Jeune Afrique: On a coutume de présenter l'Afrique comme une «nouvelle frontière». Vos chiffres contredisent cette vision optimiste. Les investissements directs étrangers ont chuté… Nicole Moussa : L'Afrique a souffert de la crise au même titre que les autres régions du monde. Mais il faut souligner que, si les économies développées ont commencé à enregistrer une baisse importante de leur flux d'IDE dès 2008, les pays en développement ont continué à les voir croître sur cette même période. L'Afrique a même connu une année record en 2008 et la plus forte progression par rapport à l'année précédente (+ 67 %). D'une certaine manière, on peut donc considérer la baisse en 2009 comme une correction normale. Cette chute est-elle le fait d'une contraction des financements ou d'une raréfaction des projets à financer? Les deux. Mais il y a d'abord une contraction importante des sources de financement. Elle a conduit à reporter, voire à annuler des projets, notamment dans les infrastructures et le tourisme. Quant au second phénomène, il affecte surtout l'Afrique du Nord, dont le marché principal est de l'autre côte de la Méditerranée. Du fait du fléchissement de la demande européenne, des projets ont dû être revus à la baisse dans le textile, l'équipement… La chute des cours des matières premières a également joué en ce sens. Il y a une conjonction de phénomènes. La baisse de la demande dans les pays riches affecte les investissements dans les industries d'exportation des pays émergents. Mais dans le même temps, les multinationales sont dans l'obligation de réduire leurs prix de revient et poursuivent donc leur stratégie de relocalisation des centres de production dans des pays à bas coûts. Il n'empêche, en 2009, l'Afrique a subi une baisse de l'aide publique au développement (APD) et des transferts des migrants, et une chute des IDE… Cela fait beaucoup pour des économies en manque de capitaux. La reprise de l'APD dépendra du redémarrage économique : quand et à quel rythme ? Pour les IDE, nous pouvons être assez optimistes. À l'échelle du continent, ils sont principalement orientés vers les industries extractives liées à l'économie chinoise. Or, la machine économique chinoise a redémarré puisque le taux de croissance est de 10 % en 2009. Par ailleurs, plus les sources de financement sont diversifiées (Europe, Etats-Unis, Chine, pays du Golfe…), plus l'Afrique peut en tirer profit. L'année 2009 ne serait donc qu'une parenthèse… Il y a toujours des excédents financiers à travers le monde. Et l'Afrique offre un taux de rendement plus élevé qu'ailleurs. Et qui aurait imaginé que les IDE en Afrique du Nord puissent passer de 3,5 milliards de dollars en 2000 à 24 milliards en 2008? Cette baisse à 18 milliards en 2009 ne doit pas occulter l'essentiel, cette tendance lourde. Sur l'ensemble du continent, nous étions à seulement 29 milliards en 2005. Qui pouvait penser que l'Afrique allait être aussi attractive? Jeune Afrique: On a coutume de présenter l'Afrique comme une «nouvelle frontière». Vos chiffres contredisent cette vision optimiste. Les investissements directs étrangers ont chuté… Nicole Moussa : L'Afrique a souffert de la crise au même titre que les autres régions du monde. Mais il faut souligner que, si les économies développées ont commencé à enregistrer une baisse importante de leur flux d'IDE dès 2008, les pays en développement ont continué à les voir croître sur cette même période. L'Afrique a même connu une année record en 2008 et la plus forte progression par rapport à l'année précédente (+ 67 %). D'une certaine manière, on peut donc considérer la baisse en 2009 comme une correction normale. Cette chute est-elle le fait d'une contraction des financements ou d'une raréfaction des projets à financer? Les deux. Mais il y a d'abord une contraction importante des sources de financement. Elle a conduit à reporter, voire à annuler des projets, notamment dans les infrastructures et le tourisme. Quant au second phénomène, il affecte surtout l'Afrique du Nord, dont le marché principal est de l'autre côte de la Méditerranée. Du fait du fléchissement de la demande européenne, des projets ont dû être revus à la baisse dans le textile, l'équipement… La chute des cours des matières premières a également joué en ce sens. Il y a une conjonction de phénomènes. La baisse de la demande dans les pays riches affecte les investissements dans les industries d'exportation des pays émergents. Mais dans le même temps, les multinationales sont dans l'obligation de réduire leurs prix de revient et poursuivent donc leur stratégie de relocalisation des centres de production dans des pays à bas coûts. Il n'empêche, en 2009, l'Afrique a subi une baisse de l'aide publique au développement (APD) et des transferts des migrants, et une chute des IDE… Cela fait beaucoup pour des économies en manque de capitaux. La reprise de l'APD dépendra du redémarrage économique : quand et à quel rythme ? Pour les IDE, nous pouvons être assez optimistes. À l'échelle du continent, ils sont principalement orientés vers les industries extractives liées à l'économie chinoise. Or, la machine économique chinoise a redémarré puisque le taux de croissance est de 10 % en 2009. Par ailleurs, plus les sources de financement sont diversifiées (Europe, Etats-Unis, Chine, pays du Golfe…), plus l'Afrique peut en tirer profit. L'année 2009 ne serait donc qu'une parenthèse… Il y a toujours des excédents financiers à travers le monde. Et l'Afrique offre un taux de rendement plus élevé qu'ailleurs. Et qui aurait imaginé que les IDE en Afrique du Nord puissent passer de 3,5 milliards de dollars en 2000 à 24 milliards en 2008? Cette baisse à 18 milliards en 2009 ne doit pas occulter l'essentiel, cette tendance lourde. Sur l'ensemble du continent, nous étions à seulement 29 milliards en 2005. Qui pouvait penser que l'Afrique allait être aussi attractive?