L'histoire de Aïcha et de Messaoud est pareille à celle de milliers de couples qui vivotent dans les sordides cités populaires qui ceinturent les grandes villes : ils ont été jeunes, et se sont plus quand ils se sont rencontrés dans l'entreprise où Messaoud ramait déjà depuis quelques années. Ils se sont aimés, se sont mariés et ont eu trois enfants. Aïcha qui avait raté son bac suivit plus tard un stage de PEM et devint professeur de français sans avoir jamais lu un roman. Elle était instruite sans être cultivée. Lui c'était tout le contraire : autodidacte, il avait beaucoup lu et vu des films. Il s'intéressait à la politique et il était féru d'histoire et de littérature malgré ces différences. Aïcha et Messaoud connurent une très longue lune de miel, leur modeste logis abritait leurs roucoulements, ils s'inventaient les noms les plus tendres pour s'appeler : ma biche, mon biquet, ma perdrix, mon chou, mon oiseau de paradis, ma tourterelle, ma caille… C'était Aouicha par ci, Saoud par là, Aâouiouech par ci et Souiaâd par là. C'était un plaisir ! Mais voilà ! «Le temps aux plus belles choses se plaît à faire un affront…» et dès que les trois enfants ont commencé à grandir, Aïcha se mit à changer de comportement. Elle ne se maquillait plus, ne restait devant le miroir que pour ajuster l'éternel fichu qu'elle avait adopté et qui lui donnait cet air de mégère… Elle avait remisé sa coquetterie au rayon des souvenirs. Cela désespérait Messaoud qui lui chantonnait souvent «tu te laisses aller». Pire ! Elle le remballait fermement chaque fois qu'il lui venait un accès de tendresse. Elle lui disait : «Nos enfants sont grands maintenant ! Il faut penser à eux !». Messaoud, la mort dans l'âme, se glissa alors dans le rôle du pater familial qui n'était là que pour régler les problèmes d'intendance. Les roucoulements, les gazouillis désertèrent le nid. La vie devint aussi terne que l'environnement de la cité. Plus d'appels tendres ni de soupirs étouffés et d'exclamations de joie. Une chape grise s'abattit sur le couple dont les appels se résumèrent désormais à : Ya radjel ! Ya m'ra ! L'histoire de Aïcha et de Messaoud est pareille à celle de milliers de couples qui vivotent dans les sordides cités populaires qui ceinturent les grandes villes : ils ont été jeunes, et se sont plus quand ils se sont rencontrés dans l'entreprise où Messaoud ramait déjà depuis quelques années. Ils se sont aimés, se sont mariés et ont eu trois enfants. Aïcha qui avait raté son bac suivit plus tard un stage de PEM et devint professeur de français sans avoir jamais lu un roman. Elle était instruite sans être cultivée. Lui c'était tout le contraire : autodidacte, il avait beaucoup lu et vu des films. Il s'intéressait à la politique et il était féru d'histoire et de littérature malgré ces différences. Aïcha et Messaoud connurent une très longue lune de miel, leur modeste logis abritait leurs roucoulements, ils s'inventaient les noms les plus tendres pour s'appeler : ma biche, mon biquet, ma perdrix, mon chou, mon oiseau de paradis, ma tourterelle, ma caille… C'était Aouicha par ci, Saoud par là, Aâouiouech par ci et Souiaâd par là. C'était un plaisir ! Mais voilà ! «Le temps aux plus belles choses se plaît à faire un affront…» et dès que les trois enfants ont commencé à grandir, Aïcha se mit à changer de comportement. Elle ne se maquillait plus, ne restait devant le miroir que pour ajuster l'éternel fichu qu'elle avait adopté et qui lui donnait cet air de mégère… Elle avait remisé sa coquetterie au rayon des souvenirs. Cela désespérait Messaoud qui lui chantonnait souvent «tu te laisses aller». Pire ! Elle le remballait fermement chaque fois qu'il lui venait un accès de tendresse. Elle lui disait : «Nos enfants sont grands maintenant ! Il faut penser à eux !». Messaoud, la mort dans l'âme, se glissa alors dans le rôle du pater familial qui n'était là que pour régler les problèmes d'intendance. Les roucoulements, les gazouillis désertèrent le nid. La vie devint aussi terne que l'environnement de la cité. Plus d'appels tendres ni de soupirs étouffés et d'exclamations de joie. Une chape grise s'abattit sur le couple dont les appels se résumèrent désormais à : Ya radjel ! Ya m'ra !