Les Européens attendent des propositions "concrètes" de leurs homologues britanniques, qu'ils retrouvent lundi à Bruxelles pour une quatrième session de négociations du Brexit, afin que le ton "constructif" adopté par Theresa May puisse réellement débloquer les tractations. Le temps presse pour les deux parties qui tentent de régler dans un premier temps trois dossiers prioritaires: la garantie des droits des citoyens directement concernés par le départ britannique de l'UE, le "solde des comptes" et la question irlandaise. A l'ouverture des négociations, l'objectif était de boucler cette première phase à l'automne afin de passer aux discussions sur la nature de la future relation entre l'Union et le Royaume-Uni, mais l'espoir de respecter ce calendrier semblait mince. "Il y a eu quelques progrès, mais nous devons vraiment avancer maintenant. Le temps presse", a souligné lundi le ministre estonien Matti Maasikas, dont le pays assure la présidence tournante de l'Union européenne. La semaine passée, un haut responsable européen affirmait que les 27 prendraient "tout le temps dont nous avons besoin" avant de s'atteler à la deuxième phase des discussions, que Londres s'impatiente de lancer. "A l'heure actuelle, absolument personne ne pense qu'on sera prêt en octobre", avait ajouté cette même source. Il revient au Français Michel Barnier, négociateur en chef de l'UE sur le Brexit, d'évaluer la progression des négociations et de proposer aux 27 de passer à la phase suivante. La Première ministre britannique Theresa May a plaidé vendredi en Italie, lors d'un discours très attendu, pour un Brexit "soft", avec une période de transition de deux ans, dans une tentative de relancer les négociations.
L'écueil financier Elle s'est engagée à "honorer" les engagements financiers pris par son pays en tant que membre de l'UE. Elle n'a toutefois avancé aucun chiffre et n'a pas apporté plus de précisions. Si les Européens n'ont pas réclamé de fixer un montant pour progresser vers la phase suivante des négociations, ils exigent de définir rapidement une "méthodologie" pour calculer le montant des engagements britanniques. Côté européen, le règlement financier du divorce a été évalué officieusement entre 60 et 100 milliards d'euros, selon plusieurs sources. Au quotidien The Times qui affirme que Londres a accepté de payer 40 milliards de livres (45 milliards d'euros), soit 20 milliards comme contribution au budget européen qui court jusqu'en 2020 et 20 milliards pour d'autres engagements, le ministre britannique en charge du Brexit David Davis a répondu que la somme était "inventée". "Je ne vais pas donner un chiffre à l'antenne, ce serait ridicule de faire cela, mais nous avons une idée assez claire d'où nous voulons aller" sur ce sujet, a-t-il déclaré, invité sur la BBC dimanche. M. Barnier a salué un discours "constructif" de la part de Theresa May, qui "traduit une volonté de progresser alors même que le temps passe". Mais il a dans le même temps demandé de "traduire" ces propos "dans des positions de négociations afin de faire de véritables progrès". Ainsi sur la promesse de Mme May concernant la facture, il a assuré que l'Union devra "vérifier (...) si cette assurance couvre tous les engagements pris par le Royaume-Uni en tant qu'Etat-membre". M. Barnier a en outre noté que la Première ministre n'avait pas apporté de clarifications sur la façon dont le Royaume-Uni entendait s'engager pour garantir les accords de paix en Irlande. "On y voit un peu plus clair, mais on n'a pas encore des éléments très précis", a résumé lundi matin le ministre belge des Affaires étrangères Didier Reynders. La date du round des tractations de septembre avait été décalée d'une semaine, pour se tenir après l'intervention de Mme May. A la fin de la précédente session, fin août, les deux camps s'étaient rejeté mutuellement la responsabilité du peu d'avancées réalisées. M. Barnier et M. Davis doivent s'exprimer lundi à 17H30 (15H30 GMT), en ouverture du nouveau round qui durera jusqu'à jeudi. Une rencontre est par ailleurs prévue mardi à Londres entre Theresa May et Donald Tusk, le président du Conseil européen, organe qui regroupe les dirigeants des Etats de l'Union.
Pas de discussion sur une transition Le négociateur en chef de l'UE pour le Brexit, Michel Barnier, a affirmé lundi à Bruxelles que les discussions autour d'une période de transition à l'issue du départ du Royaume-Uni ne pourraient débuté qu'une fois un accord trouvé sur les trois points prioritaires du divorce. Mais de son côté, son homologue britannique, le ministre du Brexit David Davis a réitéré la volonté de Londres d'aborder au plus vite la question de la future relation entre les deux parties, en lui conditionnant le règlement de la facture du divorce. M. Davis était venu dans la capitale européenne pour le quatrième cycle de négociations sur les conditions du retrait britannique. "Le Royaume-Uni honorera les engagements (financiers) que nous avons pris pendant la période où nous étions membres. Mais il est évident qu'on pourra seulement atteindre une conclusion à ce sujet dans le cadre et le respect de notre nouveau partenariat profond et spécial avec l'UE", a indiqué M. Davis. Quelques minutes avant de rejoindre M. Davis, à l'issue d'un compte-rendu avec 27 ministres de l'UE sur la progression des négociations, M. Barnier avait expliqué que les deux sujets ne seraient pas abordés en même temps. "Nous ne mélangerons pas la discussion sur les dettes et sur les engagements du passé, nous ne mélangerons pas ces sujets qui font partie du +retrait ordonné+ (du Royaume-Uni), avec une discussion sur la future relation", a-t-il insisté. Michel Barnier a souhaité que ce nouveau round de pourparlers, qui s'ouvre lundi à Bruxelles, permette aux Britanniques de "traduire" le discours de la Première ministre Theresa May vendredi "dans des positions précises de négociations". Sur la question d'une période de transition de deux ans, évoquée par Mme May pour la première fois vendredi à Florence (Italie), il a assuré que cela passait par un "accord préalable" sur les trois sujets prioritaires fixés: le droit des citoyens, l'Irlande et le règlement financier. Cette période de transition, demandée par le Royaime-Uni, devra se faire selon lui sous le régime des règles communautaires. "S'il s'agit durant cette période de maintenir la participation du Royaume-Uni au marché unique et à l'Union douanière (...), et aux politiques qui accompagnent le marché unique, il est clair que la totalité de l'architecture de régulation européenne, (sa mise en œuvre, les conditions financières, la supervision, tout cela sera maintenu dans cette période-là sans exception", a asséné M. Barnier.