en grande partie" par l'entrée en catégorie A (sans aucune activité) de personnes "déjà inscrites à Pôle emploi mais qui exerçaient une activité (catégories B et C) les mois précédents", analyse la ministre de l'Emploi Myriam El Khomri dans un communiqué. Avec les demandeurs d'emploi ayant exercé une petite activité, Pôle emploi recensait fin février 5,46 millions d'inscrits (+3 100) en métropole, et 5,77 millions en incluant l'outre-mer, soit une hausse sur trois mois de 0,3%. La hausse est plus spectaculaire sur un an: 3,7% en métropole et 3,6% en France entière. Par rapport à janvier, les chiffres sont mauvais aussi bien en ce qui concerne les jeunes de moins de 25 ans (+0,5% en catégorie A) que les seniors (+0,9%). Pour les chômeurs de longue durée, la hausse, petite activité comprise, est de +0,3% sur un mois mais surtout +8,5% sur un an.
'Reprise timide de l'activité' Pour Mme El Khomri, ces mauvais chiffres obéissent à un "mouvement de hausses et de baisses observé depuis neuf mois, traduisant une reprise timide de l'activité économique". Depuis juin 2012, le nombre de chômeurs de catégorie A a augmenté de 647 400 en métropole. Mais l'année 2015 avait donné des signes d'amélioration : le chômage a connu sa plus faible hausse depuis 2010, et l'économie a créé plus de 82 000 emplois marchands, après en avoir détruit pendant trois ans. Et malgré un climat mondial morose, la croissance française devrait retrouver du tonus en 2016, selon l'Insee, grâce à un rebond de la consommation, des investissements soutenus et des exportations dynamiques. L'institut de la statistique table sur un taux de croissance de 0,4% au premier et au deuxième trimestre 2016, ce qui permettrait au chômage de passer sous la barre symbolique des 10% en métropole. François Hollande l'a répété: l'inversion de la courbe du chômage, qu'il promettait avant fin 2013, déterminera sa candidature à un second mandat en 2017. Le chef de l'Etat a décrété en début d'année "l'état d'urgence" contre le chômage en annonçant un vaste plan de formation pour 500 000 chômeurs supplémentaires et une nouvelle prime à l'embauche pour les TPE-PME. L'exécutif s'est également lancé dans une ultime réforme du droit du travail, avec un impact espéré sur l'emploi mais à plus long terme. Objectif: permettre aux entreprises de mieux s'adapter aux aléas de l'activité économique via des assouplissements accrus du temps de travail, et encourager l'embauche en CDI plutôt qu'en CDD. Le projet est contesté par une partie des syndicats et des organisations de jeunes, qui le jugent trop favorable au patronat: ils étaient encore des milliers dans les rues jeudi à réclamer son retrait, avant une journée d'action à l'appel de la CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, UNL et Fidl prévue le 31 mars. Mais il est aussi critiqué par le patronat lui-même, qui dénonce le retrait des mesures en faveur de l'emploi dans TPE-PME, comme le plafonnement des indemnités prud'homales. Et dans la perspective du débat parlementaire prévu en avril et mai, certains syndicats craignent que le Medef ne se serve des négociations en cours sur l'assurance chômage comme "monnaie d'échange dans la loi travail".
Climat des affaires quasi-stable, recul dans l'industrie Le climat des affaires est resté quasi-stable en mars en France, se dégradant notamment dans l'industrie et dans les services, mais s'améliorant dans le commerce de détail et de gros, a annoncé jeudi l'Insee. L'indicateur, calculé à partir des réponses des chefs d'entreprise des principaux secteurs d'activité, a reculé d'un point et retrouvé sa moyenne de long terme (100 points), indique l'institut statistique, qui précise que l'indicateur a été rehaussé d'un point en février, après la prise en compte de réponses tardives d'entreprises. Mais au total, "l'indicateur de retournement pour l'ensemble de l'économie passe dans la zone indiquant une conjoncture incertaine", ajoute l'Insee. Par secteur d'activité, le climat perd deux points dans l'industrie, les chefs d'entreprises ayant majoritairement une opinion négative sur leur activité passée. Le solde d'opinions sur les perspectives personnelles se dégrade par ailleurs légèrement. Dans les services, l'indicateur recule d'un point, les soldes sur l'activité et la demande prévues baissant, en particulier dans les activités immobilières et l'information et la communication. Ce recul va à l'encontre des données du cabinet Markit publiées mardi, selon lequel l'activité du secteur privé est repartie à la hausse en mars, en particulier dans les services, souligne dans une note Clemente de Lucia, économiste sur la zone euro chez BNP Paribas. C'est "un peu surprenant compte tenu de la reprise sur les marchés financiers depuis mi-février et le paquet de mesures de la Banque centrale européenne qui devrait assouplir les conditions financières et monétaires", ajoute-t-il. L'indicateur gagne en revanche trois points dans le commerce de détail, avec plus de chefs d'entreprises signalant une hausse de leur activité passée et prévue, et un point dans le commerce de gros. Dans le bâtiment, l'indicateur reste stable. "En mars 2016, les entrepreneurs sont moins nombreux qu'en février à prévoir une baisse de leur activité pour les trois prochains mois", indique l'Insee. "En revanche, le solde d'opinion sur l'activité récente diminue légèrement", ajoute l'institut. Les carnets de commande restent très inférieurs à la normale et les capacités de production demeurent sous-utilisées.