Les cours du pétrole rebondissaient vendredi dans un contexte incertain après avoir chuté en raison des préoccupations sur l'excès d'offre. Vers 04H45 GMT, le baril de light sweet crude (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en juin, prenait 49 cents à 49,46 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le baril de Brent, référence européenne, pour livraison en juin, gagnait 48 cents à 51,92 dollars. "Les investisseurs se débattent avec des informations contradictoires", a déclaré Greg McKenna, analyste chez AxiTrader. "Le secrétaire général de l'Opep a en substance dit que les coupes de la production seraient prolongées, pour faire face à la réalité de la reprise dans un gros champ pétrolier libyen et à l'augmentation continue de la production de pétrole de schiste américain". Pour Dongyul Lim, de CMC Markets, la hausse de la production américaine est susceptible d'anéantir les effets de toute prolongation de la limitation de sa production par l'Opep au-delà du mois de juin. "Il est vraisemblable que quand les ministres du Pétrole se retrouveront à Vienne le mois prochain, ils se mettront d'accord sur une prolongation des coupes", a-t-il dit. "Mais tout est une question d'attentes. Dans un marché où la Libye augmente sa production et la production américaine grimpe, la réduction aura-t-elle un impact sur les cours?" L'or noir ne s'est remis que récemment d'un excès d'offre qui l'a fait dégringoler depuis 2014. Les cours actuels qui tournent autour de 50 dollars sont loin des sommets de 2013, de plus de 100 dollars.
Abondance de l'offre La veille, les cours du pétrole ont nettement reculé à New York, le marché souffrant toujours de l'abondance de l'offre, qui pourrait encore être accentuée par le retour de la production d'un champ pétrolier libyen. Le prix du baril de "light sweet crude" (WTI), référence américaine du brut, a perdu 65 cents à 48,97 dollars sur le contrat pour livraison en juin au New York Mercantile Exchange (Nymex). A Londres, le prix du baril de Brent de la mer du Nord a cédé 38 cents à 51,44 dollars sur le contrat pour livraison en juin à l'Intercontinental Exchange (ICE). "Une bonne part de cela doit être dû à la nouvelle que la production libyenne est de retour", a commenté James Williams de WTRG. La production va pouvoir reprendre sur le champ d'al-Sharara, dans le sud-ouest de la Libye, à la suite d'un "accord" avec les protestataires qui bloquaient depuis début avril un oléoduc acheminant le pétrole jusqu'à un port et une raffinerie à 50 km à l'ouest de Tripoli, a annoncé jeudi le président de la compagnie nationale libyenne. Ce site pétrolier d'une capacité de 200.000 barils par jour est l'un des plus important d'un pays en proie à une guerre civile et qui peine à faire repartir sa production de brut. "Il y a des informations venant d'Iran, d'un des responsables du pétrole, sur une augmentation significative de leur niveau de production", a complété Gene McGillian de Tradition Energy. Bien que membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), Iran et Libye ont été exemptés de réduction de leur production par l'accord du cartel visant à résorber l'excès d'offre. Entrée en vigueur, cette limitation des extractions, à laquelle se sont associés onze autres pays, peine à faire ressentir ses effets tandis que les Etats-Unis, qui ne sont pas partie prenante, font repartir leur production. Les cours restaient d'ailleurs jeudi sous la pression d'une nouvelle progression hebdomadaire de la production américaine annoncée la veille par le Département américain de l'Energie (DoE).
L'Opep ne convainc pas Cela s'est conjugué à une forte progression des réserves de produits dérivés aux Etats-Unis, notamment d'essence, qui inquiète les analystes au moment où doit commencer la saison durant laquelle les automobilistes américains utilisent plus leur véhicule. De son côté, l'Opep n'arrive pas à rassurer les investisseurs sur l'état du marché et sur sa volonté de prolonger ses quotas de production au-delà de leur période initiale de six mois qui doit s'achever en juin. Le secrétaire général, Mohammed Barkindo, s'est dit "confiant" jeudi de l'avancée des discussions entre les pays producteurs membres et non-membres de l'Opep sur l'avenir de l'accord. "Le secrétaire général de l'Opep a beau se vanter de la baisse du surplus des réserves mondiales, il est désormais clair que les marchés n'y croient pas pour l'instant", a résumé Michael Hewson, analyste chez CMC Markets. Une décision sur le sujet devrait intervenir fin mai lors du sommet semestriel du cartel pétrolier.
