Les positions divergeaient jeudi au Soudan autour de la voie à suivre pour une sortie de la crise politique qui secoue le pays depuis des mois, un compromis sur la composante du Conseil souverain chargé de piloter la transition semble devenir difficile à obtenir. Après deux jours de grève générale au Soudan, les divergences persistent sur la composition d'un futur Conseil souverain censé assurer une transition de trois ans, chaque camp réclame une majorité des sièges. Face au refus persistant des militaires de céder le pouvoir, l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC) a décidé d'utiliser l'"arme devenue inévitable de la grève générale".
L'ALC réclame un Etat civil sur tous les plans Les manifestants, rassemblés depuis le 6 avril devant le siège de l'armée, demandent désormais un pouvoir civil pour remplacer le Conseil militaire de transition (CMT). "La grève a été un succès", a déclaré mercredi soir Ahmed Ismaïl al-Taj, membre de l'ALC, lors d'une conférence de presse, ajoutant que le mouvement "avait été suivi à 90% dans les secteurs d'activités qui ont répondu à l'appel". "Il n'y a pas d'avancée dans les négociations depuis leur suspension la semaine dernière", a indiqué un autre membre Babakir Faisal, ajoutant "qu'il n'y avait aucune communication" avec les militaires, depuis la récente suspension du dialogue, qui reste, toutefois, maintenu pour une reprise prochaine. La dernière proposition de l'Alliance pour la Liberté et le Changement est celle d'un vote à la majorité simple et d'une rotation de la présidence. L'ALC ne serait d'ailleurs pas contre offrir le poste à un officier. "Mais pas pendant trois ans. Il faut une alternance avec un civil", indique l'opposant Khalid Omar Youssef. Pendant ces deux jours, le CMT n'a pas montré une quelconque intention de céder. Ces dirigeants ont multiplié les voyages à l'étranger, comme pour consolider des alliances, a-t-on estimé. "Les militaires se rendront compte à la fin que seule la volonté des Soudanais prévaudra", a averti M. Youssef. Pour Khalid Omar Youssef, secrétaire général du parti du Congrès soudanais (SCP), les militaires n'ont désormais plus qu'une option : écouter la population. Cela veut dire céder aux exigences des négociateurs de l'ALC pour le cas du Conseil souverain, l'organe qui va piloter la transition.
L'UA insiste sur le dialogue pour une solution rapide à la crise Face à la situation de crise au Soudan, l'Union africaine (UA) a réitéré son appel à une solution rapide, insistant sur le dialogue et le respect de la volonté du peuple soudanais. "Nous réaffirmons le besoin urgent d'une résolution rapide de la crise actuelle basée sur le respect de la volonté et des aspirations du peuple soudanais d'une transition démocratique", a déclaré l'UA dans un communiqué. L'organisation panafricaine a exprimé, également, sa "profonde préoccupation face à la situation au Soudan et à ses conséquences pour le pays, la région et le continent africain". L'UA a appelé, en outre, "tous les Soudanais à défendre les intérêts de leur pays avant toute autre considération", invitant l'armée et les représentants des forces civiles à "travailler ensemble pour trouver une solution globale à la crise". "L'Union africaine continuera d'aider le Soudan à s'engager de manière positive et loyale dans un processus conduisant à une solution politique globale", a déclaré le commissaire africain chargé de la Paix et de la Sécurité, Smaïl Chergui. M. Chergui s'exprimait après sa rencontre lundi avec le chef du Conseil militaire de la transition au Soudan, Abdul Fattah Burhan. "Nous estimons que les Soudanais ont la capacité de créer une nouvelle phase pour leur pays", a souligné M. Chergui, affirmant avoir échangé avec le chef du Conseil de transition leurs points de vue sur la situation au Soudan. "L'Union africaine est prête à soutenir le processus de dialogue en cours et à faciliter le soutien international en faveur de la stabilité et du développement au Soudan", a fait savoir, également, le Commissaire africain chargé de la Paix et de la Sécurité. La réaction de l'UA intervient au lendemain de la grève générale de deux jours initiée par les mouvements de contestation soudanaise, réclamant la mise en place d' "un gouvernement civil", plus de six semaines après la destitution du président Omar al-Bachir. Les manifestants, rassemblés depuis le 6 avril devant le siège de l'armée, demandent désormais de transmettre totalement le pouvoir aux civils. Pour sa part, le Conseil militaire de transition ne veut pas de précipitation et conçoit qu'un transfert de pouvoir ne peut se faire qu'après l'élection d'un président de la République.
Des élections anticipées sont possibles, estime le CMT Le vice-président du Conseil militaire de transition au pouvoir au Soudan, Mohamed Hamdan Daglo, a déclaré lundi que le CMT n'était pas opposé à la tenue d'élections anticipées d'ici trois mois, laissant entendre que c'était au peuple de décider, pas à l'opposition. "Les élections visent à ce qu'un gouvernement soit choisi par le peuple et non pas par ces gens-là", a-t-il lancé en référence aux membres de l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC, opposition). S'exprimant devant des policiers à la Faculté de droit et des sciences policières à Khartoum, il a souligné que la composition du gouvernement devait reposer sur le pourcentage des représentants élus de partis, avant d'accuser l'ALC de vouloir exclure l'armée et les forces régulières de la scène politique. Les pourparlers entre le CMT et l'opposition sont dans l'impasse en raison de désaccords sur la composition du futur Conseil souverain et de sa direction. Le CMT dirige le pays depuis l'éviction en avril du président Omar el-Béchir.