Les cours du pétrole ont nettement rebondi vendredi après six séances de baisse, bénéficiant d'un déclin du dollar et plus généralement du retour de l'optimisme sur de nombreux marchés financiers. Le cours du baril de référence (WTI) pour livraison en juillet a gagné 1,77 dollar à 47,98 dollars sur le New York Mercantile Exchange, sans toutefois effacer les pertes de la semaine écoulée, ni même de la veille. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en août a rebondi plus fortement, gagnant 1,98 dollar à 49,17 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE). "Les mouvements financiers d'aversion au risque de (jeudi) sont devenus favorables au risque, au moins pour le moment", a commenté Tim Evans, chez Citi, alors que les Bourses européennes ont grimpé vendredi, portées par l'idée que s'éloigne la menace d'un vote britannique pour une sortie de l'Union Européenne. Pour Gene McGillian, chez Tradition Energy, les cours semblent désormais bien installés dans des marges étroites. "Globalement la remontée des cours a perdu son élan et le retour de la production canadienne sur le marché (après les incendies de mai) et la possibilité de pourparlers entre les rebelles nigérians et le gouvernement ont atténué la peur de ruptures d'approvisionnement qui nous avait aidés à dépasser les 50 dollars" le baril la semaine dernière, a-t-il dit. Pour autant, "le marché est bien au-dessus de son étiage de l'année, qui représentait un plus bas depuis douze ans, et cela est lié au fait que l'on va voir décliner la production nord-américaine et augmenter la demande mondiale", a-t-il précisé.
Affaiblissement du dollar Dans ce contexte, le marché a semblé ne prêter aucune attention à l'annonce, par la société de services pétroliers Baker Hughes, d'une troisième augmentation en trois semaines du nombre de puits de pétrole en activité aux Etats-Unis. "Je suis réticent à y voir le signe que les producteurs sont prêts à revenir sur le marché", a dit M. McGillian. "Les producteurs américains auront besoin d'un baril de pétrole bien au-dessus des 50 dollars durant une période prolongée de plusieurs mois avant que cela commence à inverser le déclin de la production", a assuré de son côté Ole Hansen, chez Saxo Bank. Globalement, "nous avons la perception d'un rapport entre l'offre et la demande nettement plus resserré dans l'avenir", a fait valoir Bart Melek, chez TD Securities en évoquant l'horizon du deuxième semestre 2017, ce qui fait que "le marché passe outre l'actualité négative transitoire", et préfère se focaliser sur la baisse de la production américaine de brut, notamment. Reste que pour Tim Evans, le soutien qu'apportent les données fondamentales aux cours reste "fragile". "Les stocks sont élevés et progressent peut-être encore", faisait-il valoir dans une note. "Nous voyons que les gestionnaires de fonds ont trop investi dans l'idée que le marché est en train de se rééquilibrer, cela les laisse vulnérables à l'annonce de mauvaises nouvelles", et contient le risque d'une nouvelle et plus profonde correction, selon lui. En Asie, les cours du pétrole rebondissaient à la faveur d'un reflux du dollar face à la plupart des devises alors que les craintes quant à un éventuel Brexit marquaient un peu le pas. Selon les analystes, les investisseurs estiment que le meurtre d'une députée pro-Union européenne dans le nord de l'Angleterre augmente les chances d'un vote des Britanniques pour rester dans l'UE lors du référendum prévu la semaine prochaine. Le meurtre de la députée travailliste Jo Cox a mis un coup d'arrêt brutal à la campagne électorale jusqu'au weekend. Il est évident que le rebond s'explique par le sentiment que la tragédie d'hier augmente les chances de victoire du camp des pro-Européens, a commenté Ray Attrill, analyste à la National Australia Bank à Sydney. Les marchés asiatiques sont repartis à la hausse vendredi et l'apaisement des craintes quant à un Brexit explique que les investisseurs se détournent du dollar pour se tourner vers des investissements plus risqués. Tout affaiblissement du dollar bénéficie au marché du brut, qui est libellé en billets verts, car il favorise les acheteurs munis d'autres devises. Vers 04H00 GMT, le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en juillet gagnait 35 cents à 46,56 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le baril de Brent, référence européenne du brut, pour livraison en août, prenait 55 cents à 47,74 dollars.
