Des bombes artisanales adressées à Barack Obama, Hillary Clinton, CNN et d'autres détracteurs de Donald Trump: en pleine campagne pour les législatives, la polarisation politique américaine a pris un tour dramatique mercredi, Donald Trump appelant au rassemblement tandis que des démocrates l'accusaient d'attiser la violence. En quelques heures, six alertes au colis suspect se sont succédé de New York à la Floride en passant par Washington, sans compter une fausse alerte en Californie, créant un climat de psychose. Aucune victime n'a été signalée mais les polices locales et fédérales ont été placées en état d'alerte. Le maire et le gouverneur de New York ont dénoncé une "volonté de terroriser". "Dans des moments comme celui-ci, nous devons nous rassembler", a déclaré Donald Trump. "Les actes et les menaces de violence politique n'ont pas leur place aux Etats-Unis". Le chef de la police new-yorkaise, James O'Neill, s'est dit confiant dans le fait que le ou les coupables seraient identifiés "dans les prochains jours". La première alarme a retenti en matinée lorsque le service fédéral chargé de la protection des anciens présidents a annoncé avoir intercepté deux colis contenant "des engins explosifs potentiels", destinés à l'ex-secrétaire d'Etat démocrate Hillary Clinton, qui réside dans la banlieue de New York, et à l'ex-président démocrate Barack Obama, qui habite à Washington. Le paquet destiné à Mme Clinton, rivale malheureuse de Trump à la présidentielle 2016 et que le président continue à critiquer régulièrement, a été intercepté mardi soir, celui destiné à Barack Obama mercredi matin, a indiqué le Secret Service. Aucun des colis n'a atteint ses destinataires, a-t-il précisé. Peu après, la chaîne d'information CNN, souvent dénoncée par Donald Trump qui l'accuse de critiquer systématiquement sa présidence, évacuait ses bureaux new-yorkais après la découverte d'un colis suspect. Le colis contenait un engin "apparemment explosif" et une "poudre blanche", en cours d'analyse, selon M. O'Neill. Il était adressé à John Brennan, ex-directeur de la CIA et commentateur sur CNN très critique de Trump, lequel a décidé en août de le sanctionner en lui retirant son habilitation de sécurité.
Des paquets d'apparence similaire La police de Floride a ensuite indiqué avoir trouvé un colis suspect près du bureau de l'élue au Congrès Debbie Wasserman Schultz, ex-présidente du comité national du parti démocrate. Au moins deux autres personnalités démocrates, noires --l'ex-ministre de la Justice d'Obama, Eric Holder, et la députée californienne Maxine Waters-- ont aussi été visées par des colis suspects. Personne n'a revendiqué ces envois, survenus après qu'un engin explosif eut été retrouvé lundi dans la boîte aux lettres de la résidence new-yorkaise du milliardaire George Soros, démocrate notoire devenu une cible des nationalistes américains et européens. Aucune arrestation n'a été annoncée. Mais le FBI a confirmé que les cinq petits paquets jaunes destinés à Soros, Clinton, Obama, Holder et Brennan étaient "d'apparence similaire", portant plusieurs timbres et une même adresse d'expéditeur: celle de Mme Wasserman Schultz. La police fédérale a estimé "possible qu'il y ait d'autres paquets envoyés ailleurs", appelant le public à la vigilance.