Reprise de la production libyenne La production va pouvoir reprendre sur le champ d'al-Sharara, dans le sud-ouest de la Libye, suite à un "accord" entre les protestataires qui bloquaient depuis début avril un oléoduc, a dit jeudi un dirigeant libyen. Un "accord pour réouvrir les valves (de l'oléoduc) a été conclu tôt ce matin (jeudi) et je pense que nous pourrons reprendre progressivement la production", a déclaré Mustafa Sanalla, le président de la National Oil Corporation (NOC) de Libye, en marge d'une conférence internationale sur le pétrole à Paris. La production de cet important site pétrolier, d'une capacité de 200.000 barils par jour, était à l'arrêt depuis le 9 avril dernier, des protestataires ayant fermé l'oléoduc qui achemine le pétrole jusqu'à un port et une raffinerie à 50 km à l'ouest de Tripoli. "Nous avons eu de nombreux contacts avec le haut conseil des tribus de la ville, qui a joué un rôle très important pour convaincre les personnes" qui bloquaient l'oléoduc, a expliqué M. Sanalla. Avant de relancer la production, la NOC doit d'abord effectuer "une évaluation de la situation et des risques", qui prendra plusieurs heures, a-t-il précisé. "Nous allons augmenter la production doucement, et j'espère que nous pourrons atteindre notre objectif d'une production nationale de 1,1 million de barils (par jour) d'ici le mois d'août", a estimé M. Sanalla. Avant la chute du régime du dictateur Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye produisait 1,6 million de barils par jour. Depuis, le pays en plein chaos où deux autorités rivales se disputent le pouvoir, est incapable d'exploiter ou de profiter pleinement de ses énormes réserves pétrolières, considérées comme les plus importantes d'Afrique (devant le Nigeria et l'Algérie). La production est régulièrement perturbée par des conflits armés ou des revendications sociales.
Le secrétaire général de l'Opep "confiant" Le secrétaire général de l'Opep, Mohammad Sanusi Barkindo, s'est dit "confiant" jeudi de l'avancée des discussions entre les pays producteurs membres et non-membres de l'Opep sur l'avenir de l'accord sur la réduction de la production d'or noir. "Je suis confiant sur le fait qu'un consensus continuera d'être construit" d'ici la prochaine réunion le 25 mai à Vienne des pays engagés par cet accord signé fin 2016, a déclaré M. Barkindo en marge d'un sommet pétrolier à Paris. "Le consensus est en train de se construire progressivement. Cela prend du temps étant donné le nombre (de pays) impliqués, 24 pays, et chacun à un rôle important à jouer", a-t-il ajouté. Afin de soutenir les cours du brut en forte baisse depuis la mi-2014, les pays de l'Opep et 11 producteurs non-membres du cartel (dont la Russie mais pas les Etats-Unis) ont décidé fin 2016 de réduire, durant les six premiers mois de cette année, leur offre de 1,8 million de barils par jour (mbj). Depuis la mise en place de l'accord, les cours du pétrole se sont redressés et évoluent désormais au-dessus de 50 dollars le baril. L'un des "principaux" facteurs qui dicteront la décision de prolonger ou non l'accord sera le rythme de la baisse en cours des réserves de pétrole dans les pays consommateurs, a expliqué M. Barkindo.
