L'industriel Siemens introduit vendredi en Bourse Healthineers, sa très rentable division d'ingénierie médicale, une IPO plus modeste que prévue à 4,2 milliards d'euros, mais qui délie davantage le vieux conglomérat allemand. Healthineers équipe les hôpitaux à travers le monde en appareils d'imagerie médicale (scanners, échographies), en bras robotisés pour les blocs opératoires, appareils d'exploration des vaisseaux sanguins ou encore des cathéters. Mais surtout, cette division de Siemens est en excellente santé. Il s'agit de la deuxième branche d'activité plus rentable du groupe, avec une marge opérationnelle à 18,1%, loin devant celles de ses autres activités, comme les turbines ou les trains. Côté chiffre d'affaires, Healthineers a généré l'année passée 13,8 milliards d'euros, soit la plus grosse rentrée de Siemens, après sa division pléthorique Power & Gaz en difficulté.
Bas de la fourchette Les machines à rayons X de Siemens ont donc de quoi éblouir les investisseurs, mais pas forcement les aveugler. L'IPO d'Healthineers était annoncée comme la plus importante à la Bourse de Francfort depuis 20 ans. Elle est finalement la quatrième en Allemagne depuis 2000, après celle de Deutsche Post, de son ancienne filiale Infineon et plus récemment, celle de l'énergéticien RWE en 2016. Elle s'avère nettement plus modeste que prévue, à cause, notamment, des marchés boursiers en petite forme depuis plusieurs semaines. L'opération, menée sur le marché régulé (Prime Standard) de la Bourse de Francfort, porte sur 15% des titres existant, soit 150 millions d'actions, déjà toutes souscrites, ont indiqué les grandes banques qui accompagnent l'opération. Le prix de la cotation a été fixé jeudi soir par Siemens à 28 euros, soit dans le bas de la fourchette (26 à 31 euros)proposée par Siemens lors de la période de souscription. Siemens estime que l'IPO devrait valoriser Healthineers entre 26 et 31 milliards d'euros. Avec la cote de départ fixée, l'industriel escompte une rentrée d'argent de 4,2 milliards d'euros, soit beaucoup moins que les 9 milliards calculés par les analystes jusque début mars.
Médecine du futur Ce n'est pas la première fois que Siemens rajuste les contours de son empire industriel. L'industriel munichois s'est déjà séparé de l'électroménager (dans sa co-entreprise avec Bosch), des téléphones portables, des ordinateurs (avec Fujitsu) et des ampoules Osram. Son ancienne division fabricant des semi-conducteurs, rebaptisée Infineon, évolue désormais en autonomie complète sur le Dax, l'indice vedette de la Bourse de Francfort. Healthineers est leader en terme de chiffres d'affaires dans l'imagerie médicale, mais derrière ses concurrents (GE, Roche, Philipps) en ce qui concerne les diagnostics et les thérapies de pointe. Avec la mise en orbite boursière de cette branche, Siemens mise sur un marché irrémédiablement voué à la croissance : la médecine du futur dans un monde où l'on vit de plus en plus vieux et avec son cortège de maladies. Selon le patron de la filiale, Bernd Montag, l'IPO est censée faire de la division "une entreprise de technologie médicale pur-sang", lui donnant "plus de flexibilité" pour se concentrer sur la conquête de marchés et la levée de capitaux en vue d'acquisitions. Quant à la société mère, Siemens, elle pourrait, quitte à se mettre quelques investisseurs à dos, utiliser les recettes de l'IPO pour venir en aide à d'autres de ses composantes moins en forme, comme le mastodonte "Power and Gaz", où près de 7.000 suppressions d'emplois sont prévues. De plus en plus d'actionnaires dits "activistes" manifestent bruyamment leur aversion pour ce modèle d'intégration à l'ancienne qui leur rapporte moins et rime selon eux avec gestion opaque, gaspillage et politique des vases communicants entre les divisions qui marchent et les autres à la traîne.