oris Johnson a répété mardi qu'il ne demanderait pas de nouveau report du Brexit, quelques heures après la promulgation d'une loi l'obligeant à solliciter trois mois de plus auprès de l'Union européenne si aucun accord n'est conclu avant le 31 octobre. Pour la deuxième fois en moins d'une semaine, les députés britanniques ont rejeté la proposition du gouvernement, qui souhaite sortir de l'impasse en organisant des élections législatives anticipées. Alors que l'incertitude est à son comble, les travaux du Parlement ont été suspendus jusqu'au 14 octobre, ce qui a donné lieu à des tensions à la Chambre des communes, où des membres de l'opposition ont brandi des pancartes frappées du slogan "Réduits au silence" et ont scandé "Honte à vous !" à l'adresse des élus conservateurs. Boris Johnson semble avoir perdu la main sur la sortie de l'UE avec la promulgation lundi du texte qui donne au gouvernement jusqu'au 19 octobre, soit au lendemain du prochain Conseil européen, pour conclure un nouvel accord avec Bruxelles ou pour obtenir l'aval du Parlement à un "no deal", ce qu'il a déjà exclu. Les dirigeants européens ont répété à plusieurs reprises qu'ils n'avaient pas reçu de propositions précises avant le prochain conseil européen, au cours duquel le Premier ministre espère parvenir à un accord. "Ce gouvernement poursuivra les négociations en vue d'un accord, tout en se préparant à une sortie sans accord", a promis le Premier ministre après le rejet dans la nuit de lundi à mardi de la motion proposant des législatives anticipées. "J'irai à ce sommet crucial le 17 octobre et peu importe le nombre de dispositifs que ce parlement inventera pour me lier les mains, je vais tout faire pour obtenir un accord dans l'intérêt national (...) Ce gouvernement ne reportera pas encore le Brexit." Jeremy Corbyn, chef de file de l'opposition travailliste, a assuré pour sa part que le Labour était impatient de participer à des élections, mais qu'il voulait d'abord qu'un report du Brexit soit validé. "Malgré notre enthousiasme, nous ne sommes pas prêts à risquer d'infliger à notre communauté le désastre d'un no deal", a-t-il indiqué.
"Pas de Backstop, pas d'accord" Plus de trois ans après le référendum du 23 juin 2016 par lequel un peu moins de 52% des électeurs ont opté pour une sortie de l'Union européenne, le divorce est suspendu au bras de fer entre Johnson et les opposants au no deal. Ces derniers ont formé mardi un nouveau groupe parlementaire pour tenter de convaincre leurs collègues d'adopter un texte inspiré de celui qui a été rejeté trois fois aux Communes. Le groupe formé d'élus conservateurs, travaillistes et libéraux-démocrates a été baptisé "MPs for a deal". Son objectif et de rassembler autour du projet que l'ex-Première ministre Theresa May a élaboré avec le Parti travailliste. "Nous sommes tous favorables à la conclusion d'un accord et à une sortie ordonnée", a déclaré la travailliste Caroline Flint, selon laquelle une cinquantaine de députés du Labour souhaitent un tel accord. "Notre voix ne porte peut-être pas autant que d'autres, mais c'est celle de la raison", a-t-elle ajouté. Lundi lors d'un déplacement à Dublin, le Premier ministre a assuré avoir "soigneusement examiné les conséquences" d'un Brexit sans accord, pour l'Irlande comme pour le Royaume-Uni. Boris Johnson et plusieurs membres de son gouvernement affirment qu'ils sont en train de présenter de nouvelles propositions à l'Union européenne et que les négociations progressent avec Bruxelles. L'un des principaux points d'achoppement des discussions concerne le filet de sécurité censé empêcher le rétablissement de contrôles à la frontière entre la République d'Irlande et l'Irlande du Nord. Boris Johnson réclame la suppression de ce "backstop", hypothèse exclue par l'UE et Dublin. "En l'absence d'arrangements alternatifs, pas de backstop signifie pas d'accord pour nous", a rappelé lundi le Premier ministre irlandais Leo Varadkar.
Le Brexit sera reporté, statu quo de la BoE Le Brexit sera à nouveau reporté, estiment des économistes interrogés par Reuters, qui évaluent à 35% la probabilité que la Grande-Bretagne quitte l'Union européenne (UE) sans accord même si le Parlement britannique tente de s'opposer à cette issue. C'était la même probabilité que lors de l'enquête d'août et c'est la plus élevée depuis que Reuters pose la question, soit depuis deux ans. Les prévisions variaient de 10% à 60%. Le Premier ministre Boris Johnson a affirmé mardi qu'il ne demanderait pas un nouveau report du Brexit, quelques heures après la promulgation d'une loi l'obligeant à solliciter auprès de l'UE un report de trois mois jusqu'à fin janvier 2020 si aucun accord n'est trouvé avec Bruxelles avant le 31 octobre. Trente-deux des 35 économistes qui ont répondu à une question supplémentaire sur le sujet ont estimé que la date de départ prévue serait à nouveau repoussée, le plus vraisemblablement en janvier. "Johnson a dit qu'il préfèrerait 'crever la gueule ouverte' que repousser le Brexit mais nous n'y croyons pas une seconde", dit Stefan Koopman (Rabobank). Une grande majorité des économistes continue de penser que les deux parties passeront un accord de libre échange. L'option la plus probable qui vient ensuite, là encore une confirmation, est un Brexit dur et des échanges réglés par l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'avant-dernière option est que Londres reste membre de l'Espace économique européen (EEE), contribuant au budget de l'UE pour conserver un accès au marché unique mais sans droit de regard. Et la dernière option, une fois de plus jugée la moins probable de toutes, est l'annulation pure et simple du Brexit. Les économistes pensent enfin que la Banque d'Angleterre (BoE) laissera son taux d'intervention à 0,75% jusqu'en 2022 au moins, soit au bout de l'horizon prévisionnel, alors que l'enquête d'août donnait 2021. Et ce parce que l'inflation évoluerait, croit-on, autour de l'objectif de la BoE, soit 2%.
La motion proposant des élections anticipées rejetée aux Communes La motion du gouvernement britannique proposant la tenue d'élections législatives anticipées a été rejetée mardi à la Chambre des communes. L'initiative du Premier ministre Boris Johnson semblait mathématiquement vouée à l'échec, les règles en vigueur au Royaume-Uni exigeant que la motion soit approuvée par les deux tiers de l'assemblée, soit 434 voix. Or, le Labour disposant à lui seul de 247 des 650 sièges, ce seuil était hors de portée. Seuls 293 députés ont soutenu dans la nuit de lundi à mardi la proposition du gouvernement.
Le président des Communes va quitter ses fonctions John Bercow, président de la Chambre des Communes, a annoncé lundi qu'il démissionnerait de son poste le 31 octobre au plus tard. Si les députés approuvent ce lundi la tenue d'élections anticipées, ce qui paraît peu probable, John Bercow ne se représentera pas dans sa circonscription. Dans l'hypothèse contraire, il démissionnera le 31 octobre, date théorique du Brexit. Elu conservateur à la Chambre des Communes depuis 1997, il en est le président depuis juin 2009 et il s'est opposé à plusieurs tentatives gouvernementales qui lui semblaient aller à l'encontre des prérogatives parlementaires. John Bercow a adressé lundi une nouvelle mise en garde au gouvernement de Boris Johnson, les yeux rivés vers les bancs des ministres, leur intimant l'ordre de ne pas continuer de rabaisser le Parlement. Son discours a été ponctué d'une salve d'applaudissements venus des rangs de l'opposition.