L'ethnomusicologue et chercheur au CNRS Mehenna Mahfoufi a fait redécouvrir, dans la soirée du jeudi au Centre culturel algérien de Paris, la personnalité et l'œuvre musicale de Cheikh El Hasnaoui, à l'occasion de la sortie de son livre consacré à ce chanteur de l'exil. L'assistance, parmi laquelle figuraient de nombreux artistes, comme Kamel Hamadi, qui a formé des générations entières de chanteurs algériens, le poète Benmohamed, qui a signé les paroles de plusieurs «succès» comme ceux d'Idir, ou encore Behidja Rahal, «la Diva de la musique andalouse», connue pour son travail inestimable sur les «noubate», a eu droit à de nombreuses surprises «concoctées» par l'auteur. Mehenna Mahfoufi a retracé dans son ouvrage «Cheikh El Hasnaoui chanteur algérien moraliste et libertaire», avec une certaine émotion parfois, ses rencontres, quatre au total, avec le chanteur à Saint Louis de la Réunion, en plein Océan indien. La dernière a eu lieu le 7 juillet 2002 lorsque l'auteur jettera un dernier regard sur la dépouille mortelle du Cheikh avant qu'elle ne soit ensevelie dans le cimetière de la ville. Pour rencontrer El Hasnaoui, l'auteur a entrepris une véritable enquête, usant de tous les subterfuges, allant d'un contact à un autre avant d'être conduit enfin vers ce vieux qui vivait seul et dans la sérénité avec son épouse, Denise. De ces voyages, Mehenna Mahfoufi a apporté des témoignages d'une grande valeur de l'artiste qui évoquait son enfance, son expérience artistique et sa douleur de vivre un exil choisi mais également forcé. L'auteur a également ramené dans ses bagages près de six heures de films tournés avec El Hasnaoui et tous les gens qui l'ont connu ou fortement influencé par ses œuvres comme Kamel Hamadi, les défunt El Hachemi Guerouabi, Saadaoui Salah ou encore Chérif Hamani. Des extraits de sa rencontre avec le cheikh ont été d'ailleurs diffusés par la télévision nationale. Mais tous ces matériaux audiovisuels restent à exploiter. Le chanteur-compositeur Kamel Hamadi dira qu'El Hasnaoui a été son «maître». «J'ai admiré le Cheikh. J'ai appris ses modes. Ses mélodies étaient agréables. Pour moi et pour tous les autres chanteurs de ma génération, il était notre maître», dira-t-il. Le poète Benmohamed, animateur de plusieurs émissions à la Chaîne 2 de la radio nationale, se souvient des chansons d'El Hasnaoui qui ont bercé sa jeunesse. «El Hasnaoui était interdit de séjour dans les foyers kabyles. Les hommes écoutaient en cachette ses chansons qui bousculaient les tabous à l'époque. Ce n'est qu'en arrivant à Alger, que j'ai découvert ses chansons. Plus on les écoute, plus on découvre des sens cachés et des dimensions encore beau plus profondes», a-t-il dit. «El Hasnaoui était le chanteur qui a accordé le plus de respect à la femme algérienne. Ses chansons sont les plus beaux hymnes dédiés à la femme et le plus roman d'amour kabyle», a-t-il ajouté. Behidja Rahal, elle, a rencontré El Hasnaoui en mars 2001 à l'occasion d'un concert de musique andalou donné à la Réunion. «J'ai appris que le chanteur vivait depuis des années sur l'Ile, mais il était impossible d'obtenir son adresse pour lui rendre visite. Lors d'une conférence de presse, j'ai lancé un appel aux habitants de l'île qui connaissaient El Hasnaoui de m'indiquer ses coordonnées. L'appel, répercuté par la presse locale a trouvé un écho. C'est comme cela que je l'ai rencontré. J'ai eu le grand privilège de passer une journée entière avec lui. Je lui ai chanté un «istikhbar» qui l'a véritablement ému», se souvient-elle. Le public, peu nombreux, a pu également suivre des séquences filmées par l'auteur. La plus émouvante restera incontestablement celle où l'on voit la dépouille mortelle du chanteur, exposée dans un cercueil et sa mise en terre dans un caveau communal. Un chanteur vivant à Paris, Ahcène Adjroud, a interprété quelques chansons de Cheikh El Hasnaoui. Né en 1910 dans le village des Ihesnawen en Kabylie, le jeune Mohammed Khelouat s'initie au chaabi à Alger au contact de cheikh Mustapha Nador et d'El Anka. Mais c'est dans le Paris des années trente, celui de Mohammed El Kamel, Amraoui Missoum et Mohamed Iguerbouchen, qu'il entame une carrière d'auteur, compositeur et interprète, tout en exerçant le métier de cuisinier. Sous le nom d'El Hasnaoui, il va séduire un large public, avec des chansons en kabyle et en arabe populaire, comme «Ayema ayema», «El Ghorva Thouâar», «B'net Essohba», «Maison Blanche» ou encore «Noudjoum el-Leil» qu'il enregistre en 1968 à la veille de ses adieux à la scène. Dans sa retraite silencieuse durant plus de trente ans, Cheikh El Hasnaoui a conservé l'auréole du maître le plus prestigieux du chaâbi de l'émigration. Il s'est éteint le 6 juillet 2002 sur l'île de la Réunion. «Cheikh El Hasnaoui était et reste un grand chanteur parce qu'un public très nombreux, constamment renouvelé au fil des générations, a fait de lui un mythe depuis plus de 70 ans. Moraliste et libertaire à la fois, sa poésie est celle d'un pourfendeur de tabous. A ce titre, elle continue de bousculer les mentalités et ses fans le ressentent encore aujourd'hui», écrit Mehenna Mahfoufi, dans son