Les arbitrages politiques, pour réguler les marchés, seront nécessaires. Souveraineté alimentaire ou indépendance énergétique ? Les choix seront délicats. « 14% de la surface de maïs aux Etats-Unis est consacrée aux biocarburants de première génération. Ceux-ci ne représentent pourtant que 3,5% du carburant utilisé ». Le bilan est loin d'être convaincant. Les biocarburants de deuxième génération seront-ils suffisamment performants ? Les politiques devront trancher. Ils devront aussi promouvoir une agriculture respectueuse de l'environnement et sûre au niveau sanitaire. Les agriculteurs devront allouer les terres aux productions économiquement les plus rentables. Les prix dicteront, dans ce cas, les assolements et les rotations. Patricia Le Cadre imagine un autre scénario : « Il est probable que l'on assiste à une contractualisation forte entre les agriculteurs et l'aval ». Les éleveurs pourraient choisir de vendre directement leurs céréales et cesser l'engraissement d'animaux. «Cela ne se fera pas facilement. L'engraissement peut être remis en question ponctuellement mais l'approvisionnement en matières premières n'est pas le seul critère de compétitivité des productions animales. La présence d'industries de transformation en aval est déterminante ». La compétition pourrait également jouer entre espèces. “Le poisson est plus performant pour transformer de la protéine végétale en protéine animale”. Le coût du fret. Un frein aux échanges ? La raréfaction du pétrole et l'augmentation du prix de l'énergie auront une incidence directe sur le coût des transports. Les frais de logistique pourraient freiner les échanges au niveau mondial. « Le fret représente déjà plus de 20% du prix du soja ». Le spectre de l'inflation renaît partout. « Les denrées alimentaires ont augmenté de 20% en 2007 en Inde. La viande de porc de 30% en Chine ». Les consommateurs européens ou américains subissent les fortes augmentations de prix des produits alimentaires. «Le besoin d'observatoire des prix n'a jamais été aussi grand. Il faut connaître l'ensemble des éléments constitutifs du prix : services, emballages, transports, marges ». L'avenir des filières animales françaises dépend de ces arbitrages. Malgré quelques handicaps liés à la parité de la monnaie ou aux désavantages concurrentiels (interdiction des OGM et des farines animales), les atouts existent pour faire face aux perturbations inéluctables. Les réserves en eau sont suffisantes. La productivité est bonne. Les efforts de recherche sont conséquents. Les matières premières sont disponibles avec de faibles coûts de transport. Les garanties sanitaires sont importantes et la présence d'un marché solvable de 500 millions d'habitants rassure. La commission environnementale de la Chambre des communes (chambre du Parlement au Royaume-Uni) a réalisé une étude sur les biocarburants. La conclusion de son rapport de 40 pages est la suivante : “Le soutien aux biocarburants a été prématuré au regard des risques environnementaux importants associés aux technologies actuelles. La seconde génération de biocarburants pourrait jouer un rôle dans la réduction des gaz à effet de serre un jour dans l'avenir.”