L'incident avait fait grand bruit par cette matinée calme et tiède. Il avait surpris tout le monde par sa brusquerie, sa violence et son caractère insolite. Le choc du corps s'écrasant sur le métal avait fait courir toutes les ménagères à leurs balcons. Messaoud, qui essayait pour la énième fois de commencer à rédiger ses mémoires se leva, surpris : «Heureusement que Aïcha était au travail !» pensa-t-il en songeant à l'effervescence que son paisible foyer aurait connu si sa moitié était dans les parages. Maintenant c'était à lui qu'échut le rôle de «remplir les bouteilles». Tout le monde avait cru d'abord à un suicide. Il y eut un réel soulagement quand il fut constaté que ce chambardement avait été causé par un imposant bélier qui avait sauté : du septième, selon, les témoins oculaires qui l'avaient vu s'écraser sur le toit d'une voiture neuve. Elle appartenait au type du quatrième : cela n'allait pas arranger leurs relations vu que leurs épouses respectives avaient la douce habitude de s'envoyer des amabilités sous forme de noms d'oiseaux et cela entretenait une certaine animation dans ce quartier qui aurait été morne sans les enfants, les femmes et… les moutons. Les commentaires allaient bon train chez les badauds qui faisaient cercle autour du malheureux agonisant : des anecdotes sur des béliers réfractaires fleurirent aussitôt sur toutes les lèvres ; Tout le monde se mit d'accord que c'était un signe du ciel et en premier lieu l'exorciste du coin qui était apparu là comme par enchantement, lui qui était si casanier d'habitude. Il avait une allure effrayante avec sa barbe hirsute et il était affligé d'un strabisme vertical : il avait un œil grand ouvert qui scrutait le ciel, et l'autre, à moitié fermé, qui sondait la terre. Il proclama sentencieusement avec cette posture qu'ont les faux devins que ce mauvais présage n'était qu'un mauvais signe avant-coureur d'autres catastrophes : Mais, à côté, les voisins immédiats avaient commencé à sortir «les dossier» : d'une part certains affirmaient que «bien mal acquis ne profite jamais», que Si Dahmane dont la bonne fortune était d'origine douteuse était d'une avarice exemplaire et que, de l'autre côté, Aami Saïd était réputé comme un fieffé coquin : il avait toujours fait «taxi» clandestin et il ne ratait jamais l'occasion de rançonner les gens , même les voisins, au détour d'une course urgente. «Voilà un conflit qui risque de se terminer au commissariat !» se dit Messaoud qui avait sa propre explication des causes profondes du drame : cartésien comme toujours, Messaoud expliquera à Aïcha, qui avait raté à son grand dam l'événement, que le bélier était confiné depuis quelques jours dans ce balcon et qu'il était astreint à un célibat forcé. Par la force des choses, il avait dû sentir les doux effluves d'une brebis qui passait par là, parmi un troupeau d'ovins et de caprins surgi de nulle part, dans ce quartier oublié. Le pauvre mâle avait voulu jouer les Roméo à la renverse ! L'incident avait fait grand bruit par cette matinée calme et tiède. Il avait surpris tout le monde par sa brusquerie, sa violence et son caractère insolite. Le choc du corps s'écrasant sur le métal avait fait courir toutes les ménagères à leurs balcons. Messaoud, qui essayait pour la énième fois de commencer à rédiger ses mémoires se leva, surpris : «Heureusement que Aïcha était au travail !» pensa-t-il en songeant à l'effervescence que son paisible foyer aurait connu si sa moitié était dans les parages. Maintenant c'était à lui qu'échut le rôle de «remplir les bouteilles». Tout le monde avait cru d'abord à un suicide. Il y eut un réel soulagement quand il fut constaté que ce chambardement avait été causé par un imposant bélier qui avait sauté : du septième, selon, les témoins oculaires qui l'avaient vu s'écraser sur le toit d'une voiture neuve. Elle appartenait au type du quatrième : cela n'allait pas arranger leurs relations vu que leurs épouses respectives avaient la douce habitude de s'envoyer des amabilités sous forme de noms d'oiseaux et cela entretenait une certaine animation dans ce quartier qui aurait été morne sans les enfants, les femmes et… les moutons. Les commentaires allaient bon train chez les badauds qui faisaient cercle autour du malheureux agonisant : des anecdotes sur des béliers réfractaires fleurirent aussitôt sur toutes les lèvres ; Tout le monde se mit d'accord que c'était un signe du ciel et en premier lieu l'exorciste du coin qui était apparu là comme par enchantement, lui qui était si casanier d'habitude. Il avait une allure effrayante avec sa barbe hirsute et il était affligé d'un strabisme vertical : il avait un œil grand ouvert qui scrutait le ciel, et l'autre, à moitié fermé, qui sondait la terre. Il proclama sentencieusement avec cette posture qu'ont les faux devins que ce mauvais présage n'était qu'un mauvais signe avant-coureur d'autres catastrophes : Mais, à côté, les voisins immédiats avaient commencé à sortir «les dossier» : d'une part certains affirmaient que «bien mal acquis ne profite jamais», que Si Dahmane dont la bonne fortune était d'origine douteuse était d'une avarice exemplaire et que, de l'autre côté, Aami Saïd était réputé comme un fieffé coquin : il avait toujours fait «taxi» clandestin et il ne ratait jamais l'occasion de rançonner les gens , même les voisins, au détour d'une course urgente. «Voilà un conflit qui risque de se terminer au commissariat !» se dit Messaoud qui avait sa propre explication des causes profondes du drame : cartésien comme toujours, Messaoud expliquera à Aïcha, qui avait raté à son grand dam l'événement, que le bélier était confiné depuis quelques jours dans ce balcon et qu'il était astreint à un célibat forcé. Par la force des choses, il avait dû sentir les doux effluves d'une brebis qui passait par là, parmi un troupeau d'ovins et de caprins surgi de nulle part, dans ce quartier oublié. Le pauvre mâle avait voulu jouer les Roméo à la renverse !