Pourquoi Saâdani risque la prison Le Soir d'Algérie 06 février 2014 Au-delà des répliques politiques éventuelles, la bravade d'Amar Saâdani est-elle sans conséquences juridiques ? La loi portant charte pour la paix et la réconciliation nationale a justement anticipé sur ce cas de figure, prévoyant des sanctions pénales pour les auteurs attentant, par leurs déclarations, à l'honorabilité des agents qui ont servi la nation durant les années de braises. Sofiane Aït Iflis – Alger (Le Soir) La loi portant Charte pour la paix et la réconciliation nationale prévoit une saisine automatique du ministère public au cas où une personne se rendrait coupable d'atteinte, à travers ses déclarations, «à l'honorabilité des agents» qui ont servi les institutions de la République. C'est, en somme , l'article 46 de la loi qui l'y prévoit : «Est puni d'un emprisonnement de trois ans à cinq ans et d'une amende de 250 000 à 500 000 dinars, quiconque qui, par ses déclarations , écrits ou tout autre acte, utilise ou instrumentalise les blessures de la tragédie nationale, pour porter atteinte aux institutions de la République, fragiliser l'Etat, nuire à l'honorabilité de ses agents qui l'ont dignement servi, ou ternir l'image de l'Algérie sur le plan international.» Il va sans dire que les déclarations de Saâdani, à travers lesquelles il vilipende le patron du DRS, le général Toufik, tombent sous le coup de cette loi. Logiquement, le parquet devrait s'en saisir de manière diligente et engager des poursuites judiciaires à l'encontre de Saâdani. Autrement dit, nul besoin que la personne ou l'institution visée par de telles déclarations enclenchent elles-mêmes la procédure judiciaire. Mais il se trouve que trois jours après la sortie de Saâdani, la machine judiciaire ne s'est pas mise en branle. Ce qui, à l'observation, dément les accusations de Saâdani qui a affirmé que la justice est instrumentalisée par le DRS. La logique aurait voulu, à prendre l'assertion de Saâdani comme une thèse vraie, que la justice réagisse promptement, d'autant que la loi l'y autorise, sinon l'y oblige en pareille situation. Or, cela n'a pas eu lieu. L'autosaisine, qui a prévalu dans des affaires moins graves, ne s'est pas produite. On comprend que l'affaire est délicate pour la justice. Elle met aux prises, au-delà des personnes, deux institutions qui, chacune selon son rôle et son poids, ont pignon sur la vitrine politique nationale. C'est de là peut-être qu'est venue l'hésitation du ministère public à s'autosaisir. Ce qui, à en croire la presse, a poussé le DRS à prendre sur lui d'intenter une action en justice. Faut-il rappeler que dans l'affaire de l'autoroute Est-Ouest, dans laquelle était impliqué le colonel Khaled du DRS, le département du renseignement ne s'est pas mis en travers de la justice mais s'est rendu à la décision de radier de ses rangs le colonel incriminé.