Soutenir les cheminots ou tous les personnels en grève? Apporter une "compensation" aux grévistes ou "organiser la lutte"? Si les dons affluent, les objectifs et modalités des différentes caisses de grève diffèrent sensiblement. Super-cagnotte inattendue C'est "la" success-story du moment: trois semaines après l'appel lancé par une trentaine d'intellectuels, la cagnotte de "solidarité avec les cheminots grévistes" est riche de plus de 730.000 euros. Ce butin inattendu, destiné à "indemniser financièrement" les grévistes, devait initialement être redistribué aux fédérations de la SNCF (CGT, Unsa, Sud, CFDT), proportionnellement à leur représentativité. Problème: un syndicat puissant en nombre de voix n'est pas forcément celui qui a le plus de grévistes dans ses rangs. Il a donc été convenu de créer une association pour récupérer les fonds et les redistribuer directement aux cheminots, selon des modalités à définir. Des représentants de chaque syndicat y siègeront, ainsi que Jean-Marc Salmon, le sociologue à l'origine de la cagnotte.
Modèle inédit à la CFDT La CFDT est la seule confédération à avoir une "caisse nationale d'action syndicale" (CNAS), permanente et alimentée par une partie des cotisations. "À partir du 2e jour de grève", l'adhérent ayant fait grève "reçoit une indemnité de 7€/h", précise son site Internet. "C'est une auto-assurance, payée par les adhérents et qui bénéficie aux adhérents", explique Sébastien Mariani de la CFDT-Cheminots, vantant une "mutualisation totale" et juste: "les salaires les plus élevés financent davantage les salaires les moins élevés". Pour en bénéficier, l'adhérent doit remplir un "formulaire" et fournir les "justificatifs" nécessaires.
"Luttes 2018" à la CGT La CGT n'a pas de caisse permanente mais, "quand un mouvement de type national se déclenche" (cheminots, salariés de l'énergie, de la santé...), "on peut déclencher ce qu'on appelle +une solidarité+", explique David Dugué de la confédération. Avant Pâques, la CGT a ainsi créé une caisse "Luttes 2018", dont le montant n'est pas connu. Concrètement, l'argent "va au syndicat qui organise la lutte" et qui se manifeste vis-à-vis de la confédération, explique M. Dugué. Le montant est estimé "en fonction des jours de grève et des actions menées". Ca peut servir à payer "des repas, des cafés, des déplacements pour une manifestation" mais aussi, parfois, pour répondre à "des demandes personnelles de grévistes en difficulté".
Dons spontanés, cagnottes créées Après avoir reçu "spontanément" des dons, l'Unsa-ferroviaire et SUD-rail ont mis en ligne des "caisses de solidarité". Elles affichaient vendredi moins de 9.000 euros pour la première, 54.000 pour la seconde. Les dons par chèque n'apparaissent pas. Gérer cet argent implique de "la transparence" et "une réelle traçabilité", explique Roger Dillenseger de l'Unsa. L'enveloppe sera redistribuée "par montant forfaitaire" et "pilotée par notre trésorier". SUD-rail va "répartir l'argent dans (ses) 24 structures régionales", qui reverseront tout aux grévistes. "On ne gardera rien", insiste Erik Meyer, en précisant: "le cheminot qui gagne entre 1.200 et 1.500 euros par mois - donc le plus pénalisé - sera beaucoup plus aidé que celui qui fait 3.000 euros".
Cagnottes "politiques" Lancée avec succès lors du conflit de 2016 contre la loi Travail, la caisse de "solidarité financière avec les salariés en grève" a été réactivée "depuis une semaine" et a déjà récolté "plus de 120.000 euros", affirme Romain Altmann d'Info'Com-CGT. "Tout l'argent ne va qu'aux grévistes" actuellement mobilisés pour "défendre le service public" (cheminots, postiers, infirmières...), pour "qu'ils bouclent les fins de mois", dit-il. La caisse est co-gérée avec la CGT Goodyear et SUD-PTT 92, les montants versés sont consultables sur Internet. Le but est "politique": il s'agit de "préparer un affrontement le plus long et le plus large possible contre le gouvernement". Dans la même veine, La France insoumise a lancé une "cagnotte solidaire". Les dons ("pas loin de 30.000 euros") sont reversés aux "groupes d'action" créés par LFI, sur une base de 40 euros par jour de grève.