Baisse des stocks américains de brut Les stocks de pétrole brut ont moins baissé que prévu la semaine dernière aux Etats-Unis mais ceux d'essence ont plus reculé qu'attendu et la production a repris son déclin, selon des chiffres publiés mercredi par le département américain de l'Energie (DoE). Lors de la semaine achevée le 10 juin, les réserves commerciales de brut ont reculé de 900 000 barils à 531,5 millions de barils, alors que les experts interrogés par l'agence Bloomberg tablaient sur un recul de 2,325 millions. En revanche, dans un contexte d'espoir de réduction de l'offre mondiale, le recul annoncé par le DoE est plus favorable que les estimations de la fédération American Petroleum Institute (API) qui avait fait part la veille d'une hausse de 1,1 million de barils de brut. A ce palier, les réserves américaines de brut s'affichent en hausse de 13,6% par rapport à la même période de 2015 et restent à "des niveaux historiquement élevés à cette époque de l'année", comme l'a une nouvelle fois noté le DoE. De leur côté, les stocks d'essence ont baissé de 2,6 millions de barils, alors que les experts de Bloomberg ne comptaient que sur un déclin de 175 000 barils et que l'API annonçait même une hausse de 2,2 millions de barils. Ils sont tout de même bien au-dessus de la limite supérieure de la fourchette moyenne en cette époque de l'année, et s'affichent en hausse de 8,8% par rapport à la même période en 2015. Les réserves de produits distillés (gazole, fioul de chauffage, kérosène, etc.) ont avancé de 800 000 barils, entre les prévisions des experts de Bloomberg, qui tablaient sur une stagnation, et les estimations de l'API, qui avait annoncé un bond de 3,7 millions. Elles progressent de 13,9% par rapport à l'an dernier et restent également bien au-dessus de la limite supérieure de la fourchette moyenne à cette période de l'année.
Les raffineries ralentissent Très surveillée par les analystes, la production américaine, qui avait interrompu la semaine précédente un déclin continu depuis trois mois, a repris sa baisse en reculant de 29 000 barils par jour (bj) à 8,716 mbj. Egalement étudiées de près, les réserves du terminal pétrolier de Cushing (Oklahoma, sud), qui servent de référence au pétrole échangé à New York, ont avancé de 900 000 barils à 66,5 millions. Toutes catégories confondues, les stocks pétroliers américains ont reculé de 700 000 barils. Du côté de la demande, sur les quatre dernières semaines, les Etats-Unis ont consommé en moyenne 20,4 mbj de produits pétroliers, soit 3,6% de plus que l'année précédente à la même époque. Durant la même période, la demande de produits distillés a baissé de 2,6%, et celle d'essence a monté de 2,9%, dans les deux cas sur un an. Les raffineries américaines ont un peu ralenti leur cadence, fonctionnant à 90,2% de leurs capacités contre 90,9% la semaine précédente.
Recul de la production norvégienne La production de pétrole de la Norvège a reculé en mai, à 1,549 million de barils par jour (Mbj), mais ressort au-dessus des attentes, a annoncé vendredi la Direction norvégienne du pétrole. En avril, le pays scandinave avait pompé 1,634 Mbj, selon l'organisme public. Malgré ce recul, les chiffres de mai représentent une hausse de 2% par rapport à l'an dernier et dépassent de 1,5% les projections officielles, a-t-il précisé. Depuis 2000, la production norvégienne d'or noir a diminué de près de moitié. Pour relancer l'activité, l'Etat, dont les revenus pétroliers sont aussi affectés par la faiblesse du cours du baril, a ouvert le mois dernier une nouvelle zone de la mer de Barents, près de la frontière maritime avec la Russie, à la prospection. Les ventes de gaz naturel ont aussi reculé, à environ 9,7 milliards de m3 pour l'ensemble du mois contre 10,4 milliards de m3 en avril.