Wall Street pourrait connaître une nouvelle semaine éprouvante, le tableau pessimiste de l'économie mondiale brossé par les grands argentiers du G7 réunis samedi à Tokyo n'étant certainement pas de nature à calmer les inquiétudes d'investisseurs redoutant le spectre de la récession aux Etats-Unis. Ces derniers attendent par ailleurs avec appréhension la réouverture, mercredi, de la Bourse chinoise, qui est restée fermée pendant l'essentiel de la semaine dernière - au cours de laquelle l'indice Dow Jones a connu sa plus forte baisse hebdomadaire en pourcentage avec un recul 4,6% - pour cause de vacances liées au Nouvel an lunaire. Les analystes financiers ne manquent en effet pas de rappeler que, il y a tout juste un an, les intervenants sur le marché chinois avaient provoqué une débâcle généralisée sur les places boursières mondiales dès le lendemain de la fin des vacances du Nouvel an. Mais, d'ici mercredi, tout le monde aura les yeux tournés vers les rehausseurs de crédit qui, durement touchés par la crise des "subprime" - ces prêts accordés à des emprunteurs offrant peu de garanties de solvabilité - s'efforcent de lever des fonds pour protéger au maximum leurs notes AAA consenties par les agences de notation, dont ils ont absolument besoin pour poursuivre leur activité dans de bonnes conditions. MBIA, le premier rehausseur de crédit mondial, a procédé à une augmentation de capital d'un milliard de dollars jeudi mais Ambac Financial Group, un autre acteur du secteur, a retiré le mois dernier son projet d'augmentation de capital d'un milliard de dollars au moins, évoquant en particulier un marché difficile. Les rehausseurs sont, selon les estimations des spécialistes, confrontés à une ardoise représentant des milliards de dollars du fait qu'ils ont garanti des créances immobilières subprime et d'autres créances à risque, reconditionnées en pools de valeurs mobilières. Pour Josef Ackermann, le président du directoire de la Deutsche Bank, les difficultés des rehausseurs pourraient déboucher sur la prochaine crise financière. "Si les rehausseurs réussissent à lever des fonds et à éviter un abaissement de leurs notes, le marché en sera vraisemblablement très soulagé. Mais si les choses ne se passent pas bien et qu'il y a un abaissement alors il y a aura un nouveau mouvement de ventes", a déclaré John Praveen (Prudential International Investments Advisers LLC) Des entreprises d'autres secteurs d'activité doivent encore publier leurs résultats cette semaine, comme par exemple le groupe pharmaceutique Schering-Plough, l'équipementier pour semi-conducteurs Applied Materials, Coca-Cola Entreprises et General Motors. La question sera bien sûr de savoir comment ces sociétés ont évolué dans un contexte de net ralentissement économique. Les analystes financiers ont déjà revu en baisse leurs prévisions de résultats des entreprises américaines pour les premier et deuxième trimestres 2008 après que ceux du quatrième de l'année dernière ont montré une détérioration des conditions plus marquée que prévu. Le marché devrait également être animé par le dossier Yahoo-Microsoft à la suite de la décision du moteur de recherche de rejeter l'offre de 42 milliards de dollars (28,9 milliards d'euros) de l'éditeur de logiciels. Selon le Wall Street Journal, qui cite une source non-identifiée, Yahoo s'estime "spolié" par le prix de 31 dollars par action proposé par Microsoft et devrait bientôt le faire savoir, réclamant au moins 40 dollars, soit le double de son cours de Bourse moyen de janvier. L'actualité des entreprises passera néanmoins au second plan lorsque les Etats-Unis publieront les quelques indicateurs macro-économiques au programme de la semaine : ventes au détail du mois de janvier, production industrielle du mois de janvier, inscriptions hebdomadaires au chômage ou encore confiance des consommateurs pour le mois de février. "Les ventes au détail et la production industrielle nous permettront de mieux savoir si nous sommes en récession et, le cas échéant, d'avoir une meilleure idée de sa gravité et de sa durée", a poursuivi John Praveen. Ben Bernanke, le président de la Réserve fédérale américaine, doit être entendu par la Commission bancaire du Sénat jeudi, 14 février, à 15h00 GMT. Son audition sera consacrée à la situation de l'économie et des marchés financiers américains. "Ces derniers temps, dès que quelqu'un de la Fed dit quelque chose, les marchés réagissent. Cette fois encore, les investisseurs vont s'efforcer de lire entre les lignes des propos de Ben Bernanke : est-ce que la Fed va continuer de baisser ses taux de façon radicale ou est-ce que (Bernanke) va évoquer l'inflation ?", s'interroge John Praveen. Des données concernant la croissance économique au Japon et en Europe devraient constituer une premier indice de l'éventuel impact du ralentissement américain sur le reste du monde.