Le chômage au plus haut depuis dix-huit ans: après les mauvais chiffres de Pôle emploi d'octobre, l'Insee annonce au troisième trimestre une hausse du taux de chômage, qui touche 10,2% de la population active en métropole, un coup dur de plus pour le gouvernement juste avant les régionales. En incluant l'outre-mer, le taux de chômage mesuré par l'institut de statistiques, selon les normes du Bureau international du travail (BIT), s'élève à 10,6% de la population active, en progression de 0,2 point. Le taux de chômage a augmenté de 0,2 point par rapport au 2e trimestre en France métropolitaine: 75 000 chômeurs supplémentaires, soit 2,941 millions au total. Il faut remonter au dernier trimestre 1997 pour trouver un taux aussi élevé. Le record historique de 10,4% avait été atteint la même année, au 2e trimestre. Ces évolutions sont à analyser avec prudence, car elles se situent dans la marge d'erreur de +/-0,3 point de la statistique de l'Insee. Ce sont les jeunes actifs qui sont les plus touchés, avec une augmentation de 1 point chez les 15-24 ans par rapport au 2e trimestre, à 24,6%. Les chiffres de l'Insee diffèrent de ceux de Pôle emploi (ils avaient baissé sur la même période de 5.700 chômeurs), car ils ne mesurent pas le chômage de la même manière: Pôle emploi recense les demandeurs d'emploi enregistrés sur ses listes alors que l'Insee mesure son taux à partir d'une enquête effectuée chaque trimestre auprès de 110 000 personnes. Seul le taux de chômage de l'Insee est reconnu au niveau international. Un chômeur au sens du BIT est une personne "en âge de travailler qui n'a pas travaillé, ne serait-ce qu'une heure, au cours de la semaine donnée, est disponible pour travailler dans les deux semaines et a entrepris des démarches actives de recherche d'emploi dans le mois précédent", explique l'institut.
Baisse du halo du chômage L'Insee relève également une légère hausse du sous-emploi, c'est-à-dire essentiellement les personnes en temps partiel subi: 0,1 point de plus sur un trimestre, soit 6,7% des personnes en emploi, en grande majorité des femmes. En revanche, le taux d'emploi est resté stable, s'élevant à 64,2% chez les 15-64 ans, dont les trois quarts en CDI. Et le "halo" autour du chômage, c'est-à-dire les personnes inactives qui aimeraient travailler mais ne sont pas comptées comme chômeurs au sens du BIT (parce qu'elles ne sont pas disponibles tout de suite ou pas en recherche active), a fortement baissé par rapport au trimestre précédent: -64'000, pour s'établir à 1,4 million. Cette donnée est à interpréter positivement, selon Eric Heyer, de l'OFCE: "Quand les mauvaises nouvelles s'accumulent, beaucoup de personnes se découragent de chercher du travail, donc elles vont dans le halo du chômage. Mais quand l'activité repart, ce qui est le cas puisque le taux d'emploi est resté stable, ces personnes se remettent à chercher activement, sortent du halo pour être à nouveau comptabilisées comme chômeurs" au sens du BIT. Pour l'économiste, il s'agit donc pour le troisième trimestre d'une "bonne hausse" du chômage. Cela reste une hausse dont l'annonce tombe mal pour le gouvernement à trois jours du 1er tour des élections régionales. D'autant qu'elle arrive quelques jours après la publication du nombre d'inscrits à Pôle emploi en octobre, dont la forte hausse (42 000 demandeurs d'emploi en plus) a fait l'effet d'une douche froide puisqu'elle intervenait après une forte baisse en septembre. La ministre du Travail, Myriam El Khomri, avait reconnu qu'ils n'étaient "pas satisfaisants". Mais le gouvernement espère que la baisse s'enclenchera en 2016. L'Unédic, le gestionnaire de l'assurance chômage, anticipe aussi une inversion de la courbe en 2016. L'Insee de son côté prévoyait encore en octobre une stabilisation du chômage en fin d'année (second semestre), à 10% en métropole, l'économie française ayant commencé à redémarrer au troisième trimestre (+0,3% de croissance). Le président François Hollande a laissé entendre à plusieurs reprises qu'il ne briguerait pas de second mandat en 2017 si le chômage ne baissait pas de manière "crédible".
La croissance du secteur privé au plus bas La croissance de l'activité du secteur privé a nettement ralenti en novembre, l'indice PMI final s'établissant à 51 points, "certaines entreprises mentionnant l'impact des attentats du 13 novembre", a annoncé la société Markit. En net repli par rapport à octobre (52,6 points), cet indice évaluant la croissance à la fois dans le secteur industriel et dans celui des services signale "la plus faible croissance de l'activité du secteur privé français depuis août dernier", selon Markit. Une précédente estimation du PMI pour le mois de novembre faisait état d'un indice à 51,3 points. L'activité est estimée en expansion quand elle se situe au-dessus de la barre de 50. Dans le seul secteur des services, l'indice s'établit aussi à 51 points, contre 52,7 points en octobre. "Certaines entreprises interrogées, notamment dans le secteur Hôtels et Restaurants, font état d'annulations après les récents événements survenus à Paris", indique Markit. "L'expansion des nouvelles affaires s'accélère en revanche - celles-ci enregistrant leur plus forte hausse depuis cinq mois - tendance témoignant d'une certaine solidité de la demande sous-jacente, bien que les entreprises procèdent à de nouvelles baisses de tarifs afin de stimuler les ventes", commente par ailleurs Jack Kennedy, économiste du cabinet, cité dans le communiqué. "Alors que l'incertitude plane sur les conséquences à plus long terme des récents événements sur l'économie, les dernières données PMI demeurent conformes à une modeste progression du PIB français au quatrième trimestre", ajoute-t-il. Le Premier ministre Manuel Valls a assuré mardi que la France enregistrerait une croissance économique d'1% ou 1,1% cette année, espérant que la période des fêtes contribuera à effacer la perte d'activité liée aux attentats du 13 novembre.