ouvrage. L'ethnomusicologue et chercheur au CNRS Mehenna Mahfoufi a fait redécouvrir, dans la soirée du jeudi au Centre culturel algérien de Paris, la personnalité et l'œuvre musicale de Cheikh El Hasnaoui, à l'occasion de la sortie de son livre consacré à ce chanteur de l'exil. L'assistance, parmi laquelle figuraient de nombreux artistes, comme Kamel Hamadi, qui a formé des générations entières de chanteurs algériens, le poète Benmohamed, qui a signé les paroles de plusieurs «succès» comme ceux d'Idir, ou encore Behidja Rahal, «la Diva de la musique andalouse», connue pour son travail inestimable sur les «noubate», a eu droit à de nombreuses surprises «concoctées» par l'auteur. Mehenna Mahfoufi a retracé dans son ouvrage «Cheikh El Hasnaoui chanteur algérien moraliste et libertaire», avec une certaine émotion parfois, ses rencontres, quatre au total, avec le chanteur à Saint Louis de la Réunion, en plein Océan indien. La dernière a eu lieu le 7 juillet 2002 lorsque l'auteur jettera un dernier regard sur la dépouille mortelle du Cheikh avant qu'elle ne soit ensevelie dans le cimetière de la ville. Pour rencontrer El Hasnaoui, l'auteur a entrepris une véritable enquête, usant de tous les subterfuges, allant d'un contact à un autre avant d'être conduit enfin vers ce vieux qui vivait seul et dans la sérénité avec son épouse, Denise. De ces voyages, Mehenna Mahfoufi a apporté des témoignages d'une grande valeur de l'artiste qui évoquait son enfance, son expérience artistique et sa douleur de vivre un exil choisi mais également forcé. L'auteur a également ramené dans ses bagages près de six heures de films tournés avec El Hasnaoui et tous les gens qui l'ont connu ou fortement influencé par ses œuvres comme Kamel Hamadi, les défunt El Hachemi Guerouabi, Saadaoui Salah ou encore Chérif Hamani. Des extraits de sa rencontre avec le cheikh ont été d'ailleurs diffusés par la télévision nationale. Mais tous ces matériaux audiovisuels restent à exploiter. Le chanteur-compositeur Kamel Hamadi dira qu'El Hasnaoui a été son «maître». «J'ai admiré le Cheikh. J'ai appris ses modes. Ses mélodies étaient agréables. Pour moi et pour tous les autres chanteurs de ma génération, il était notre maître», dira-t-il. Le poète Benmohamed, animateur de plusieurs émissions à la Chaîne 2 de la radio nationale, se souvient des chansons d'El Hasnaoui qui ont bercé sa jeunesse. «El Hasnaoui était interdit de séjour dans les foyers kabyles. Les hommes écoutaient en cachette ses chansons qui bousculaient les tabous à l'époque. Ce n'est qu'en arrivant à Alger, que j'ai découvert ses chansons. Plus on les écoute, plus on découvre des sens cachés et des dimensions encore beau plus profondes», a-t-il dit. «El Hasnaoui était le chanteur qui a accordé le plus de respect à la femme algérienne. Ses chansons sont les plus beaux hymnes dédiés à la femme et le plus roman d'amour kabyle», a-t-il ajouté. Behidja Rahal, elle, a rencontré El Hasnaoui en mars 2001 à l'occasion d'un concert de musique andalou donné à la Réunion. «J'ai appris que le chanteur vivait depuis des années sur l'Ile, mais il était impossible d'obtenir son adresse pour lui rendre visite. Lors d'une conférence de presse, j'ai lancé un appel aux habitants de l'île qui connaissaient El Hasnaoui de m'indiquer ses coordonnées. L'appel, répercuté par la presse locale a trouvé un écho. C'est comme cela que je l'ai rencontré. J'ai eu le grand privilège de passer une journée entière avec lui. Je lui ai chanté un «istikhbar» qui l'a véritablement ému», se souvient-elle. Le public, peu nombreux, a pu également suivre des séquences filmées par l'auteur. La plus émouvante restera incontestablement celle où l'on voit la dépouille mortelle du chanteur, exposée dans un cercueil et sa mise en terre dans un caveau communal. Un chanteur vivant à Paris, Ahcène Adjroud, a interprété quelques chansons de Cheikh El Hasnaoui. Né en 1910 dans le village des Ihesnawen en Kabylie, le jeune Mohammed Khelouat s'initie au chaabi à Alger au contact de cheikh Mustapha Nador et d'El Anka. Mais c'est dans le Paris des années trente, celui de Mohammed El Kamel, Amraoui Missoum et Mohamed Iguerbouchen, qu'il entame une carrière d'auteur, compositeur et interprète, tout en exerçant le métier de cuisinier. Sous le nom d'El Hasnaoui, il va séduire un large public, avec des chansons en kabyle et en arabe populaire, comme «Ayema ayema», «El Ghorva Thouâar», «B'net Essohba», «Maison Blanche» ou encore «Noudjoum el-Leil» qu'il enregistre en 1968 à la veille de ses adieux à la scène. Dans sa retraite silencieuse durant plus de trente ans, Cheikh El Hasnaoui a conservé l'auréole du maître le plus prestigieux du chaâbi de l'émigration. Il s'est éteint le 6 juillet 2002 sur l'île de la Réunion. «Cheikh El Hasnaoui était et reste un grand chanteur parce qu'un public très nombreux, constamment renouvelé au fil des générations, a fait de lui un mythe depuis plus de 70 ans. Moraliste et libertaire à la fois, sa poésie est celle d'un pourfendeur de tabous. A ce titre, elle continue de bousculer les mentalités et ses fans le ressentent encore aujourd'hui», écrit Mehenna Mahfoufi, dans son ouvrage.