"De la haine dans l'air" Plusieurs responsables ont vu dans ces envois le signe que la polarisation qui caractérise la vie politique américaine depuis l'élection de Donald Trump est allée trop loin. "C'est une période troublante, une période de divisions profondes et nous devons faire tout notre possible pour nous rassembler", a déclaré Hillary Clinton depuis la Floride. "Nous traversons une période où les gens ressentent beaucoup de haine dans l'air", a déclaré le maire démocrate de New York, Bill de Blasio. Malgré l'appel au rassemblement de Trump, et des condamnations de la violence par plusieurs responsables républicains, les chefs démocrates au Congrès ont accusé le président de cautionner la violence, rappelant qu'il avait traité les médias d'"ennemis du peuple" et tardé à dénoncer les militants d'extrême droite à l'origine des violentes manifestations de Charlottesville à l'été 2017. "De façon répétée, le président cautionne la violence physique et divise les Américains avec ses mots et ses actes", ont indiqué Nancy Pelosi et Chuck Schumer dans un communiqué. Le président de CNN, Jeff Zucker, a accusé la Maison Blanche d'"incompréhension totale face à la gravité de ses attaques continues contre les médias". Ces bombes artisanales surviennent en pleine campagne pour les élections du 6 novembre, qui verront le renouvellement des 435 membres de la Chambre des représentants et du tiers des sénateurs. Leur issue sera déterminante pour la suite de la présidence Trump. Après un débat tendu sur la confirmation à la Cour suprême du juge conservateur Brett Kavanaugh, que les démocrates ont tenté en vain d'empêcher, la campagne était jusqu'ici dominée par les informations sur des milliers de migrants marchant depuis le Honduras vers la frontière mexico-américaine. Donald Trump, qui enchaîne les meetings à travers le pays, s'est engagé à les stopper. Il a notamment déclaré que les migrants étaient encouragés par les démocrates, et des personnalités conservatrices ont accusé M. Soros de les soutenir financièrement.
Actes de "terrorisme intérieur" Le chef républicain du Sénat américain a dénoncé mercredi des "actes de terrorisme intérieur" après l'envoi de colis potentiellement explosifs à l'ex-président démocrate Barack Obama, l'ancienne secrétaire d'Etat et candidate démocrate à la présidentielle Hillary Clinton ainsi qu'à la chaîne CNN. "Je m'élève avec tous les Américains pour condamner les tentatives d'actes de terrorisme intérieur survenues aujourd'hui", écrit Mitch McConnell dans un communiqué, en remerciant les forces de l'ordre et les services postaux qui "protègent nos dirigeants et personnalités publiques face à de tels actes inadmissibles". Le chef républicain de la Chambre des représentants, troisième personnalité politique la plus puissante aux Etats-Unis, a également durement condamné l'envoi de ces colis, moins de deux semaines avant les élections parlementaires cruciales du 6 novembre. "Nous ne tolérerons aucune tentative de terroriser des personnalités publiques", a-t-il écrit sur Twitter. "Les responsables d'actes aussi répréhensibles doivent être traduits en justice". Le service fédéral chargé de la protection des anciens présidents et de leur famille a indiqué mercredi avoir intercepté deux colis contenant "des engins explosifs potentiels" destinés à Hillary Clinton et Barack Obama, deux jours après qu'une bombe artisanale a été retrouvée chez le financier George Soros, autre démocrate notoire. La police de Floride a plus tard annoncé mercredi enquêter sur la découverte d'un "colis suspect" à proximité du bureau de l'élue au Congrès américain Debbie Wasserman Schultz, ex-présidente du comité national du parti démocrate. Personne n'a encore revendiqué l'envoi de ces colis. La Maison Blanche a rapidement dénoncé des actes "ignobles".
Trump: la "violence politique" n'a pas sa place Le président des Etats-Unis Donald Trump a lancé mercredi un appel à l'unité après l'interception de colis suspects adressés à Hillary Clinton et à Barack Obama, jugeant que la "violence politique" n'était pas tolérable aux Etats-Unis. "Dans des moments comme celui-ci, nous devons nous rassembler", a déclaré M. Trump depuis la Maison Blanche. "Les actes et les menaces de violence politique de quelque nature que ce soit n'ont pas leur place aux Etats-Unis", a ajouté le président américain qui a recours, en campagne, à une rhétorique extrêmement agressive vis-à-vis de ses adversaires politiques. "Nous sommes très en colère", a-t-il ajouté, promettant de "faire toute la lumière" sur cette affaire. Le président américain, qui n'a pas cité nommément son prédécesseur Barack Obama ou sa rivale démocrate à la présidentielle de 2016 Hillary Clinton, a souligné que toutes les ressources nécessaires seraient déployées pour mener à bien l'enquête de la police fédérale. La Première dame, Melania Trump, a de son côté dénoncé des "attaques lâches". "Je condamne avec vigueur tous ceux qui choisissent la violence", a-t-elle déclaré.