Un tribunal gambien a ordonné lundi la libération sous caution du chef du principal parti d'opposition, Ousainou Darboe, et de 18 co-prévenus, condamnés en juillet à trois ans de prison ferme pour participation à une manifestation non autorisée. Les demandeurs se voient accorder la liberté sous caution en attendant leur jugement en appel, a déclaré la juge, dans une décision très attendue, trois jours après l'annonce de la victoire historique du candidat de l'opposition à l'élection présidentielle, Adama Barrow, face à Yahya Jammeh, au pouvoir depuis 22 ans. Pour l'ensemble des prévenus, à l'exception de M. Darboe, cette libération a également été assortie de la remise de leur passeport. La justice a finalement été rendue et je suis très heureuse, a déclaré sa femme, Maimuna. Maintenant qu'il y a un nouveau gouvernement, ils n'avaient pas le choix, a-t-elle ajouté. Une foule de proches et de sympathisants était massée pour les acclamer à leur sortie du tribunal, a constaté un correspondant. Cette décision de justice est une preuve du processus démocratique qui a commencé en Gambie, a affirmé Me Atoumane Gaye, un avocat de la défense. Elle annonce, selon lui, une ère nouvelle d'indépendance de la justice, pendant longtemps perçue comme un instrument aux mains du régime pour réduire au silence ses contradicteurs. M. Darboe, chef du Parti démocratique uni (UDP), a affirmé peu avant l'annonce de la décision n'éprouver aucune rancune envers M. Jammeh. Je pense qu'il a apporté sa pierre à la construction de la Gambie, a-t-il déclaré à des journalistes. Je le respecte en tant que président de ce pays et je ne le prendrai jamais pour un malade mental ou un malfaisant, a ajouté le chef de l'opposition. M. Darboe et ses co-prévenus ont été arrêtés pour participation le 16 avril à une manifestation contre la mort en détention de Solo Sandeng, un dirigeant de l'UDP arrêté lors d'un rassemblement deux jours auparavant pour réclamer des réformes politiques en Gambie. Les prévenus ont fait en juillet appel de leur condamnation. Mais Me Gaye a affirmé espérer que d'ici le mois de janvier, prévu pour la passation des pouvoirs entre MM. Jammeh et Barrow, les 19 seront définitivement acquittés. Amnesty International a salué dans un communiqué un grand moment pour les accusés et leurs familles, disant espérer que cette décision positive annonce qu'ils seront acquittés le moment venu. Nous ne devons pas oublier d'autres prisonniers de conscience qui languissent toujours en prison simplement pour avoir exprimé leur opinion et participé à de manifestations pacifiques, ajoute l'ONG, citant le cas de trois imams arrêtés il y a plus d'un an pour avoir remis une requête au gouvernement et dont on est toujours sans nouvelle. Human Rights Watch (HRW) a également salué dans un communiqué un premier pas important pour montrer un plus grand respect de l'Etat de droit et mettre fin au piétinement des droits de l'opposition politique.