Le marché se rééquilibre Le ministre de l'Energie du Qatar, Mohamed Saleh al-Sada, a estimé jeudi que le marché pétrolier avait amorcé un "rééquilibrage" favorisé par l'accord sur la baisse de production en vigueur depuis le début de l'année. Deux accords de limitation de l'offre conclus par l'Opep, l'un en son sein, l'autre avec ses partenaires dont la Russie, sont entrés en vigueur le 1er janvier. Ces accords portent sur une baisse de l'offre de quelque 1,8 million de barils par jour. L'objectif de cette réduction de l'offre, prévue sur une période initiale de 6 mois, est de rééquilibrer le marché, mais la remontée des cours provoquée par ces accords rend de nouveau rentable l'exploitation de certains gisements de pétrole de schiste aux Etats-Unis. "Un rééquilibrage était inéluctable. Ce que nous voulons faire, c'est accélérer ce processus de rééquilibrage", a déclaré le ministre qatari lors d'un colloque organisé par le think tank Atlantic Council à Istanbul. "L'accord a été très réussi et il a contribué au processus de rééquilibrage. (Le marché) se redresse et nous espérons que le rééquilibrage sera plus soutenu lors du second semestre", a ajouté M. Sada. Le ministre saoudien de l'Energie, dont le pays est le premier exportateur mondial de brut, a indiqué la semaine dernière qu'il y avait une sorte d'"accord de principe" sur la nécessité de reconduire la réduction de l'offre lors d'une réunion de l'Opep en mai. Les prix ont connu ces derniers mois une remontée et évoluent au-dessus de 50 dollars le baril.
Espoir sur la réduction de sa production Le P-DG de Total Patrick Pouyanné a dit jeudi espérer que les pays membres de l'Opep prolongeront leur accord pour limiter la production d'or noir, afin de contribuer au rééquilibrage du marché. "Nous espérons, bien sûr, que l'Opep maintiendra" son accord de réduction de la production "durant le deuxième moitié de l'année", a déclaré M. Pouyanné lors d'un sommet international pétrolier à Paris. "Je suis convaincu que nous avons besoin d'une stabilité" en matière d'offre, a-t-il ajouté, devant la presse. Les pays membres de l'Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep) ainsi que 11 pays non producteurs (dont la Russie, mais pas les Etats-Unis) ont signé fin 2016 un accord pour s'imposer des plafonds de production, et de fait réduire leur production de 1,8 million de barils par jour (dont 1,2 million pour les seuls pays de l'Opep). Entré en vigueur au 1er janvier, il est valable six mois et l'Opep doit se réunir le 25 mai à Vienne pour que ses membres décident de renouveler ou non leur engagement. La mise en place de cet accord "historique" a été "un bon calcul", car il a réussi, "en réduisant de 3% la production, à permettre une augmentation du prix (du brut) de 15 à 20%", a noté le patron de la major française. Les cours de l'or noir ont connu une remontée au premier trimestre et évoluent au-dessus de 50 dollars le baril. Le groupe pétrolier français a publié jeudi des résultats en forte hausse au premier trimestre 2017, tirés par la remontée des prix des hydrocarbures dans le sillage de la politique de l'Opep. Plusieurs pays membres de l'Opep, dont l'Algérie et le Venezuela, ont déjà indiqué qu'ils soutiendraient une prorogation de cet accord. De son côté, le ministre saoudien de l'Energie, Khaled al-Faleh, dont le pays est le premier exportateur mondial de brut, a indiqué la semaine dernière qu'il y avait une sorte d'"accord de principe" sur la nécessité de le reconduire. Par ailleurs, évoquant le projet saoudien d'introduire en Bourse une partie du capital de sa compagnie nationale Saudi Aramco, le PDG de Total a indiqué à la tribune que ce serait "un bon investissement". "Nous verrons, si c'est la meilleure allocation de capital pour Total". "Je n'ai pas dit que j'allais investir dans (Saudi) Aramco", a-t-il toutefois tempéré plus tard devant des journalistes en marge de la conférence. "Ce type de discussion est prématuré. Prenons note d'abord de comment l'Arabie saoudite compte organiser cette IPO (introduction en Bourse). S'il y a une possibilité de partenariat entre Total et (Saudi) Aramco, nous devons la considérer", a-t-il précisé.